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Chambéry : après la clôture du feuilleton Ravet, quelle sera la note pour la ville ?

Par Jérôme Bois • Publié le 07/04/21

Cap à gauche, le NPA, la France insoumise et Alternatives et autogestion avaient rendez-vous, mardi 6 avril, en mairie de Chambéry afin de connaître dans le détail les éléments de l’avenant passé entre la ville et Q Park, le gestionnaire des parkings, destiné à modifier le contrat de délégation de service public passé en 2017. Une entrevue qui n’a pas tout dit des nouveaux accords mais qui laisse percevoir de futurs débats enragés au conseil, lundi 12 avril et pour cause : le préjudice cumulé de la crise Covid et de l’arrêt des travaux du parking s’élèvera à plus de 3,3 millions qu’il faudra répercuter sur la durée du contrat de DSP, en exonérations et sur le coût du stationnement. Entre autres. La promesse d’un débat enfiévré ? 

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Ce ne fut pas une entrevue pour des prunes, les cinq membres d’Alternatives et autogestion (Régis Moulard), du NPA (Laurent Ripart et Philippe Delime), de Cap à gauche (Guy Fajeau) et de la France insoumise (Gérard Volat) en sont ressortis avec un peu plus d’éléments dans leur besace, mardi 6 avril, de quoi remplir leur carnet de croisade, le temps d’étudier l’avenant en question et de revenir taper encore plus fort à la porte de la mairie. Les médias, conviés à la réunion, en furent pour leurs frais, contraints de rester à la porte faute d’avoir été annoncés. 

Satisfaits mais pas trop

Une vingtaine de minutes plus tard, les cinq compères s’estimèrent satisfaits mais surtout gonflés à bloc : « C’est la continuité de ce que nous avions entrepris précédemment, c’est-à-dire chercher à obtenir plus de transparence sur l’ensemble des documents signés entre la ville et Q Park » , plus de transparence sur l’avenant passé entre Q Park et la municipalité, soumis à délibération du conseil lundi 12 avril en séance, avenant définissant les concessions faites de part et d’autres après les retards puis l’arrêt du chantier Ravet. « On a la délibération, les choses avancent, ce que l’on veut, maintenant, ce sont des éléments » , assénait Guy Fajeau. Plus encore ? « Oui, la présentation qui nous a été faite était astucieuse, il n’y aura pas de chèque adressé à Q Park. Nous aimerions pourtant en savoir plus, connaître la note à payer chaque année, connaître chaque mesure, qui sont autant de pénalités pour nous et en savoir plus sur la hausse des tarifs du stationnement en vigueur depuis le 1er mars* sur tous les parkings en enclos et en ouvrage gérés par Q Park ». La situation semble limpide, selon le président de Cap à gauche, « moins de recettes pour la ville, le contrat de la DSP prolongé d’un an jusqu’en 2048 et exonération de la taxe foncière et pour l’enlèvement des ordures ménagères en 2020 et 2021** ». Un prix à payer que tous estimaient exorbitant, ce 6 avril.

Un préjudice total de 3,333 millions d’euros

Pour Gérard Volat, stopper le chantier en juillet dernier « n’était pas pertinent, surtout après cette fausse concertation. Par ailleurs, nous nous interrogeons sur cette prime Covid ; pourquoi leur faire autant de cadeaux ? » On le sait, le parking n’était pas la tasse de thé de beaucoup de riverains et de quelques Chambériens et les conséquences des retards successifs à la bonne marche du projet depuis 2017** (lire notre article du 24 mai 2019) ont considérablement alourdi la note. Ainsi, le préjudice Covid a été estimé à 859 000 euros pour l’ensemble des parkings en ouvrage de la ville, Q Park ayant fait état d’une perte de 206 326 clients en entrée payante en 2020. En outre, l’arrêt du chantier, décidé en juillet 2020 « afin d’examiner la consistance » d’un projet dont goûtait assez peu une bonne partie de la nouvelle majorité, celle formée par Chambé Citoyenne, a été évalué à 2,474 millions d’euros. 

L’entreprise générale Chanut sera indemnisée.

La plus grosse partie de ce montant reviendra alors à l’entreprise générale Chanut, pour laquelle le parking constituait le plus gros du chiffre d’affaires 2020. Le préjudice total de cette affaire se monte ainsi à 3,333 millions d’euros, en comptant les coûts de chantier, d’honoraires de maîtrise d’œuvre, d’études et bureaux de contrôles, sans parler « des coûts liés au caractère sensible du projet » , indique la délibération n°18. Il faut se souvenir que le chantier en élévation avait été stoppé afin de préparer une concertation (lire notre article du 21 septembre 2020) qui aboutira in fine au maintien du projet initial, compte tenu des sommes engendrées par toute autre modifications (lire notre article du 26 novembre 2020). «Oui, le parking sera là » , soupirait Régis Moulard, « une grande partie des Chambériens estimaient pourtant que ça allait être une nuisance, une verrue » , une assertion invérifiable, évidemment. « On voit que la fréquentation du parking Cassine reste faible, je crains que Ravet ne soit au même niveau de fréquentation », ajoutait Guy Fajeau. « Cela conforte notre approche » , une approche volontariste, de dentellière : « Nous avons obtenu ce document, nous allons le lire attentivement et nous en tirerons notre analyse que nous présenterons par la suite » concluait Laurent Ripart.

Un avenant donc « on ne peut se réjouir »

Rapporteur de la délibération, lundi prochain, Martin Noblecourt, adjoint en charge de l’administration générale et de la commande publique, s’il ne condamne pas la méthode, ne s’en offusque pas davantage, « c’est un document public, un sujet qui sera présenté au conseil, qui a été travaillé en commission ». Cette initiative ne sera néanmoins pas l’occasion de rouvrir les plaies : « Le choix a été fait, l’avenant que l’on passe prend en compte l’ensemble des préjudices subis, notre volonté étant de tout solder et de nous couvrir ». Tout, même certains reliquats telles les taxes d’aménagement et d’archéologie « qui n’avaient pas été traitées avant et qui sont un peu la cerise sur le gâteau ». Les négociations ont été âpres, « le contrat passé en 2017 était en béton, le modifier nous contraignait à des pénalités, c’est ce coût que nous allons présenter lundi avec transparence ». Parmi ces modifications faites au contrat figurent toutefois certaines clauses favorables à la ville comme l’intégration de modifications d’équipements sur l’ensemble des parkings gérés par Q Park, en faveur des mobilités douces (box de vélos fermés, prises de recharges électriques et peut-être même des bornes électriques dans les enclos), ou le changement de destination du local commercial – dont le loyer a été abaissé de 45 000 à 10 000 euros – contigu au parking Ravet, « nous avons contacté des associations et acteurs commerciaux en lien avec le vélo pour s’en saisir » , indique l’élu chambérien. Mais surtout, sur le plan financier, le délégataire a accepté d’augmenter sa redevance à la ville en fonction d’éventuelles hausses de ses recettes***.Le 22 février dernier, le conseil avait approuvé la modification des tarifs, en vigueur depuis le 1er mars : l’avenant précise qu’aucun autre changement de tarification ne pourra survenir avant 2023, année où se mettrait en place « une tarification plus globale, fruit d’une réflexion sur la politique de stationnement car nous voulons réduire la place de la voiture en ville, spécialement en surface ». A ce moment, nous aurons une idée plus concrète de la fréquentation des parkings Cassine et Ravet.En définitive, « nous étions dans un cadre contraint, ne rien faire pouvait créer des risques extérieurs comme des blocages et tout ce à quoi nous avons pu assister jusqu’ici. Nous serons donc obligés d’assumer ces coûts car pour nous, ce contrat de DSP tel qu’il était rédigé n’était pas souhaitable pour la ville ». En cause, une vision différente de la politique de stationnement entre deux majorités aux antipodes l’une de l’autre. En attendant le débat probable du 12 avril, Martin Noblecourt se satisfaisait toutefois « d’avoir clos un dossier douloureux » , non sans admettre que cet avenant « n’est pas quelque chose dont on peut se réjouir. C’était un héritage, il nous a fallu le porter ».

* Une nouvelle grille tarifaire sera mise en place le 1er janvier 2023, conformément à ce que prévoit la convention passée entre les deux parties.
** La participation du délégataire au paiement de ces deux taxes sera de 50% pour l’année 2022. Il n’y aura plus d’exonération à compter de 2023.
*** La parti fixe s’élève à 185 000 euros chaque année. Une part variable s’ajoute, en fonction des recettes de l’entreprise (20% à partir de 5,2 millions d’euros de recettes, 40% au-delà de 5,5 millions d’euros). La ville a en outre obtenu la garantie que Q Park n’allait pas tirer plus de bénéfices que ce qui est indiqué dans le contrat, via la modulation de la clause de retour à meilleure fortune.

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2 commentaires

paul

07/04/2021 à 19:27

Les médias, conviés à la réunion, en furent pour leurs frais, contraints de rester à la porte faute d'avoir été annoncés.... Démocratie ... mais pas trop !

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LC

07/04/2021 à 19:37

la mairie n'était pas informée de la présence des médias, tout simplement. Aucun problème démocratique, de notre point de vue

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