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Emmanuel Macron : « La période de crise a montré que nous avions du ressort et a révélé quelques failles »

Par Jérôme Bois • Publié le 14/06/20

Le président de la République s’est exprimé, dimanche 14 juin, pour la 4e fois depuis le début de la crise. Il a dévoilé la troisième phase du plan de déconfinement, programmé le 22 juin. Le moment pour redémarrer le quinquennat, une allocution en forme de bilan forcément attendue. Sobre, il a envisagé la suite sans pour autant entrer dans les détails de son plan pour relancer à la fois l’économie, le vivre-ensemble et rétablir une République forte.
Il avait laissé les clés du camion à ses ministres, notamment à Edouard Philippe, les 28 avril, 7 et 28 mai au moment de présenter les différentes étapes du déconfinement, officiellement entamé le 11 mai. Le président Macron a repris la main, ne laissant à personne d’autre le soin d’en dévoiler la phase 3. Alors, assouplissement du protocole sanitaire dans les écoles à trois semaines des vacances d’été ? Réouverture totale des bars et restaurants ? L’emploi et l’économie en priorités absolues ? La fin de cette « guerre » qu’il avait lui-même évoquée, lors de sa première allocution, le 12 mars ? Dans le petit monde politique français, certains observateurs s’interrogeaient même sur la possibilité de débarquer Edouard Philippe, dont la popularité lui est supérieure. Bref, ça spéculait bon train alors que la République réclamait d’être remise au centre de tout.

La totalité du territoire en zone verte

A 20 heures, dimanche 14 juin, Emmanuel Macron a donc pris la parole : « Je veux ce soir vous parler des jours qui viennent ». Il a aussitôt tourné la page de la crise sanitaire, le territoire passant en zone verte dans sa totalité (Mayotte et la Guyane exceptés). « Dès demain (le 15 juin, NDLR), il sera possible de se déplacer dans l’Union européenne, dès le 1er juillet, dans les pays hors union ». Crèches, écoles, collèges, tous les élèves seront accueillis de manière obligatoire à compter du 22 juin. « Ils resteront très encadrés ». Quid des lycées ? Un flou qui reste à dissiper. Les visites en Ehpad et maisons de retraite seront de nouveau autorisées. « Nous allons retrouver pleinement la France ». Evidemment, « il faudra longtemps vivre avec le virus, respecter des règles, au cas où il reviendrait avec plus de force ». Satisfait, il s’est dit « heureux de cette belle victoire » , non sans rendre hommage aux morts et aux malades, victimes du Covid-19. « Si nous pouvons rouvrir le pays, c’est parce que chacun a pris sa part, » s’est-il néanmoins réjoui. Le 16 mars, « nous avions fait le choix humaniste de placer la santé au-dessus de l’économie. Grâce à l’engagement exceptionnel des soignants, l’ensemble des malades a été pris en charge. Grâce à ceux qui ont poursuivi le travail,d ans l’angoisse, souvent. Lorsque je vous ai annoncé, le 13 avril, la sortie du déconfinement à partir du 11 mai, on me l’a déconseillé. Nous avons surmonté les craintes, les angoisses. Nous avons bien fait ». Place maintenant aux choses sérieuses, terrain sur lequel le chef de l’Etat était attendu. Et sur ce point, nous resterons quelque peu sur notre faim puisque tout reste à définir encore.

Pas d’augmentation des impôts

La nouvelle étape va donc « accélérer la reprise ». Si la période a révélé « que nous avions du ressort, elle a aussi révélé des failles ». Le président attend que les leçons de cette crise soient tirées, « nous corrigerons le tir » , a-t-il annoncé.
Sur la suite du quinquennat, les deux années à venir vont être consacrées à « retrouver notre indépendance en reconstruisant » , avant toute chose, « une économie forte, écologique et souveraine ». « Tout a été mis en oeuvre par le gouvernement pour sauvegarder l’emploi, nous avons mobilisé près de 500 milliards d’euros, c’est inédit ! » rappelant au passage que personne n’avait agi avec tant de force.  Pour lui, ce geste a été « unique » , « une chance ». Ces dépenses « se justifiaient mais viennent s’ajouter à notre dette. Nous n’augmenterons pas les impôts ». La seule réponse pour prétendre à un (relatif) équilibre, « bâtir un modèle économique durable et fort, en travaillant davantage ». Emmanuel Macron a promis de s’y engager « en évitant au maximum les licenciements. Des négociations ont été lancées avec les entreprises pour éviter les pertes d’emploi ». Recherche, attractivité, relocalisation, création des emplois de demain à travers la reconstruction écologique… L’écologie sera donc un axe déterminant sur le chemin de la reprise. Mais la reconstruction doit être « sociale et solidaire » , elle devra permettre de « mieux protéger les aînés et les plus pauvres » , et réclamera « un investissement massif dans la formation ». Tout ce programme sera préparé durant tout l’été. Rien de spectaculaire au demeurant, nous en saurons plus dans les semaines à venir.

« Nous n’effacerons aucune trace de notre histoire »

La République, vacillante au regard de la mobilisation actuelle contre les violences policières, notamment, doit être réactivée : ce sera le deuxième axe de son plan, afin que « chacun trouve sa place. Est-ce vrai partout et pour tout le monde ? Non ! » Le président a donc fait référence à l’accès aux diplômes, à l’emploi, sans distinction d’origine, de statut social… « Nous serons intraitables face au racisme, l’antisémitisme, des décisions fortes pour que chacun ait toutes ses chances seront prises, » a-t-il asséné. Dans ces mobilisations qui ont vu des œuvres et des symboles de l’Histoire chahutés, le président a assuré qu’il « n’effacera aucune trace et aucun nom de son histoire. Elle n’oubliera aucune oeuvre, aucune statue ». L’ordre républicain est assumé par les forces de l’ordre qui méritent, selon lui, « le soutien de la nation ». Accusé de ne pas s’être exprimé après les violences policières qui avaient conduit au décès de Georges Floyd, outre-Atlantique, Emmanuel Macron a donc rectifié le tir… il aura pris son temps et choisi ses mots. Quant à la réorganisation de l’Etat, Emmanuel Macron a promis autre chose, « afin que tout ne soit pas décidé à Paris. Des libertés et des responsabilités inédites seront données à ceux qui agissent au plus près de nos vies ». Vague, cette réorganisation sera reprécisée prochainement, notamment au cours d’une nouvelle allocution, qui se tiendra en juillet.

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