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Elections européennes : en Savoie, la droite s’effondre, En Marche résiste à la pression du Rassemblement national, les écolos percent

Par Jérôme Bois • Publié le 27/05/19

Le nouveau bipartisme est arrivé, la Savoie a respecté cette tendance lourde depuis deux ans. En plaçant Renaissance, le mouvement de Nathalie Loiseau, en tête avec 22,31%, d’un cheveu devant le Rassemblement national, porté par 21,14% des voix, les Savoyards ont confirmé 2017. Le vrai cataclysme est plutôt survenu à droite, sur des terres qui lui étaient hautement favorables.

9,90% des voix savoyardes se sont portées vers la droite qui s’en est pris une belle, de droite. Parce que la défaite, à un tel niveau, reste difficilement digérable en plus d’être historiquement bas. Du reste, en Préfecture, dimanche 26 mai, à l’heure où les résultats tardaient encore à nous parvenir, aucune tête majeure du parti n’était visible ; assez tard, le maire de Chambéry, Michel Dantin, se sera hasardé à un détour sitôt les festivités avec les handballeurs consommées. Un détour express, les résultats chambériens ayant été compilés assez tard. Voir François-Xavier Bellamy atteindre péniblement les 8,85% dans la cité des ducs est assez alarmant pour la majorité départementale. L’emprise née en 2014 – avec Chambéry comme principale prise de guerre – s’est desserrée au fil des ans, Aix-les-Bains, pourtant solide bastion, a vu En Marche l’emporter assez facilement (26,75%) reléguant la droite à 15 points.

Un RN fort (presque) partout

Contrairement au national, où le RN a sensiblement devancé la majorité présidentielle, en Savoie, après l’arrivée des résultats des bassins urbains, Loiseau l’a emporté au finish, confirmant que le Rassemblement national est fort dans les zones rurales et moins denses (Maurienne, Tarentaise, Combe de Savoie, Albanais…) mais peine à exister par ailleurs, Albertville faisant exception (23,71%). A Saint-Jean-de-Maurienne, il culmine même à 27,43%.
On se félicitait néanmoins de ces scores, Brice Bernard et Marie Dauchy en tête, en attendant de savoir si cette dernière pourrait être la seule euro-députée du département (elle était 24e sur la liste RN). Le délégué départemental se réjouissait de voir le vote RN « percer dans les villes ». Si la thèse de la sanction était avancée pour expliquer ce mouvement de fond, Brice Bernard convenait que le parti « est désormais ancré en Savoie ». Grâce à la montée des votes populistes en Europe, il promet « pouvoir (s)’allier et tenter de changer les fondements de l’Union Européenne ». Pas sûr seulement qu’il s’agisse d’un euroscepticisme assumé. Il était, du reste, assez peu question d’Europe, dimanche soir, après la parution du résultat final chez les Bardella et Le Pen…

En Marche devant, grâce aux agglos

Patrick Mignola a attendu tant qu’il a pu. « Pas de commentaires avant les résultats finaux » , soufflait-il à chaque demande d’interview. Las, au bout de deux bonnes heures d’attente, alors que Nathalie Loiseau recollait peu à peu avant de doubler Jordan Bardella sur la fin, le député de la majorité quitta les lieux, sans mot dire. A Marina Ferrari, première adjointe à Aix, candidate sur la liste LREM, le soin de s’exprimer, donc, se voulant « humble » car ce sont « les agglomérations qui ont fait bouger » des votes jusqu’ici défavorables au parti présidentiel. Elle se réjouissait cependant de voir les gens « se mobiliser pour dire » oui « à l’Europe, dans un contexte particulier avec la montée des populismes. La majorité ne s’est pas effondrée comme on l’annonçait ». Quant au bipartisme droite – gauche, il est mort au profit « d’un bipartisme de valeurs, progressistes contre populistes, c’est aussi le signal que la vie politique change ».

Vers une alliance des gauches ?

Autre temps fort de cette élection, la percée du vote écologiste, totalement passé sous les radars des sondeurs de tout poil, « une aspiration réelle des Français » , pour Marina Ferrari, la possibilité d’une « alliance social-démocrate » , pour Jean-Benoît Cerino, dont le parti, porté par Raphaël Glücksmann, a tout juste passé la ligne de flottaison (5,89%) malgré « une vraie belle campagne ». Il sera alors intéressant de voir si un bloc peut émerger entre les traditionnelles forces de gauche. Imaginons un attelage PCF (2,35%), Liste citoyenne de Benoït Hamon (2,68%), EELV (16,33%) et Envie d’Europe (PS, 5,89%), vous obtenez un total de 27,25% en Savoie… Autant dire que les tractations vont s’intensifier, dans les semaines à venir, dans la perspective des Municipales 2020. « C’est difficile d’extrapoler des résultats locaux à partir d’élections européennes mais c’est un bon thermomètre » , souriait Jean-Benoît Cerino.

Des figures en berne

« Toutes les listes ont mangé » , sifflait Vincent Thomazo. Responsable Debout la France en Savoie, il peinait à voir du positif dans un score somme toute honorable, supérieur aux attentes (3,79%). «Le match LREM – RN était programmé, c’est le nouveau bipartisme que Macron a enclenché ». Il espérait 5%. Que dire de la France Insoumise, pourvue d’un faible 5,47% ? De l’écroulement de la droite ? De la faiblesse du PS ? Peut-être que finalement, les Savoyards, comme les Français, ont fini par rejeter les figures politiques clivantes que sont Jean-Luc Mélenchon, Laurent Wauquiez ou Nicolas Dupont-Aignan. Et peut-être que la gauche souffre, elle, de l’absence d’une tête de gondole…

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