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Chambéry : Malraux se prépare à la « chaleur des grands froids »

Par Laura Campisano • Publié le 04/02/20

Pour la 5e édition, Malraux se prépare à faire souffler sur Chambéry la « chaleur des grands froids », du nom de son festival d’hiver. Au programme, des projets impertinents, de la glisse, et de la désobéissance, en plus d’une contre-soirée de Saint-Valentin avec Patrick Swayze… C’est sûr, du 11 au 24 février, la culture va vous en faire voir de toutes les couleurs. A vos bonnets !

Avez-vous déjà vu un patineur tracer un cercle parfait dans l’obscurité ? Vous êtes-vous déjà entraîné au célèbre porté de Dirty Dancing un soir de Saint-Valentin ? Avez-vous déjà assisté à une pièce de théâtre en 4 épisodes dans des bars ? C’est entre autres choses ce que vous propose de faire le festival que l’espace Malraux à Chambéry, entre le 11 et le 24 février. Une programmation éclectique avec un fil rouge néanmoins: l’univers montagnard, la glace, la glisse, l’environnement et la manière qu’ont les hommes de se rassembler, de manière ludique. Prometteur.

Du théâtre, sur scène et ailleurs

Surprenant, le spectacle désarçonne les spectateurs, et pourtant à Lyon, dans les bars de la Croix-Rousse où ils l’ont joué pendant trois semaines en 2018, ils ont fait un carton plein. Quatre comédiens, trois par plateau, un musicien en live, Laurent Bichat, pour un spectacle « sportif » et interactif avec le public. Cette idée leur est venue alors qu’eux-mêmes comédiens, sur scène, s’ennuyaient au cours d’une pièce qu’ils jouaient. « C’est là que nous avons réalisé que nous ne voulions pas faire ça, et que nous avions une grosse envie de faire un théâtre différent. »  Leur objectif étant d’être vus par le plus de spectateurs possible, les deux amis répètent dans les bars où ils donnent le spectacle, toujours au milieu des clients et des équipes. « Le spectacle intégral dure 4 heures, c’est très physique pour les comédiens, » expliquent-ils, « les acteurs sont hyper présents (deux femmes, dont l’une incarne deux personnages aux antipodes et une jeune comédienne de 78 ans, ainsi que deux hommes, NDLR) mais ça l’est aussi pour le public qui ne regarde pas droit devant lui, comme au théâtre en général, mais un peu partout à la fois. »  Pas le temps de s’endormir, donc.
Et en matière de théâtre, Malraux va encore plus loin en emmenant les spectateurs à Genève au théâtre Saint-Gervais pour les faire assister à un « vaudeville contemporain » autour des absurdités liées aux nouveaux modes de consommation des « bourgeois bohèmes » dont le titre est très évocateur, Je vous ai préparé un petit truc bio au four… Quant aux romantiques, ils pourront se délecter avec une pièce sur mesure l’Amour est très surestimé. 

De la danse, à contretemps et en contre-soirée 

Côté danse, c’est l’insubordination : une expérience mise en scène par le chorégraphe Philippe Vuillermet, qui fait évoluer six danseurs sur une musique électronique de DJ Chloé, inspirée des textes du philosophe Frédéric Gros, sur la désobéissance. « Nous l’avons ressentie, cette désobéissance, à la fois entre les danseurs, entre les danseurs et moi, entre le texte et l’interprétation, c’était parfois très intense », confie le metteur en scène,  « c’est un projet qui a démarré en octobre 2018, qui va être joué pour la première fois à Chambéry et qui pour le moment n’a pas encore d’autres dates de diffusion, malgré tout le travail et l’énergie que cela a représenté. » 
L’homme, qui avoue entretenir un lien très fort avec la musique électronique, reconnaît également que cette préparation, cette « partition » écrite avec les danseurs, a été une sorte de confrontation, de sortie de la zone de confort de chacun, pour se questionner sur ce qu’est la désobéissance, ce qu’elle représente aujourd’hui, et comment l’exprimer au travers de la danse. « C’est ce que nous avons voulu démontrer par le rythme, nous avons envie de le défendre, et de nous demander quelle place nous occupons dans le monde, si nous voulons la valider ou non. On ne sort pas indemne de ce spectacle, il ne raconte pas une histoire », poursuit-il, « c’est plus subtil. J’ai hâte de voir son effet sur le public. »
Plus ludique, il vous sera proposé une projection du film culte des années 80, Dirty Dancing, mais, soirée de Saint Valentin oblige, elle sera agrémentée d’ateliers « portés », et les aficionados de Patrick Swayze voient alors parfaitement de quoi il s’agit… De quoi passer une soirée mémorable, et se retrouver ensuite sur la piste endiablée.
Pour ce qui est de la danse, les footballeuses ne seront pas sur la touche, puisqu’elles démontent sur scène les stéréotypes liés à la pratique de leur sport, ce que cela signifie pour elles et leur rapport à leur féminité aussi. « Elles ont un fort engagement du corps, détaille Marie-Pia Bureau, elles témoignent également et ont été suivies et filmées par la cinéaste Sophie Laly, dans » tape dans la balle «, ce qui relie l’ensemble à la conférence sur le foot féminin. »  Du beau jeu, donc. Et tant qu’à rester dans le ballon rond, impossible de passer à côté du tournoi international de baby-foot mis en place par Malraux avec les étudiants de l’INSEEC, qui visiblement a donné lieu à la mise en place d’une équipe au sein de la scène nationale..

De la glace, de la hauteur et des sommets

L’un des clous du festival sera sans doute la partie consacrée à la montagne, à l’univers de la glace et principalement du patinage, autrement appelé compulsory figures,  soit « figures imposées », nom donné à la discipline avant que les caméras du petit écran s’en mêlent. Une patinoire sombre sera installée place de la brigade de Savoie, afin de permettre au patineur et danseur canadien Stephen Thompson de réaliser sur la glace des figures imposées, telles que le cercle parfait. « C’est un moment exceptionnel », s’est enthousiasmée Marie-Pia Bureau, « avec l’installation d’une patinoire de dix mètres sur dix, entourée de gradins, ce qui a déjà été réalisé dans la grande halle de la Villette à Paris. Xavier Veilhan, l’artiste plasticien a l’origine de ce projet s’intéresse de près à la glisse mais a aussi une fascination pour cette discipline, et participera à la performance sur la glace, c’est très graphique, c’est un vrai spectacle. » Patinoire sombre sur la glace, mais éclairée, qui avec la musique et les figures graphiques « plonge le spectateur dans un état méditatique intéressant »  selon la directrice de Malraux. Pour préparer le spectacle, une résidence a été organisée cet été à la patinoire de Chambéry. 

Autour de la montagne, du cinéma pour les petits et les plus grands, un audio-guide en accès libre sur les mémoires vivantes du Mont Cenis, un ciné-brunch et une conférence par le Préfet de la Savoie quant aux particularités de ses fonctions dans les zones de montagne. 
S’il n’est pas possible de tout citer, tant la programmation du festival est foisonnante, force est de constater que l’accent a été mis sur le ludique, la fête, mais aussi la réflexion de l’homme sur son environnement et son rapport au monde. Un festival qui porte particulièrement bien son nom, puisque de nombreux temps « chauds » viendront ponctuer les spectacles conçus dans une cité des Ducs où les hivers cléments sont de vraies questions que se pose le public chambérien. 
La programmation entière est à retrouver ici et un Pass Chaleur est prévu avec différents tarifs, allant de 20 à 40 euros pour l’ensemble du festival.

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