La Motte-Servolex dit « stop » au tabac dans ses parcs

Les beaux jours de retour, les vacances scolaires qui approchent, la Savoie va se parer de ses plus beaux atours estivaux et ouvrir grand ses parcs, plages et lieux de vie en plein air. Vers le mois de juillet pourtant, quelque chose, imperceptible de prime abord, va changer : une nouvelle signalétique, dans les parcs municipaux de La Motte-Servolex, va faire son apparition : c’est la première en Savoie, l’arrivée des espaces sans tabac.
« De la prévention » , c’est de cette manière que l’opération est présentée, à la fois par le maire de La Motte-Servolex et la Ligue contre le Cancer, à l’origine de cette initiative. Mais quand on creuse, on réalise que depuis 2015, un décret est entré en vigueur, visant à interdire la consommation de tout produit de tabac, dans les aires collectives de jeux… Objectif du décret, entré en vigueur le 30 juin 2015, lutter contre le tabagisme passif, des enfants et des publics sensibles, tels que les seniors. Il n’est pour autant question que de pédagogie et de prévention, donc, pour l’heure « Pas question de mettre un policier municipal derrière chaque fumeur dans les parcs » précise Luc Berthoud, maire de la commune savoyarde. 

Une signalétique spécifique à l’entrée de deux parcs municipaux

« Les panneaux sont commandés et ne devraient plus tarder à arriver » souligne Nadia Decaestecker, chargée de prévention à la Ligue contre le Cancer de Chambéry. C’est son antenne qui a choisi la commune de La Motte comme ville pilote, la première en Savoie, pour porter ce projet mis en place par la ligue nationale depuis 2016. « Nous poursuivons plusieurs objectifs », poursuit-elle, « le premier c’est de dénormaliser le fait de fumer dans les parcs, moins le geste sera à la vue des plus jeunes et moins ils seront tentés de s’y mettre. Le deuxième, bien sûr, c’est de réduire la pollution induite par le tabac, que ce soit la qualité de l’air ou même la présence de mégots sur le sol. Et le troisième, parmi tant d’autres, c’est de faire baisser le tabagisme passif, tant chez les enfants que chez les autres usagers des parcs. » Le 28 mai dernier, les derniers chiffres du tabagisme ont été publiés par Santé Publique France qui démontre un recul du nombre de fumeurs quotidiens au niveau national de 1,6 millions en 2017, soit une baisse de 2,5 points. « Une baisse historique » précise le bulletin de santé publique. Un effet de la politique de prévention? « C’est un combat de tous les jours », observe Nadia Decaestecker, tabacologue de formation « l’augmentation du prix du paquet, la mise en place du paquet neutre, à l’initiative de La Ligue contre le Cancer, cette campagne pour les espaces sans tabac, on doit sans cesse aller plus loin. » Et ce d’autant qu’il y a un certain paradoxe : pour 2018, l’augmentation d’un euro par paquet de cigarettes a surtout permis à l’Etat d’encaisser 13 milliards d’euros de taxes sur le tabac, hors TVA. Un chiffre qui donnerait presque le tournis. Malgré tout, le programme espace sans tabac ne perd pas de vue son objectif pédagogique: réduire le tabagisme, passif et actif, sur des zones occupées par des publics sensibles. Pour mémoire, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, les fumeurs quotidiens étaient 1 500 000 en 2017, soit 26,3 % de la population. Bien que ce chiffre soit en baisse depuis les années 2000, on dénombre toutefois sur la période 2013-2015, 9973 décès liés au tabagisme. Une initiative plutôt bienvenue, donc.

Préserver la santé de tous, enfants, familles et seniors, à La Motte

Pour Luc Berthoud, préserver l’environnement est un véritable engagement . La zone du Parc Henri-Dunand et de la Place Millon, ainsi que celle du parcours santé nature, seront toutes deux estampillées « espace sans tabac ». C’est cet engagement, ainsi que la participation de la commune au Relais pour la vie, une course qui permet de collecter des fonds pour la recherche, l’aide aux malades et la prévention au sein de La Ligue qui a amené le comité savoyard à choisir La Motte-Servolex comme ville pilote. Il n’est pas impossible qu’un décret municipal vienne entériner ce projet, en utilisant le label pour marquer les esprits des fumeurs, et les inciter à se faire accompagner. Mais pour le maire, cela va encore plus loin: « Le fait est qu’il faut rappeler que le tabac n’est pas neutre, tout comme l’alcool il a des conséquences, sur soi et aussi sur les autres. La place Millon est un lieu intergénérationnel, avec des écoles, le CCAS, une crèche… il y a des papys et mamies, qui viennent avec leurs petits-enfants, et d’autres seniors qui vont venir utiliser les agrès du parcours santé, ces publics plus fragiles, il faut aussi les préserver. » 
L’idée n’est pas à la répression et de facto, il n’est pas question de prendre un arrêté municipal, qui doit être mesuré dans l’espace et dans le temps. Pour le moment, le partenariat entre la commune de La Motte Servolex et la Ligue est plutôt dans un but de mise en éclairage du danger réel du tabac, pour tous, et de rappel des bonnes pratiques, que Luc Berthoud a souhaité mettre en place dans sa commune, avec les travaux engagés pour la rénovation et la mise en place d’un espace plus large dédié aux piétons, qui se veut à la fois plus apaisé et plus serein. Cette nouvelle signalétique, soit douze panneaux conçus par la ville et financés par la Ligue, à hauteur de 800 euros TTC, devra donc bientôt être mise en place à des endroits stratégiques. « J’aimerais qu’avant l’été de nouvelles personnes arrêtent de fumer et que d’autres ne commencent pas », glisse l’édile, « cette initiative est un cycle vertueux, il fallait une volonté de faire avancer les choses, des gens experts prêts à avancer et des partenaires qui puissent agir pour le plus grand nombre. » Donner l’exemple pour que d’autres s’y mettent ? Luc Berthoud n’est pas contre, mais sous l’égide de la Ligue, sans verser dans le discours culpabilisant ou moralisateur envers ses collègues: « Pour moi, ce n’est pas un phénomène de mode, c’est du pragmatisme, ça mérite qu’on s’engage, parce qu’on a un bon partenaire en face, qu’on partage des valeurs communes. En parler autour de moi, oui, moi j’engage ma responsabilité sur ma commune, je pense que je dois le faire, mais s’il faut venir en appui auprès de mes collègues, alors ma réponse est oui. » 

Du côté de la Ligue, on souhaite également que d’autres communes suivent La Motte-Servolex « Nous espérons en fédérer le plus possible sur toute la Savoie, nous n’avons pas encore de pistes pour d’autres mairies, mais il peut y avoir un effet boule de neige » estime Nadia Decaestecker. De mémoire, sur la plage du Rowing d’Aix-les-Bains au cours du World Clean Up Day de septembre 2018, 10 000 mégots avaient été récoltés. Pourquoi ne pas y réfléchir ? D’autant que pour cet été, une carte des plages « sans tabac » a été publiée par La Ligue au niveau national On peut toujours essayer… pour voir?