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Edouard Philippe : « Si les indicateurs ne sont pas au rendez-vous, nous ne déconfinerons pas au 11 mai ».

Par Jérôme Bois • Publié le 28/04/20

Le premier ministre s’est adressé à l’Assemblée nationale, ce mardi 28 avril, à 15h pour présenter son plan de déconfinement, qui devra être progressif et maîtrisé. Et sous réserve que le comportement des Français soit exemplaire.
« Jamais dans l’histoire de notre pays nous n’avons connu cette situation, jamais il n’avait été confiné comme il l’est aujourd’hui et de toute évidence, il ne peut l’être durablement ». Instrument efficace pour éviter la progression du virus, a-t-il ajouté, le premier ministre a souligné la diminution du nombre de cas depuis le 14 avril. « La décrue est engagée, elle est régulière, lente, mais régulière ». Un confinement prolongé aurait néanmoins « des conséquences gravissimes », faisant allusion à l’arrêt prolongé de la production, l’interruption des investissements publics et privés, la limitation des libertés, la fermeture des frontières, qui seraient autant de risques vers « l’écroulement ». « Il nous faut donc progressivement procéder à un déconfinement aussi attendu que risqué ».

Les trois principes de la stratégie

La stratégie a été ainsi suggérée en prévision du 11 mai. Edouard Philippe a par ailleurs insisté sur le fait que le virus allait « continuer de circuler parmi nous » faute de vaccin, notamment. « Nous allons devoir vivre avec » , d’où la nécessité de réorganiser la vie publique. « Il faut apprendre à vivre avec le Covid-19 et donc nous en protéger ». Tel fut le premier constat. Ensuite, les efforts conjugués des personnels soignants ont permis « de tenir » , au prix d’une « consommation de médicaments jamais constatée ». Une seconde vague imposant un nouveau déconfinement est aujourd’hui « un risque sérieux » , d’où une certaine prudence affichée, un retour à la vie normale maîtrisé, le deuxième axe. Enfin, le troisième élément, géographique, met en avant la progression aléatoire du virus selon les territoires. Une « circulation hétérogène » à prendre en compte sur la « façon dont le déconfinement doit être organisé ». La stratégie nationale pourra donc être adaptée par les élus locaux, le premier ministre ayant promis de rencontrer préfets et élus locaux dès le 29 avril.

« Assez de masques pour tous le 11 mai »

Que se passera-t-il le 11 mai ? Il faudra « protéger ». Chacun devra adopter les bons comportements, en situation de déconfinement, le « respect des gestes barrière » prendra encore « plus d’importance ». Le port du masque sera indispensable dans certaines situations. Le stock était important au moment où la crise a débuté, a-t-il dit, « suffisant » sauf que « deux éléments sont apparus, les importations, stoppées, et la progression, virale » , occasionnant un risque de pénurie. La production de masques sera « augmentée, autant que faire se peut » , le stock existant sera réservé au personnel soignant, en première ligne. Puis, la production de masques en tissu « pour compléter l’offre » suivra son cours.

Quant au port du masque, il sera obligatoire en certaines circonstances, « les acteurs sont donc invités à s’en procurer, nous en recevons 100 millions désormais ». Et 20 millions de masques lavables. Les collectivités locales seront soutenues financièrement à hauteur de 50% sur l’achat de masques. « Il y aura assez de masques à compter du 11 mai ». Les entreprises devront s’en procurer aussi, condition préalable à la reprise économique, une plateforme de e-commerce gérée par la Poste sera disponible à partir du 30 avril. Les personnels et élèves de collège en recevront également. Les particuliers devront se procurer des masques lavables réutilisables par leurs propres moyens.

« Nous compterons sur le civisme de chacun »

Protéger, puis tester. L’idée sera de tester au maximum. C’est pourquoi 700 000 tests virologiques par semaine seront mis en place car « les modèles épidémiologiques prévoient entre 1 000 et 3 000 cas par jour » au 11 mai. « Un accès de proximité sera possible sur tous les territoires, les tests seront pris en charge à 100% par l’assurance maladie ». Les « cas contacts » seront recherchés et identifiés, par les médecins généralistes, notamment. Des brigades seront constituées pour remonter la piste de ces « cas contacts ». Enfin, après la protection et les tests, le troisième pan consistera à isoler les porteurs du virus, « et de casser les chaînes de transmission ». L’isolement ne sera « ni une punition, ni une sanction » , a réaffirmé, Edouard Philippe en appelant au civisme de chacun.  L’application « stop covid » doit faire face à l’impossibilité actuelle de retracer le fil de contamination, « le parcours sanitaire » , elle devra être effective sans atteindre aux « informations sur la personne concernée ». Les libertés publiques et individuelles seront-elles remises en cause ? « Ces questions sont fondées » , a insisté le premier ministre. C’est pourquoi l’application devra faire l’objet d’un vote, afin de répondre à ces interrogations. « Lorsque l’application en mesure de fonctionner, nous organiserons un débat et un vote spécifiques ». Protéger, tester, isoler seront donc les trois mamelles du déconfinement. Pour éviter une deuxième vague et un reconfinement qui en découlerait nécessairement. Edouard Philippe s’est ainsi voulu prudent. C’est pourquoi, « si les indicateurs ne sont pas au rendez-vous, nous ne déconfinerons pas au 11 mai ». Il en appelle donc « à la plus grande discipline » de la part des Français. Auquel cas, jusqu’au 2 juin sera appréciée la somme de mesures à prendre pour aller jusqu’à l’été et poursuivre le déconfinement.  Cafés et restaurants connaîtront leur sort fin mai. En outre, chaque jour, une carte présentera les chiffres par département, permettant la mise en place des tests et détections des « cas contacts » et de fait, du déconfinement progressif à venir.

Les lycées fixés fin mai

Le 11 mai, la vie s’organisera comme suit : écoles, entreprises, transports, commerces… Le retour des enfants à l’école, « impératif pédagogique et social » sera progressif. Partout, sur la base du volontariat. Sur les département à faible circulation du virus, les classes de 6e et 5e pourront rouvrir. Les lycées seront fixés, quant à eux, fin mai. Les classes ne dépasseront pas les 15 élèves. Les enseignants et encadrants recevront des masques. Pour les enfants, il n’est pas recommandé de porter des masques sauf pour les cas particuliers. Les collégiens en disposeront : il sera, pour eux obligatoire. Les crèches seront rouvertes par groupes de 10 enfants maximum. Le recours au télétravail sera maintenu durant les trois prochaines semaines. Le cas échéant, la pratique des « horaires en décalé » devra être privilégiée. La mise en chômage partiel sera possible jusqu’au 1er juin. Les commerces rouvriront également le 11 mai. Sauf les cafés et restaurants, fixés fin mai. Chacun d’entre eux devra respecter un cahier des charges strict, les flux devront être organisés, un nombre maximal de personnes en magasin devra être fixé. Une exception cependant, les centres commerciaux dont la zone de chalandise va au-delà du territoire. Ainsi, les centres commerciaux de plus de 40 000m² ne seront pas rouverts. 

La vie culturelle reprendra mais…

Dans les transports, si les gestes barrière et le respect des distances sont difficiles à mettre en oeuvre, des séries de décisions seront prises : 70% de l’offre RATP sera disponible, en région parisienne. Les transports en commun aux heures de pointe devront être réservés aux travailleurs, les autorités organisatrices seront donc accompagnées par l’Etat. Le port du masque sera obligatoire dans tous ces transports. Les bus scolaires circuleront, avec la règle du « 1 sur 2 » avec port du masque. Il sera obligatoire dans les taxis et VTC sans protection plexiglas. Les déplacements entre départements sont proscrits, notamment avec la perspective des ponts de fin mai. A compter du 11 mai, nous pourrons à nouveau circuler librement, sans attestation. Toutefois, au-delà de 100 km, la circulation sera interdite sauf pour motif impérieux. Les déplacements et la pratique du sport seront possibles, en dehors des lieux couverts, tandis que parcs et jardins rouvriront dans les départements où le virus est moins virulent.
Quant à la vie culturelle, elle pourra reprendre sauf dans les salles de cinéma, les salles de spectacles, couvertes et fermées. Les manifestations sportives, culturelles, de plus de 5 000 participants ne pourront se tenir avant septembre. La Ligue 1 de football ne pourra donc reprendre avant cette échéance. Enfin, les lieux de culte seront ouverts mais « sans cérémonies » autant que possible, les cérémonies funéraires restant limitées à 20 personnes.  Des règles de vie sociale « compliquées, sévères, peut-être laxistes, pour certains » , a reconnu le chef du gouvernement. Le 11 mai ne sera pas, et c’est prévisible, le retour à la vie d’avant, mais une reprise, tout en mesures. A la fin du mois de mai, les conditions de la phase suivante du déconfinement seront évoquées par le gouvernement.

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