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Chambéry : préfet, plus que le maillon d’une chaîne

Par Laura Campisano • Publié le 22/08/20

Dimanche 23 août, Louis Laugier quittera la Savoie pour le Haut-Rhin où il vient d’être nommé, en plein cœur de l’été. Dès le 24, son successeur prendra la tête de la Préfecture du département, pour poursuivre l’action de l’Etat sur le territoire savoyard. Une page se tourne pour les administrés, les partenaires, mais du côté de l’administration, il est d’usage de voir les préfets se succéder, même si, de l’aveu de Louis Laugier « il y a forcément un capital affectif » quand on s’investit dans un département. Focus sur une fonction méconnue.
« Je suis à la fois très sensible à l’honneur qui m’est fait de partir pour la Préfecture du Haut-Rhin et en même temps j’ai un pincement au cœur de quitter un département humaniste, attachant, avec des équipes de grande qualité. » Devant la presse, réunie pour une dernière conférence de presse dans les salons du Château des Ducs, l’émotion de l’homme était palpable : la page savoyarde se tourne pour Louis Laugier. Même si en embrassant la fonction, les hommes et les femmes qui s’y attellent savent que la durée de leur mission est limitée, on ne peut nier qu’en travaillant au quotidien avec les équipes, les collaborateurs, les élus et les partenaires sociaux, des liens se tissent et rendent les départs moins mécaniques.« Nous ne sommes pas des automates » a rappelé Louis Laugier, en précisant toutefois que sa fonction l’amenait naturellement à être « le maillon d’une chaîne ». Un peu plus que cela, tout de même.

Représentant de l’Etat dans le département, « interface » entre les partenaires économiques et sociaux et l’administration


Les fonctions du préfet sont multiples, et la première d’entre elles, est de représenter l’Etat au quotidien, dans le département. Bien plus, c’est le principe d’unité de l’Etat et sa souveraineté qui rendent cette fonction incontournable. Par décret du président de la République, c’est en conseil des ministres que sont affectés et réaffectés les préfets et ce de manière discrétionnaire, le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur, qui décident et proposent les affectations, n’ayant aucunement besoin de les justifier. Si en moyenne, les préfets mènent une mission durant deux ou trois ans, la durée peut varier, comme ce fut le cas du préfet de Haute-Savoie, Pierre Lambert, qui après 4 années à son poste sera remplacé dés le 24 août par Alain Espinasse. Désigné par l’exécutif sous-entend que les décisions prises par Louis Laugier ne deviendront pas caduques lorsque son successeur, Pascal Bolot, prendra ses fonctions. « Les engagements pris au nom de l’Etat tiennent », a rappelé Louis Laugier, « nous travaillons rarement de manière binaire. Nous avons un mode d’organisation qui fait fonctionner les choses, Bien sûr, si la situation nationale évolue, il faudra prendre des mesures adéquates. » Serein, le préfet sortant n’a pas de regret majeur, quant aux dossiers qui auraient pu ou non, aboutir s’il avait eu plus de temps.  Présent sur le territoire depuis janvier 2018, Louis Laugier indique qu’il a plutôt tendance à voir ce qui a été réalisé, ce qui fonctionne, à positiver les choses et relève principalement « le plaisir qu’il a eu à travailler dans le département. » Un département qu’il a appris à connaître, puisque devant régulièrement s’adapter aux nouveaux environnements qu’il découvre, une particularité de la fonction. « Nous avons des éléments avant d’arriver dans nos nouvelles affectations, mais la clé, c’est d’aller sur le terrain et d’écouter les personnes que l’on rencontre qui sont l’émanation des préoccupations locales. Je sacralisais deux jours par semaine sur mon emploi du temps pour aller à la rencontre des gens. Il faut aussi valoriser les endroits où l’on va tout en restant très humble. » détaille celui qui rejoindra le Haut-Rhin dans le courant du weekend. Taquiné sur son parcours militaire, Louis Laugier a tout de même rappelé que la communication, sur ses déplacements, sur ses actions, les multiples partenariats avec les élus, et principalement durant la crise, sur le confinement, que nous venons de connaître, était une partie essentielle de sa fonction « un exercice de pédagogie » pour une fonction plutôt technicienne, avec des parties « de tronc commun » , que tous les préfets exercent, et qui varient selon la nature et les spécificités du département dans lequel ils évoluent. 

Défis de taille, sécurité des personnes mais aussi administration du territoire et développement économique

On le sait moins, puisque le grand public est sensible face à des questions classiques de sécurité des biens et des personnes, du respect de l’ordre public, des restrictions de liberté si nécessaire, mais les attributions du préfet vont au-delà de l’arbitrage purement sécuritaire. C’est aussi le représentant de l’Etat face aux exclusions, à la précarité des populations et le garant de l’administration du territoire et du développement économique. Au-delà des protocoles, des cérémonies et des commémorations, de la présence du préfet aux côtés des forces de l’ordre, il a certes une obligation de maintien de l’ordre public, mais aussi de bonne gestion du territoire. C’est en ce sens, par exemple, que des réunions étaient organisées avec les différents secteurs économiques durant la crise sanitaire, notamment avec les représentants des métiers du BTP ou du secteur de l’hôtellerie, ou la surveillance du versement des indemnités liées au chômage partiel au quotidien, par les services de la Préfecture. Par ailleurs, en Savoie, les risques en montagne,les problématiques du loup et de l’élevage, le développement du tourisme, les flux de populations, l’accès aux routes, l’environnement, sont autant d’enjeux forts faisant partie des préoccupations quotidiennes des services préfectoraux. Des enjeux savoyards classiques dirons-nous, mais force est de constater que le mandat de Louis Laugier n’a pas été de tout repos : l’hiver particulièrement rude durant lequel il a pris ses fonctions, la crise des gilets jaunes fin d’année 2018, puis la crise sanitaire et le confinement, avec les conséquences économiques qui en ont découlé, l’organisation des élections en deux parties, n’ont pas rendu la tâche aisée. Une situation face à laquelle il reste lucide, mais qui ne semble pas avoir entaché sa motivation. « Il faut raisonner de manière globale » a-t-il indiqué, « les dossiers progressent dans la durée, il faut souligner la qualité du travail partenarial, les relations de confiance qui ont été nouées, cette confiance qui se gagne, s’acquiert mais est véritablement obtenue. » Championnats du monde de 2023 de ski de Courchevel – Méribel, redynamisation de Modane, poursuite du chantier du Lyon-Turin, poursuite de la crise économique, qui bien que présentant des signes plus satisfaisants au sortir de l’été, n’est pas totalement enrayée, seront les grands chantiers, en plus des spécificités évoquées précédemment, qui attendront sur le bureau de Pascal Bolot, lundi 24 août. Des dossiers qu’il prendra « nécessairement différemment, avec un éclairage différent » que pouvait le faire Louis Laugier, qui n’appréhende pas sa nouvelle affectation, mais semble rebondir, comme l’ont fait régulièrement ses partenaires durant les réunions de crise. « Il y avait deux manières de voir la situation durant la crise de la Covid, soit on rebondit soit on pleure, ici, en Savoie, on rebondit, on voit les choses qui sont bien, on trouve des solutions, les réunions sont productives. C’est plutôt bien que l’on soit fier de son territoire. »   De nouveaux lendemains attendent donc le département, et le futur occupant du château des Ducs de Savoie, qui sera rapidement rejoint par une équipe, pour poursuivre les chantiers déjà engagés, et dont il faudra tout découvrir.

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