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Parking Ravet : mais jusqu’où ira la contestation ?

Par Jérôme Bois • Publié le 26/06/19

Mardi 25 juin au petit matin, deux individus sont parvenus à grimper au sommet de la grue du chantier du parking Ravet : objet du délit, envoyer un message fort à la municipalité. Ils ne veulent pas du parking et réclame d’être consultés. Énième épisode d’un étrange feuilleton, qui a tendance à virer à la lutte idéologique sur ce à quoi doit ressembler la ville dans un avenir proche.

« Laisse béton », chantait Renaud, en 1978, un succès dont l’intitulé est entré dans le langage courant. Peut-être inspiré par le chanteur, ces deux cyclistes* ont déployé une banderole avec le même intitulé inscrit dessus, depuis le sommet de la grue du chantier du parking Ravet. Un acte fort, « beau » , pour certains observateurs ou intéressés, dangereux et inconscient pour d’autres. Dès 7h du matin, ce 25 juin, le directeur de cabinet de Michel Dantin était réveillé par les manifestants, réclamant de tout leur poids un entretien avec le maire, qu’ils obtiendront, du reste. « Ce sont toujours les mêmes » , s’indignait Michel Dantin, « qui utilisent les mêmes moyens. S’ils contestent le parking, qu’ils fassent un référé au tribunal ». Le maire peut-il néanmoins plier face à cette opposition ? « Certainement pas, la majorité des Chambériens veulent ce parking, l’équipe municipale précédente en prévoyait déjà un à cet endroit. Ce qui s’est passé ce matin est de l’opposition systématique, je distingue ces gens de ceux qui vivent dans les immeubles en face du chantier, qui peuvent effectivement avoir des choses à dire ». Des propos qui sous-tendent que cette opposition est politisée, ce que réfutent les membres des collectifs Ravet et du faubourg Nezin. Pour Jean-Marie Lacambre, membre du collectif Ravet, farouchement opposé au parking (et 5e sur la liste Chambéry cap à gauche, en 2014), ce combat « n’est pas dogmatique, c’est la révélation d’une politique urbaine qui va à l’encontre de ce que les villes modernes font ».

« Il s’est trompé d’époque, on est resté dans les années 70 »

Il affirme même « assumer ce type d’actions ». « Nous sommes le noyau dur de la contestation » , soutient, quant à lui, Guy Fajeau, élu de la minorité Chambéry Cap à Gauche « cette contestation qui concerne autant Ravet que la cour d’école de Joppet, le réseau de bus ou le plan de circulation. Ravet cristallise une forme d’incompréhension sur l’absence de concertation. Michel Dantin dit que tout le monde en veut, pourquoi ne pas le demander aux Chambériens, alors ? » Pour beaucoup, ce parking symbolise la vision très années 70 de cette majorité : « 500 voitures en plein centre-ville, parce que nous sommes en centre-ville, à cet endroit, un parking de cette grandeur, ça va à l’encontre de ce que doit faire une ville bien gérée » , renchérit Marielle Thievenaz, membre du collectif du faubourg Nezin. « Il s’entête, il s’est trompé d’époque, en nous présentant un projet digne des années 70 ».

Cet entêtement est aussi pointé du doigt par Jean-Benoît Cerino : « On a effectivement l’impression d’un empressement et d’un entêtement. Depuis le conseil municipal d’avril (lire notre article du 24 mai), le maire dit à Q Park » Dépêchez-vous de construire le parking, nous prenons en charge tous les risques «. Il y avait des alternatives, ce projet est mené à l’envers depuis le début ». Ce qui apparaît comme dogmatique, pour l’élu socialiste, c’est « le chiffre de 500 places. Au final, c’est un garage, pas un geste architectural ». Partisan d’un parking, il en souhaitait un souterrain « avec du logement au-dessus afin de valoriser la charge foncière ».

Une entrevue pour rien ?

Sur la page Facebook du Petit Reporter, un sondage montre que 53% de votants (à l’heure où nous écrivions ces lignes) affirment ne pas comprendre une telle opposition à ce projet, le rapport de force semble donc bien exister. Plus curieux, cependant, « j’ai été surpris de voir qu’une grande partie des Chambériens ne connaissent pas les enjeux de ce chantier » , reconnaissait Guy Fajeau, après deux samedis passés sur le marché à consulter les habitants. Ce qui devait être, à l’origine, une concertation autour de quatre propositions – un parking en silo, un parking souterrain avec aménagements paysagers en surface, parking souterrain avec logements au-dessus, ou espace vert – s’est transformé en simple pour ou contre. « Parce que la mairie a précipité les travaux » , souligne Guy Fajeau. Un maire cependant inflexible : « Le parking ne peut s’enterrer compte tenu de la faible profondeur du secteur ».

En attendant l’entrevue du 27 juin, à 10h, entre une poignée de mécontents et le maire, entretien qui ne devrait pas aboutir à grand chose, selon ce dernier, on rivalise désormais d’imagination pour faire entendre une colère de principe, sur la vision urbanistique de la ville, et de forme, sur le projet en tant que tel. Il n’en demeure pas moins qu’une plainte a été déposée contre les activistes d' «Extinction rébellion ». Le geste de mardi matin, « que j’ai trouvé très beau » (Marielle Thievenaz), « qui n’est pas un simple délire » (Guy Fajeau), « non violente » (J-B Cerino) a eu le mérite de remettre – une fois encore – cet épineux projet sur la table.

A ceci près que ça dure maintenant depuis trois ans… et qu’on tend vers l’escalade, c’est le cas de le dire.

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