Vous savez tout ! A partir de vendredi 13 mars, 23h59, plus aucune info ne transpirera de vos tv, de vos radios, de vos sites préférés, la campagne du 1er tour s’achève dans une confusion sans pareille, les quelque réunions publiques restantes ont été annulées, les candidats soufflent de ne pas devoir prolonger davantage le supplice d’une campagne coûteuse en énergie comme en argent. Tout est sur la table, à commencer par le pot de gel hydroalcoolique. A vous de jouer, désormais.
« Franchement, je ne me vois pas repartir en campagne » , soupire un candidat : trop de tension, de pression, les adducteurs qui sifflent… Il est temps d’en finir et de laisser la population faire ses choix. L’allocution présidentielle du 12 mars au soir, si elle n’aura pas manqué de faire bondir la classe politique parisienne plus prompte à la récupération que N’golo Kanté, aura au moins entériné le maintien du premier tour des élections municipales, dimanche 15 mars. Coronavirus ou non, chacun devra effectuer son devoir de citoyen. Si Sartre relativisait, en son temps, l’opportunité de ne pas prendre position – « ne pas choisir, c’est encore choisir » , disait-il – gageons que les 28% de Français ayant l’intention de ne pas se rendre aux urnes tourneront casaque d’ici dimanche, à l’heure du journal et de la baguette, pour être un peu trivial. Gros plans sur les deux principaux bastions de Savoie : Onze candidats, quatre femmes, sept hommes. Et plus de diversité qu’il n’y paraît.
Aix-les-Bains
Ils sont quatre, tous élus au sein du conseil municipal actuel et tous… à bout de souffle. André Gimenez, Renaud Beretti, Dominique Fié et Marina Ferrari achèvent leur marathon, entamé à l’automne. Le « toujours » maire aixois (Renaud Beretti 2020 avec vous pour Aix) a prestement enjambé l’écueil de la prétendue alliance avec le Rassemblement national* et l’imprévue volte-face de son ex-première adjointe pour dérouler un programme tenant autant de l’intention que de la continuité. En toute sérénité. En face, donc, Marina Ferrari (Aix Naturellement), soutenue par le parti présidentiel, a longtemps laissé planer le doute sur ses ambitions personnelles. Soyons honnêtes, nous la voyions alors partir en 2026 plutôt que maintenant… Son obsession: se faire un prénom, son patronyme étant déjà inscrit au panthéon aixois. Elle en a les moyens et les soutiens. Et puis André Gimenez (Aix Autrement), candidat sans nuance, au sens propre du terme. « J’ai écrit au préfet pour lui dire que je refusais toute nuance politique : aucun de mes colistiers n’appartient à un parti, aucun, à part moi, n’occupe de fonction élective et personne n’a un métier impliquant un parti ou un autre ». Pari gagné, le préfet a abdiqué, il sera l’exception qui confirme la règle, le candidat d’Aix Autrement sera estampillé « divers » et vise à bousculer des habitudes bien ancrées. Enfin, Dominique Fié (l’Alternative, Aix-les-Bains écologique et solidaire), « l’alternative » , le candidat des gauches et des Verts, le garant d’une méthode de gouvernance nouvelle, se pose en éternel opposant et chantre de la gratuité (cantine, transports en commun…).
Lors du dernier débat entre candidats, sur RCF Savoie, mercredi 11 mars, la nervosité se fit sentir, par instants, témoin d’une lassitude largement compréhensible. Certains seront sans doute soulagés, au soir du 15, toutes et tous voient, en tout cas, cette échéance d’un œil empli d’espoir. En 2014, Dominique Dord avait raflé la mise dès le premier soir, d’aucun présagent un destin (très) sensiblement différent à son successeur. Pour un deuxième tour à quatre, le 22 mars ? En tant qu’observateurs, une prédiction que nous validerions volontiers… pour prolonger le suspens et le plaisir.
Chambéry
Sept à la maison. La cité ducale attire les convoitises puisqu’en 2014, seuls quatre avaient répondu présent, dont trois toujours en lice cette année. Michel Dantin, titre en jeu, Laurent Ripart, qui remet le couvert malgré sa déconvenue d’il y a six ans, et Guy Fajeau, aujourd’hui inscrit sur la liste de Sarah Hamoudi-Wilkowsky étaient déjà là. Se sont ajoutés quelques nouveaux, en 2020. Parmi lesquels Christian Saint-André (Chambéry ensemble), le candidat soutenu par En Marche (et dernièrement Gérald Darmanin), adoubé par Patrick Mignola, premier de cordée, en septembre dernier, et peut-être appelé à devenir la curiosité de cette élection. Non qu’il en soit à son premier tour de piste** mais il veut être celui qui créera « l’union sacrée dans l’entre deux tours ». Pas simple parce qu’en face, reconnaissons-le, figurent deux bulldozers, deux hommes rompus aux échéances électorales.
Michel Dantin (Dantin 2020), le maire sortant, vient d’en terminer avec une campagne tout-terrain et ses 13 réunions publiques en un mois. Entouré de ses fidèles lieutenants (Alexandra Turnar, Xavier Dullin, Aloïs Chassot…), mêlant rigoureux travail d’occupation et agressivité non feinte (le programme de Thierry Repentin détricoté sur les réseaux sociaux), le maire a parfaitement répondu à celles et ceux qui ont vu dans ses soucis oculaires de l’automne un point faible à exploiter. Et Thierry Repentin (Chambéry en commun), l’attendu et le patient, étrangement discret durant plusieurs mois avant de revenir sur la scène médiatique début février. « Le temps de l’audit » , rapportait-il. Il se sera adjoint les services d’élus chevronnés, de Colette Bonfils à Jean-Benoît Cerino en passant par Christelle Favetta-Sieyès pour casser une image parisienne qui lui colle à la peau… On attend beaucoup de ce duel de poids lourds. Mais qu’espérer des quatre listes restantes ?
Elles symbolisent le morcellement de la gauche. Des gauches. Laurent Ripart (Chambé poing levé) revient après six années passées à occuper la scène sociale, il dénonce les « mensonges » , « les projets inutiles » et se plaît à participer au chaos qui préfigure le changement. Du NPA dans le texte.
Les scissions n’ont pas entamé les motivations d’Aurélie Le Meur (Chambé citoyenne) et de Sarah Hamoudi-Wilkowsky (Chambéry sociale et écologiste), jadis presque engagées ensemble mais que certains désaccords auront finalement séparé, courant février. Ces forces peuvent-elles s’unir de nouveau et faire basculer une campagne dont elles sont les outsiders ? Ce n’est pas dans l’air du temps. Enfin, Marie Ducruet (Lutte ouvrière) espère faire entrer une personne au conseil « afin de défendre la voix des travailleurs » , plaçant patrons et grands élus au cœur de sa cible. Beaucoup de monde, donc, beaucoup d’espoirs de part et d’autre.
« Nous partîmes à sept… » mais combien nous verrons-nous en arrivant au port, le 22 mars prochain ? Une histoire dont Pierre Corneille n’a pas écrit la fin.
* Renaud Beretti avait été aperçu (et photographié) avec l’ex-candidat Christian Derenty, soutenu alors par le Rassemblement national et Debout la France. Le soutien du RN n’avait pas manqué d’inquiéter l’ancien employé municipal qui a fini par jeter l’éponge, au grand dam du parti de Marine Le Pen. Or, sur la liste du maire aixois figure la femme de Christian Derenty. Le raccourci a donc été vite fait, notamment par le parti socialiste savoyard, qui s’est fendu, en début de semaine, d’un communiqué foudroyant. Par ailleurs, Patrick Mignola lui-même, avait condamné ce prétendu rapprochement. De quoi faire sortir Renaud Beretti de ses gonds et l’inciter à renvoyer le député dans les cordes.
** Christian Saint-André s’était présenté, pour l’UDF, aux élections cantonales de 2004 dans le canton de Chambéry Sud Ouest. Qualifié pour le second tour face à Colette Bonfils (29,80%), il est défait (43,08%). En 2017, sous une bannière divers gauche, aux élections sénatoriales de Savoie, il avait obtenu 3,82% des suffrages au premier tour, insuffisant pour accéder au suivant.
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