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Chambéry se lance dans la restauration du grand salon au théâtre Charles-Dullin et y invite les Chambériens

Par Laura Campisano • Publié le 01/10/19

Au cœur de la ville de Chambéry, trône le théâtre Charles Dullin, inauguré en 1866 en lieu et place du théâtre à l’italienne, commandé par le Comte de Boigne en 1820, après sa destruction dans un incendie. Le grand salon, salle de bal à l’origine puis transformée dans les années 70 en salle de concert, a très longtemps été fermé au public. Poussée par les associations, l’Académie de Savoie et la Compagnie de Savoie, la municipalité a décidé de procéder à la rénovation de ce lieu du patrimoine savoyard.

Pendant plusieurs décennies, le grand salon a été fermé au public, à l’abandon. Crédit Direction communication mutualisée Chambéry
Crédit JC DAVOINE
Impatient, Jean-Olivier Viout est aussi enthousiaste que lorsqu’il a participé avec l’Académie de Savoie qu’il préside, à l’ouverture en 2017, d’une souscription pour restaurer le rideau de scène peint par Luigi Vacca au début du XIXe siècle. « Je suis impatient et je respirerai mieux le jour où la première ligne d’échafaudage sera montée devant le théâtre », plaisante-t-il, « si ça pouvait être au début du premier semestre, ce serait encore mieux ! Il est vraiment temps qu’on s’occupe du patrimoine de Chambéry, parce qu’ensuite, il sera trop tard ». Compréhensible quand on découvre ce « Grand Salon », dont les décors originels sont recouverts d’une épaisse poussière, tant les transformations l’ont caché au public tel qu’il a été construit au départ.  Une salle de bal de plus de 200 mètres carrés, des plafonds hauts à plus de 10 mètres, endormie depuis plusieurs dizaines d’années. Endormie et saccagée, ce qui n’est pas sans agacer et peiner Jean-Claude Davoine. L’élu, chambérien d’origine, a connu le théâtre avant les années 70 et la transformation de cette salle majestueuse en salle de concert, non sans y ravager les murs, le plafond et les décors. 
Avec de l’eau déminéralisée, les décors d’origine révélés Crédit JC DAVOINE
Balcons fermés, décors brisés, murs et plafond perforés, l’homme ne cache pas sa tristesse : « Je regarde la salle telle qu’elle est aujourd’hui avec beaucoup de regrets », explique-t-il. « En 2014, on a commencé à faire des vérifications avec l’Académie de Savoie, et les personnes qui connaissent parfaitement le théâtre, on s’est rendu compte que les menaces d’effondrement du plafond étaient fausses, les personnes qui ont fait ici des modifications n’ont pas pris soin de la pièce, mais il n’est pas trop tard. » Jean-Olivier Viout parle de « chirurgie esthétique » , fustige ce qui a été fait dans les années 70, « qu’on ne referait certainement pas aujourd’hui » se félicitant du départ des travaux et espérant que les Chambériens et les Savoyards seront sensibles à la sauvegarde de leur patrimoine. « C’est un dossier qui doit réunir les Chambériens, rassembler toutes les forces, non pas pour en faire un musée, non pas par orgueil, ce salon prestigieux sera un lieu de réception, de colloques, d’expositions, et d’événements d’un niveau qui justifie qu’on s’en empare. Ce n’est pas simplement pour se faire plaisir entre quelques esthètes. C’est un lieu dont une ville comme Chambéry a besoin. »

Ouverture d’une souscription pour la restauration du Grand Salon par l’Académie de Savoie

Plafond du grand salon -Crédit Direction de la communication mutualisée
L’objectif de la municipalité est plutôt prévu pour 2021, à en juger par le calendrier dévoilé par Jean-Claude Davoine. La maîtrise d’oeuvre recrutée pour l’été 2020, les travaux seront réalisés sans doute dans le second semestre jusqu’en début d’année suivante. La salle n’étant pas ouverte au public depuis plusieurs années, cette rénovation n’empiétera pas sur les activités du théâtre. Cette restauration a toutefois un coût, se situant approximativement entre 1,5 et 2 millions d’euros, tandis que la restauration de l’ensemble du théâtre serait de l’ordre de 5 millions d’euros, en ce compris la toiture et les sièges de la grande salle. C’est bien moins que la réfection de l’espace Malraux, scène nationale, 12 Millions d’euros, soit approximativement le coût de sa construction en 1988…  Pour faire face à l’engagement de telles sommes, la commune de Chambéry ne sera pas seule. L’Académie de Savoie a décidé de prendre les choses en main en lançant une souscription, sans minimum ni maximum de montant, ouverte aux habitants, particuliers et entrepreneurs, devenant ainsi mécènes de la restauration de leur propre patrimoine. 
Selon les résultats d’un sondage, publié sur notre page Facebook, les votants sont partagés, bien qu’ils aient répondu favorablement à 64% à la question de leur participation à cette souscription, contre 36% de votes négatifs. Difficile de dire s’ils participeront massivement ou non, quelques jours après l’ouverture des dons. En 2017, la même souscription publique avait permis de restaurer le rideau de scène, dont le coût total était de 90 000 euros. L’Académie se veut donc optimiste. D’autant qu’elle compte mettre à disposition de la ville de Chambéry la somme de 105 252 euros. « Chaque euro qui sera donné pour le grand salon ira au grand salon » a précisé Jean-Olivier Viout. La Compagnie de Savoie et de l’Arc Alpin a également souhaité participer aux frais, en organisant un « récital pour un patrimoine », le 1er février 2020 au théâtre Charles-Dullin, dont l’entrée de 15 euros, sera reversé au profit de cette rénovation. Enfin, la fondation du patrimoine, représentée par Christian Saint-André, a monté un club d’entrepreneurs pour aider à la souscription.

Des réceptions, des colloques et… des mariages

Vue du haut du grand salon -Crédit Direction communication mutualisée Chambéry

Pour Alexandra Turnar, il ne fait aucun doute que le grand salon, une fois restauré, sera idéal pour y célébrer des mariages à Chambéry. Ne disposant pas de salle des mariages à l’hôtel de ville, lesquels sont très souvent célébrés au château de Boigne, qui nécessite lui-même une rénovation importante, l’adjointe à la culture n’exclut pas que le grand salon du théâtre puisse accueillir les échanges de consentements. « Le théâtre Charles-Dullin est un symbole de notre histoire et de notre patrimoine, il a un fort attrait patrimonial, auquel les Chambériens sont très attachés et nous souhaitons qu’il soit accessible au plus grand nombre », a-t-elle souligné,  « la salle a de très belles dimensions, avec un cachet particulier, elle sera sans doute très convoitée. Il y a un besoin de salles en ville, et rénover cet espace permet en effet de penser à la célébration de mariages. » Sur un plan culturel, le lieu servira également et avant tout aux compagnies de théâtre, soit pour les répétitions, soit pour des représentations, aux artistes pour des expositions, des concerts, des conférences comme des réceptions afin d’y accueillir tous les publics. Des travaux d’envergure s’annoncent donc à partir de l’été 2020, projet ambitieux pour la capitale de la Savoie, qui souhaite visiblement réconcilier ses habitants et leur histoire.

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