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Avenir du centre social des Combes, décision imminente ?

Par Jérôme Bois • Publié le 05/03/21

Le bureau du centre social des Combes a convoqué un conseil d’administration, vendredi 5 mars, durant lequel pourrait être dévoilé l’intégralité de l’audit financier, commandé il y a maintenant un mois. Il y sera question de l’avenir du centre, dont le trou financier atteindrait des sommes folles, engagées sur la seule année 2020. L’épilogue est proche.
Les lettres aux adhérents du centre social des Combes (CSC) se suivent et ne se ressemblent pas. Gorgées d’un espoir fou, les deux premières laissaient entrevoir la lumière vers une année 2021 teintée de renouveau, une fois les finances assainies. Las, la troisième, diffusée le 2 mars, est sans appel : le bilan financier « démontre de façon désormais indiscutable un déficit de l’année 2020 et des dettes cumulées de début 2021 qui ont conduit la commissaire aux comptes de l’association à en informer le tribunal judiciaire ». En dépit de la réception prochaine d’avances de subventions Caf et de versements « dès réception des bilans correspondants et du compte de résultat 2020 » , malgré le travail « au rattrapage de démarches administratives, qui devraient permettre d’autres entrées financières » , ces financements « ne permettront pas à eux seuls de retrouver l’équilibre financier » , indique le bureau. 

Le nouveau directeur déjà parti

Le départ de l’ancien directeur Guillaume Holsteyn, personnalité controversée au possible, avait été compensé, le 15 février dernier, par l’arrivée d’un nouveau, embauché pour un intérim de deux mois et plus si affinités. Il ne sera resté que deux semaines aux manettes. Pour une ancienne salariée, l’issue était évidente : « Il ne pensait pas que la situation puisse être si merdique. Il avait l’air bien, compétent ». « Nous avons, d’un commun accord avec M. Pongérard » , relaie la lettre aux adhérents, « rompu le contrat de travail qui nous liait, pour diverses raisons dont celle de ne pas alourdir la situation financière du Centre ». « Pour lui » , rembobine Marie-Jeanne Tivolier, « c’était ingérable, il ne voulait pas être perçu comme celui qui allait liquider le centre ». Avoir un directeur était une exigence de la Caf pour obtenir l’agrément, le directeur nommé n’aura pas tenu très longtemps. Ainsi, vendredi 5 mars, un conseil d’administration se réunit, c’est au cours de cette réunion que l’audit financier devrait être présenté à ses membres. « Nous organiserons une réunion publique le samedi 6 ou au plus tard le lundi 8 mars pour rendre compte aux habitants de la réalité financière » , poursuit la vice-présidente. « Tout nous sera présenté, ça avance, pas dans le sens que nous aurions espéré mais la situation est moins catastrophique que ça aurait pu être ». 

Un ancien directeur encore très présent dans les têtes.

On attend, pour ainsi dire, avec impatience l’état des lieux même si le responsable est d’ores et déjà tout trouvé aux yeux de tous: Guillaume Hoslteyn. « Pour lui, nous n’étions rien et il n’avait pas plus de considération pour les membres du bureau » , se souvient l’ancienne salariée. « Je me suis toujours méfiée de lui ». Le bureau avait tout ou presque ignoré des activités du directeur déchu : « Il n’a fait aucune demande de subventions » détaille Marie-Jeanne Tivolier, « n’a présenté aucun document pour obtenir des financements. Les bilans étaient réalisés par les salariés, lui n’a rien transmis. Le plus dingue, c’est qu’il ne connaissait même pas l’adresse postale de la Caf, c’est scandaleux ! » Entre elle et lui, le conflit remontait à septembre 2020 (lire notre article du 9 février), losque l’ancienne présidente démissionna. Peu à peu, du fait d’alertes successives, le conseil d’administration commençait à percevoir des failles dans la gestion courante du centre : « Nous n’avions aucune ouverture sur les comptes, la gestion du personnel était un perpétuel cafouillage, en cas de soucis, M. Holsteyn n’était jamais joignable ». Ni lui ni son adjoint. « L’été dernier, nous n’étions que trois à travailler aux Combes tandis que lui et son adjoint restaient à Pugnet » , intervient l’ex salariée, dont le contrat a pris fin il y a peu. Elle évoque par ailleurs « des primes attribuées à certains et pas à d’autres » , des frais de bouche « de l’ordre de 17 000 euros » , des bénévoles « rémunérés » … Autant de faits que seul l’audit pourra confirmer.

Un départ en douceur

Le départ de Guillaume Holsteyn se fera néanmoins sans heurts. « On lui a trouvé des excuses, au regard de sa dynamique, de son entregent, le CA a choisi une solution amiable ». C’est pourquoi en dépit d’un résultat serré au moment de décider si faute grave il y eut ou non, les membres préféreront le départ négocié. Amine*, personnalité investie dans le quartier, sur le plan associatif, se dit « à moitié surpris » par les tourments dans lesquels est plongé le CSC, « même la personne la plus empathique peut céder à l’égoïsme. Guillaume Hoslteyn n’avait pas nécessairement de mauvaises idées, il avait une stratégie mais c’était un baratineur. Je suis embêté parce qu’avec cette rupture conventionnelle, rien ne l’empêchera de revenir sur une autre structure dans le coin ». Symbole de cette rupture entre le bureau et la direction, l’initiative « Dépanniers », créée le 7 mai 2020, dont le CA ignorait tout de la contribution active du centre. « Il n’avait pas informé le bureau , c’est une réalité – qu’il s’agissait d’une activité du centre social – que nous avons apprise dans le journal » , grimace la vice-présidente. Il ne fait aucun doute que cette opération compte aujourd’hui pour beaucoup dans le creusement du fossé financier courant 2020. « S’il s’agissait d’une autre association, il n’y aurait eu aucune raison pour que le CSC couvre ses frais ». Mais comme ses statuts ne seront jamais déposés… Et quelques élus de la majorité ont participé à la réalisation de cette entreprise caritative, élément sur lequel la droite tente d’appuyer de tout son poids (lire notre article du 6 février) pour mieux mettre la pression sur l’actuelle majorité.

Le centre, bastion politique ?

Voici donc une opération à but solidaire couverte de boue et à l’origine de nombreux fantasmes sur les liens présumés entre le centre et la campagne des municipales. « Il s’est effectivement beaucoup trop impliqué dans cette campagne » , confesse Marie-Jeanne Tivolier, « aussi lorsque j’ai vu le tour que cela prenait, j’ai cessé d’assister aux réunions. Le centre a, de par ses statuts, l’obligation d’être laïc et apolitique. Tout le monde connaît mes penchants politiques » , insiste-elle, « mais lorsque j’étais élue au conseil municipal dans l’équipe de Louis Besson, je ne souhaitais pas, bien qu’étant habitante, être déléguée au quartier. Je n’ai pas pour habitude de négliger les détails ». C’est pourquoi, « durant mes six années de mandat, je n’ai plus été administratrice du centre ». 

Durant la campagne, le centre social incitait les habitants à aller effectuer leur devoir de citoyen en allant voter, comme le démontrer un reportage diffusé au 20h de TF1 le 26 juin dernier.

Notre ex-salariée se souvient, elle, que « de la propagande était faite chaque dimanche sur le marché ». Même « Dépanniers », au départ, « tout le monde pensait que c’était un geste solidaire alors que c’était au final intéressé ». Michel Dantin n’évoque-t-il pas cet individu, au volant d’un véhicule du centre, intercepté par la police nationale en train d’inciter les gens à aller voter, le jour du second tour ? Un élu de l’ancienne majorité se rappelle, lui, « d’un centre retapissé, à l’intérieur, d’affiches pro-Repentin ». La rumeur d’une plainte déposée par l’ancien maire suite à cette interpellation est apparue, ces derniers jours, une information non fondée, le procureur de la République de Chambéry nous confirmant que rien ne lui est jamais parvenu. L’ancien maire nous assure néanmoins « suivre toute cette affaire de près » **. Pour mieux contre-attaquer ?Impliqué lui aussi dans la campagne, Amine témoigne : « M. Holsteyn comptait parmi les fidèles de la liste portée par Thierry Repentin. Clairement, au centre, ça » puait «. C’était l’appareil du candidat sur les Hauts ». Il affirme que le directeur motivait ses troupes à aller investir les rues des Hauts, « mégaphone à l’appui pour inciter les gens à aller voter ». Aucun élément concret ne permet de valider que le centre exhortait les gens à voter Thierry Repentin, pas plus qu’il n’existe d’élément prouvant que le candidat aurait pu être à l’origine d’un quelconque « partenariat » avec le CSC. Un reportage diffusé au 20h de TF1, daté du 26 juin, montrait que le centre jouait son rôle dans l’incitation au vote, en tant que geste citoyen. Michel Dantin rappelait, quant à lui, que l’ex-directeur était bien présent lors de l’inauguration de son QG de campagne, début 2020. « Il était venu me voir, me précisant à quel point un centre social et son directeur se devaient de rester en dehors de toute considération politique » , nous expliquait-il, il y a peu.

« Les gens du quartier ont un détecteur de sincérité »

La disparition du CSC dans sa forme actuelle étant une perspective à envisager sérieusement, la majorité avait d’ores et déjà retenu l’option d’une société coopérative à intérêt collectif pour repartir sur une formule de gouvernance new look. Une option qui n’a pas obtenu les faveur du groupe « Chambéry Cap à gauche », très présent sur le quartier au point d’être à l’origine de la création d’un collectif avant même que l’état des lieux ait été rendu public. « Cap à Gauche s’interroge sur le bien-fondé du choix d’une SCIC pour la gestion d’un centre social. Il semblerait qu’une seule expérience existe au niveau national, » le 110 à St Denis « créé en 2018 et opérationnel en 2019. Est-ce bien suffisant comme recul ? » « Cap à gauche » poursuit son diagnostic et voit l’association comme ultime recours, celle-là même qui a pourtant et à trois reprises montré ses limites, aux Châtaigniers, à Pugnet et aux Combes : « Aujourd’hui, la forme associative,dans laquelle la place des adhérents est essentielle, reste adaptée si les contrôles internes (les administrateurs) et les contrôles externes (les financeurs) s’exercent. La SCIC est une société capitalistique en ce sens qu’elle fonctionne avec l’apport d’un capital de différents sociétaires. C’est l’ouverture vers la forme du partenariat public-privé, très prisée par les libéraux de tous poils. C’est aller vers une forme de privatisation des activités sociales et culturelles qui risque de réduire la place des habitants dans la conduite de l’animation du CSC ». 

Une publicité dont les Combes se seraient bien passées.
Seulement, il n’y a pas qu’au niveau des Combes que le sujet doit se concentrer. « Michel Dantin, on a pu voir son bilan, on s’est battu pour une alternance avec Thierry Repentin même si le candidat idéal n’existe pas » , reprend Amine, « mais le quartier est une poudrière, il est prêt à exploser. Les élus ne se rendent pas compte que parader le jour du marché, ça ne suffit pas. Les gens ici ont un détecteur de sincérité. Imaginez, le quartier pèse autant, en termes de population, qu’une ville comme La Motte-Servolex ; on verrait assez mal Luc Berthoud se contenter d’aller sur le marché une fois par semaine et tenir une permanence le samedi matin. C’est pourtant ce qu’il se passe ici ». Son souhait serait que la situation du centre serve « de coup de pression pour inciter les élus à mettre quelque chose de solide en place sur les Hauts ». Afin d’éviter d’avoir à attendre plus grave déclencheur.L’avenir du centre – et de ses salariés – pourrait donc se jouer ce 5 mars mais celui du quartier aussi, plus que jamais en quête d’institutions solides, pérennes et autour de gens de bonne volonté
* Prénom d’emprunt
** Les deux bureaux de vote situés au CSC recueilleront, le 28 juin, plus de 79% et de 74% des suffrages en faveur du maire actuel. Sur les autres cinq autres bureaux, à Pugnet et au Scarabée, les chiffres iront de 55 à 66%, des scores attendus pour une liste de la gauche plurielle sur laquelle figurait la compagne de Guillaume Holsteyn.

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