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Remontées mécaniques : les élus du Rassemblement National interpellent les Préfets
Par Laura Campisano • Publié le 06/12/20
Incertain, le futur très proche des domaines skiables et notamment la réouverture des remontées mécaniques sensibilise les professionnels, les citoyens ainsi que les élus de toutes les sensibilités de l’échiquier politique. Samedi 5 décembre, tous défilaient dans les rues de Chambéry pour réclamer la levée de ce qu’ils perçoivent comme une double punition : pour l’économie des stations certes, mais aussi pour toute une chaîne d’emploi sur l’ensemble de la région AURA. En ce sens, les élus locaux et régionaux du Rassemblement National ont décidé de s’adresser directement aux préfets.
Une missive devrait partir dans les heures qui viennent et elle est signée conjointement par les élus régionaux et par le délégué départemental RN Savoie. Son but, interpeller les préfets d’Isère, de Savoie et de Haute-Savoie, afin qu’eux-mêmes fassent remonter à l’Etat les doléances du terrain, des élus locaux, des professionnels de la montagne et de toute une filière se sentant mise à l’écart et durement touchée.
Une lettre ouverte aux préfets d’Isère, Savoie et Haute-Savoie, parallèlement à la mobilisation de la rue
« Le problème des remontées mécaniques n’est pas uniquement celui des grandes stations, ce n’est pas pour quelques privilégiés, cela touche tout un pan de l’économie des Alpes du Nord ! » Le ton est donné. Réunis en conférence de presse devant l’Office du tourisme de Chambéry, Alexis Jolly et Vincent Lecaillon, conseillers régionaux AURA et respectivement délégués départementaux RN de l’Isère et de la Haute-Savoie, ainsi que Brice Bernard, délégué départemental RN de la Savoie, comptaient bien faire entendre leur voix. Par le biais d’une lettre ouverte aux préfets des trois départements, touchés durement par la décision gouvernementale de ne pas ouvrir les remontées mécaniques, ils espèrent pouvoir faire pencher la balance en faveur de l’économie locale.
Au loin, le son des cloches d’alpage rappelait l’importance de la mobilisation des professionnels et des élus locaux, rassemblés et défilant dans les rues Chambérienne. Dans le cortège, la conseillère régionale Marie Dauchy a constaté l’absence de visibilité décriée par les manifestants. « Syndicalistes, professionnels, élus de tout bord, sans étiquette politique, étaient présents pour une même demande : la réouverture des remontées mécaniques, des dates et des mesures précises », précisait-elle, « les professionnels présents dans la manifestation exprimaient n’avoir pour l’heure aucune vision pour l’avenir : ce qui se passe aujourd’hui impacte les prochaines années, beaucoup se reposent sur les saisons hivernales. A la fin de la manifestation, les professionnels de la montagne ont symboliquement jeté des skis. Ils se sentent oubliés, clairement ».
Pour les élus RN, comme pour les autres cette décision est incohérente, relève du sacrifice. « La décision gouvernementale est inadmissible, il est normal que tous les élus se rejoignent là-dessus. Ce n’est pas possible d’avoir un double discours comme le pratique monsieur Mignola, nous devons soutenir les acteurs locaux, nous nous accordons pour nos montagnes », expose Brice Bernard. D’autant que « dans les stations, tout a été mis en place pour accueillir dans les bonnes conditions les touristes », plaide à son tour Alexis Jolly, « ils ne sont pas fous, ils ne demandent pas la réouverture des bars et des restaurants ! » « En n’ouvrant pas les remontées mécaniques, l’Etat sacrifie 50 % de l’économie de la Tarentaise », abonde Brice Bernard, « cela plombe l’industrie ! 120 000 emplois sont concernés, 11 milliards de recettes sur toute la saison, dont 20 à 30 % du chiffre d’affaires des stations est réalisé en cette période. Dites-vous que le secteur de la montagne a déjà perdu 2 milliards d’euros rien qu’entre mars (date du 1er confinement NDLR) et novembre. » Abyssal, vu d’ici.
Des stations organisées, en attente de touristes pour fonctionner
Quelle incohérence soulignent les élus RN ? « Nous reprochons au gouvernement de laisser les français s’entasser dans les transports en communs alors que les professionnels de la montagne n’ont pas attendu les recommandations du Premier ministre pour se préparer », détaille Brice Bernard, « ils ont mis à disposition des tours de cou » spécial covid «, réorganisé les files d’attente dans les stations, instauré un siège sur deux dans les télésièges, mis en place le dépistage massif ainsi que la mise à disposition de chambres d’hôtel pour les personnes touchées par le virus. » « Il est quand même préférable pour les français d’aller respirer l’air frais des montagnes plutôt que l’air covidé des bus et des métros ! » ironisait Alexis Jolly.
Autre point d’accroche, les conséquences des fermetures d’équipements seraient dommageables, faute de pisteurs sur les terrains. « Les pisteurs épurent les couloirs d’avalanches, sans eux le risque d’avalanche est réel » fait valoir Vincent Lecaillon, « là, cela occuperait les services de réanimation pour des accidents graves. Le gouvernement ne peut pas justifier sa décision par rapport à l’engorgement des hôpitaux : la saison dernière, sur les 30 départements concernés par la problématique des domaines skiables, 200 personnes ont été hospitalisées. Leur argument ne tient pas. » a-t-il estimé.
Enfin, les stations, quelle que soit leur taille, attendent avec impatience la venue de touristes pour pouvoir faire fonctionner l’économie locale. Mais avec le confinement, toujours en vigueur, et dont la date de fin placée au 15 décembre semble aujourd’hui sur la sellette, seuls les locaux, à raison de 3 heures dans un périmètre de 20 km pourraient venir dans les stations. « Les stations savent qu’il n’y aura pas un afflux de touristes, mais ceux qui viendront pourront au moins faire travailler les commerçants, les cours de ski », précise Brice Bernard, « compte tenu du fait que le tourisme étranger est en perdition, elles comptent beaucoup sur les locaux. Cela permettrait aussi de faire marcher les restaurants en vente à emporter, c’est déjà ça. »
« La fermeture des domaines skiables touche les gens du quotidien »
Mobilisés, Alexis Jolly et Vincent Lecaillon comptent aussi sur la Région, pour se positionner sur ce point, comme l’avait laissé sous-entendre Laurent Wauquier. « Cela nous tient à cœur », précise Alexis Jolly, « parce que les enjeux économiques des stations de ski sont en jeu, et que la Région peut faire pression sur les pouvoirs publics. En souhaitant rencontrer les préfets, nous portons également la voix de nos électeurs, il faut qu’ils écoutent les manifestants, et qu’ils ouvrent sans délais les remontées mécaniques. » En arrière-plan, les élus RN ne pensent pas forcément aux domaines skiables aux tailles et tarifs enviables, tels que Courchevel, encore qu’ils soulignent « leurs forts investissements, à hauteur de 60 millions d’euros ainsi que la création d’emplois pour les locaux. » C’est davantage à des stations familiales, accessibles dès 20 euros pour un forfait, comme en Tarentaise ou en Maurienne, ou encore Méaudre-en-Isère, ou au Grand-Bornand-Chinaillon, en Haute-Savoie voisine, dont ils se préoccupent. « Il s’agit de stations de 4e génération, qui pratiquent des forfaits bas, elles sont également un enjeu pour la Région. N’oublions pas qu’il y a également une partie des remontées mécaniques gérée par des coopératives, directement impactées, qui ont besoin que les familles puissent consommer », reprend Vincent Lecaillon, « il y a de tout, cela vaut pour tout le monde, le côté loisirs, le côté industrie, cela impacte tout le monde et le risque va toucher la saison d’été. Si l’on souhaite que les Alpes du Nord dont le tourisme d’hiver fonctionne bien, et qui développe aussi le tourisme d’été, devienne comme les Alpes du Sud, il faut le dire ! » s’emportait-il. La situation de la France, tandis que ses voisins européens ont indiqué que les stations seraient ouvertes, comme en Suisse, en Espagne, en Autriche notamment, démontre pour ces élus l’échec de la coordination européenne. « Ces pays qui ouvrent leurs stations soutiennent leur économie », reprend Alexis Jolly, « les seuls perdants, c’est nous, le pays leader mondial du ski ! » « Ce n’est pas qu’un problème de loisir, rebondit Vincent Lecaillon, » c’est aussi que 60 % des équipementiers travaillent avec les français, que si l’agriculture laitière fonctionne bien, c’est parce que la vente des fromages aux touristes tourne bien, la baisse de la production aura un impact tôt ou tard, ce qui touche le haut des montagnes va se répercuter sur les vallées. « » Sans compter «, conclut Brice Bernard, » que cela touche les gens du quotidien, dans une économie liée à la saisonnalité, la réduire de cette façon a un impact extrêmement fort. Il faut bien avoir à l’esprit qu’un euro dépensé dans les stations représente 6 euros pour les hébergeurs ou les commerçants. « » Il faut prendre d’autres mesures «, soutenait enfin Marie Dauchy, » si le COVID augmente ce ne sera certainement pas à cause des stations, mais bien plus en raison des fêtes de fin d’année. Ce n’est pas la plage, il y a déjà une distance avec les skis, les masques, les lunettes, les écharpes, il faut aller de l’avant. Bien sûr, il y a eu un cluster aux Contamines-Montjoie en mars, mais il n’y avait alors aucune mesure, aujourd’hui, les gens sont responsables. Il n’y aura pas une activité à 100%, mais c’est mieux que rien. « Alors que les manifestants s’éparpillaient entre les étals du marché de Chambéry, pour rejoindre les bus affrétés pour l’occasion, que les derniers tintements de cloches se faisaient entendre, les élus RN eux, se préparaient à rejoindre de nouveaux cortèges, en espérant être entendus prochainement.
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