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Malgré l’absence de risques de transmission du virus aux animaux, « on s’attend à trouver des chiens attachés à notre portail chaque matin »

Par Jérôme Bois • Publié le 23/03/20

L’une des conséquences, plus ou moins attendue, de ce rigoureux confinement en cours depuis le mardi 17 mars, est le nombre croissant d’abandons d’animaux. Si, de part et d’autre de l’Hexagone, il a largement été question de « situation catastrophe », il s’agit plus généralement du risque encouru que d’une réalité. Les fake news ont ainsi amplifié un phénomène qui n’est, pour l’heure, pas avéré sur les bassins aixois et chambérien.
Chaque année, les abandons de chiens et chats se chiffrent en milliers : la France serait même la championne du monde en ce domaine, peu enviable. L’été, ce sont près de 60 000 animaux de compagnie qui sont ainsi abandonnés, le décompte atteignant 100 000 par an d’après l’association 30 millions d’amis*. Un titre dont on souhaiterait tous se voir déchu.

La transmission de l’être humain vers l’animal « peu probable »

L’arrivée du coronavirus sur notre territoire a charrié son lot de désinformation, sur une possible transmission du virus aux animaux, les scientifiques s’accordant à  dire qu’il est biologiquement impossible de transmettre le Covid-19 à son animal. Un rapport de l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) paru le 11 mars a conclu qu’à la lumière des connaissances scientifiques disponibles, « il n’existe aucune preuve que les animaux de compagnie et d’élevage jouent un rôle dans la propagation du virus SARS-CoV-2 à l’origine de la maladie Covid-19 » , ajoutant que la transmission « de l’être humain vers une autre espèce animale semble actuellement peu probable »  (lire le rapport).

Ce qui est du domaine du possible en revanche, du probable même pour ne pas dire du systématique, dans ces circonstances, c’est la propagation de la rumeur et la réponse à une crise par une somme d’actes inconsidérés. C’est peu dire que les sociétés protectrices des animaux ont alerté en masse, au tout début du confinement, sur les risques d’abandons massifs sur le territoire français. Sur les bassins d’Aix-les-Bains et de Chambéry, heureusement, ce n’est pas le cas, même si Amandine Villard, responsable de l’activité de la SPA de Chambéry, reconnaît qu’elle s’attend « tous les matins à retrouver des chiens attachés » au portail de l’association. Nous n’en sommes donc pas là. « Les gens nous appellent beaucoup » , poursuit-elle, certains pour justifier leur intention d’abandonner leur animal de compagnie : « C’est classique alors nous prenons le temps de leur expliquer la situation et de faire de la pédagogie ». Et ça marche !

Pas d’abandons massifs

La réalité est qu’il n’y a pour l’heure « pas plus d’abandons » que d’habitude, « pas d’arrivées massives, ce n’est pas le tsunami annoncé ». « Pourvu que ça dure » , sourit la responsable, « la semaine dernière, nous n’avons reçu qu’une nichée de trois chiens. Les gens appellent d’abord » , c’est heureux.  A Aix-les-Bains, le refuge les Amis des bêtes s’en sort bien également. « Les abandons massifs, ce n’est pas une réalité. Nous n’en avons pas plus que d’habitude » , indique Anne Askevis, qui en profite pour tordre le cou aux rumeurs les plus enflées. « Il n’y a aucune raison d’en faire une psychose, nous avons juste dû venir en aide à 18 chiens enfermés dans des conditions épouvantables… » Un sauvetage périlleux mais pas en lien avec la crise du coronavirus. « En 40 ans, je n’avais jamais vu ça » , les 18 animaux étaient sous la surveillance d’un garçon de 14 ans. Hormis cette sinistre découverte, les eaux sont calmes. Malgré tout, les conditions de travail des établissements et refuges, elles, sont rendues difficiles par le confinement ; la SPA de Chambéry doit fonctionner avec 50 à 60% d’effectifs salariés en moins. « Nous sommes fermés depuis le 16 mars, nous assurons le service public de la fourrière, nous avons deux personnels animaliers le matin, pour nourrir les bêtes et nettoyer les cages, un seul l’après-midi » , résume Amandine Villard. Le weekend, des bénévoles interviennent. 

Les Amis des bêtes « sans rentrée d’argent »

Sur Aix, les situation est la même aujourd’hui, elle pourrait se compliquer dans les semaines à venir. « Nous sommes évidemment en personnel réduit depuis le 17 mars, avec une personne en congés, une au chômage et la troisième en arrêt pour s’occuper de son enfant. Nous devons nous serrer les coudes » , confie Anne Askevis.  Sauf que l’association, vivant des adhésions, des dons et des adoptions n’a « aucune rentrée d’argent », à l’heure actuelle. L’assemblée générale a été annulée, les adhésions n’ont pu, dès lors, être renouvelées. « Nous avons eu pas mal d’appels, parfois pour des choses assez stupides mais aussi, pour recevoir de l’aide. Nous allons tenir » , promet-elle. Il faudra espérer une vague de solidarité une fois la crise passée. 

La SPA de Chambéry
Le confinement a également son impact sur l’activité vétérinaire. « Ils n’interviennent que pour les urgences » , rappelle Anne Askevis. De fait, les opérations dites « de confort » (identification, castration, stérilisation) se trouvent repoussées sine die. « Ils sont aussi en service restreint ». Les conséquences à moyen terme pourraient néanmoins être redoutables avec une prolifération des portées. « C’est très juste, on risque d’avoir une grosse poussée de fièvre avec notamment beaucoup de chatons ». Une explosion qu’Amandine Villard relativise : « C’est un phénomène annuel ». Qui complique néanmoins chaque année le travail des refuges.  En ces temps de repli sur soi et de peur, notre animal de compagnie peut être plus qu’un réconfort ; ne les abandonnez pas, car eux, ils ne craignent pas la crise.

* Lire l’article de l’Express en date du 18 juin 2019.  https://www.lexpress.fr/insolite/animaux/la-france-championne-europeenne-de-l-abandon-d-animaux_2084807.html 

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