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Chambéry: progressivement, la justice reprend son cours
Par Laura Campisano • Publié le 06/05/20
Depuis le 16 mars, le Tribunal judiciaire de Chambéry avait dû s’adapter à la crise sanitaire en prenant des mesures drastiques, dans un plan de continuité qui avait permis de ne prendre en charge que les audiences urgentes. Myriam Bendaoud, présidente du tribunal, et Pierre-Yves Michau, procureur de la République, détaillent le plan de reprise progressive des audiences pour la période du 11 mai au 2 juin 2020.
Après deux mois d’activités confinées, le Tribunal judiciaire de Chambéry se prépare à sortir de la torpeur de ce confinement qui a nettement ralenti le fonctionnement normal de la juridiction. Un retard qui, selon la présidente, Myriam Bendaoud, « ne sera sans doute pas résorbé en 2020 », mais qui avec la reprise, ne se creusera pas davantage. Le service public doit se remettre en ordre de marche, dans le respect des règles sanitaires et la « discipline collective » selon les mots du procureur de la République.
Réorganisation des salles d’audience et de l’accès à la juridiction pour assurer la sécurité de tous
« La reprise progressive des activités ne signifie pas que ce soit la fin de l’état d’urgence sanitaire, c’est simplement la nécessité de remettre en marche le pays et donc l’ensemble des services publics » précise Pierre-Yves Michau. Aussi, quand bien même la situation n’ait, pour le moment, pas encore donné signe de l’éradication totale du virus, il faut néanmoins reprendre le chemin d’une relance de la machine judiciaire, bien que ralentie, dans un premier temps. D’autant qu’il faudra aussi composer avec le personnel disponible, compte tenu des circonstances, certains agents ne pouvant pour le moment reprendre leur poste, comme nous l’indiquions dans notre article du 31 mars dernier.
Aussi, pour pouvoir reprendre, l’idée est « la protection des agents, des justiciables et des magistrats » prévient la présidente du TJ, Myriam Bendaoud, « c’est à nous de faire en sorte que toutes les conditions de sécurité sanitaire soient réunies pour que les activités reprennent sereinement. » Pour ce faire, un plan a été mis en place au sein du palais de justice dont l’accès sera toujours prohibé jusqu’au 18 mai, tout renseignement utile pouvant être distillé par téléphone, comme cela était le cas depuis le début du confinement. Dans l’enceinte du bâtiment, un marquage au sol va permettre une circulation fluide des différents publics, les personnes convoquées seront orientées et les salles d’audience adaptées au maximum, selon le volume qu’elles peuvent accueillir. « Nous souhaitons éviter les attroupements », souligne Myriam Bendaoud, « c’est pourquoi les justiciables devront respecter les distances, autant que possible. Dans les salles d’audience, tout a été prévu pour qu’une distance de 4 mètres carrés soit mise en place entre chaque personne, la barre sera placée quant à elle à 2 mètres du tribunal, afin de respecter les distances de sécurité. » Les audiences seront toujours publiques, toutefois pour des raisons de sécurité le président de chaque audience pourra admettre un certain nombre de personnes dans la salle, soit une publicité restreinte.
Des mesures de protection individuelles et collectives sont donc strictement prévues, afin que le public soit accueilli dans les meilleures conditions au palais de justice où pour l’heure « le port du masque n’est pas obligatoire, » précise la présidente du TJ, « la protection collective que nous assurons est prioritaire, le port du masque est subsidiaire », ainsi que le préconise, par ailleurs, le Ministère de la justice « Toutefois, si jamais les distances physiques ne peuvent être respectées, alors oui, il sera nécessaire. » souligne-t-elle.
Horaires différés pour les audiences et convocations ultérieures
S’agissant des affaires qui reprendront leur cours à compter du lundi 11 mai, il faut noter que les affaires civiles en matière de référés, les dossiers urgents et les dossiers en matière familiale vont reprendre, s’agissant des affaires urgentes. Depuis le début du confinement, par ailleurs, en accord avec les avocats, les dossiers pouvaient être déposés sans qu’il y ait besoin de plaider, afin de respecter les conditions sanitaires. « Pour les autres dossiers, les justiciables seront de nouveau convoqués par le greffe avec des horaires différents pour qu’il n’y ait ni trop d’attente – à bonne distance- , ni trop de personnes dans la salle des pas perdus, » détaille Myriam Bendaoud. « c’est un travail colossal de reprendre toutes les audiences et de leur adresser de nouvelles convocations en respectant des horaires précis. Nous avons commencé à le faire pour les trois semaines de reprise progressive, mais tant que le danger du Covid-19 existera, il faudra prendre toutes les précautions qui s’imposent. Deux mois et demi de grève sans aucun dossier jugé, puis 8 semaines de confinement, de nouveau sans dossier jugé, il ne sera pas possible de résorber ce retard en 2020 et il faut prévoir qu’il durera encore durant de très longs mois. »
Au plan pénal, le procureur rappelle que, bien que « dans un contexte assez lourd, inconfortable, c’est à chacun de respecter une discipline collective. » Peu à peu, les activités vont donc redémarrer, jusqu’à un point d’étape le 2 juin, afin d’évaluer la situation épidémique, « nous saurons alors s’il est possible de continuer à développer les activités ou bien s’il convient de revenir en arrière et de re-confiner. » précise le magistrat. En tout état de cause, les audiences pénales, tant à juge unique que collégiales vont reprendre, tout comme les comparutions sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) et s’ajouter aux contentieux maintenus durant le confinement à savoir les comparutions immédiates, présentations au Parquet,, audiences en lien avec le contentieux de la liberté et justice des mineurs. Là aussi, des précautions seront prises pour assurer les audiences dans ce contexte particulier, « les dossiers seront jugés en petit nombre, dans le respect des règles, les horaires seront décalés, » annonce Pierre-Yves Michau, « cela dépendra aussi des effectifs dont nous pourrons disposer, car nous continuerons à privilégier le télétravail quand cela est possible, tout en maintenant un roulement du personnel mobilisable après la levée du Plan de continuation d’activités. (PCA) ».
« Tout sera fait pour chacun soit en sécurité, compte tenu de la situation actuelle »
Alors certes, reprendre le chemin des salles d’audience peut apparaître anxiogène, et susciter, tant chez le personnel que chez les justiciables, une certaine appréhension. Les chefs de juridiction se veulent cependant rassurants « Il ne faut pas que les gens aient peur de venir au tribunal, » rassure Pierre-Yves Michau, « le pays ne peut pas continuer à être à l’arrêt total, les services publics doivent reprendre leur cours, les affaires doivent être tranchées, les divorces doivent pouvoir être prononcés et les victimes doivent aussi pouvoir être considérées comme telles, » conclut-il, « pour cela et ce dont les gens doivent être conscients, c’est que la sécurité de tous ne pourra se faire qu’à la condition du respect des règles tant de sécurité que de distanciation sociale. » Pour la présidente du Tribunal si « les conditions ne semblent pas forcément rassurantes, tout sera fait pour que chacun soit en sécurité, compte tenu de la situation actuelle. Il faut que nous donnions toutes les conditions pour que la justice soit rendue dans les meilleures conditions, et c’est pourquoi nous avons mis en oeuvre toutes les mesures raisonnables, afin que la reprise d’activité puisse se faire. » Prochain point d’étape, le 2 juin, et d’ici là, très doucement, un dossier à la fois, la justice va reprendre ses droits.
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