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Chambéry : le grand retour des groupes locaux de traitement de la délinquance

Par Laura Campisano • Publié le 06/05/21

Garantir la tranquillité publique partout et personnaliser la peine infligée aux fauteurs de troubles, font partie des missions du ministère public, par la voix des magistrats du Parquet. C’est aussi le sens du groupe local de traitement de la délinquance, créé en 1997 et réactivé en 2001. Véritable outil multifonction du procureur de la République qui le dirige, ce groupe local réunit le maire et l’adjoint à la sécurité et à la tranquillité publique, la police, la préfecture, la PJJ et le SPIP, et permet de créer une coopération entre les différents acteurs afin de mettre fin aux troubles subis par les populations de certaines zones sensibles de la ville, pour apporter la réponse pénale adéquate et durable. 
Le groupe local de traitement de la délinquance (GLTD) ne s’était pas réuni depuis 2019, et il était temps de le remettre en service, d’autant plus que le Garde des Sceaux a fait de la justice de proximité son cheval de bataille. A l’initiative du procureur de la République de Chambéry, se sont réunis le 30 avril dernier tous les acteurs de la sécurité au quotidien sur la commune : préfecture, police, protection judiciaire de la jeunesse, représentants du service d’insertion et de probation ainsi que le maire et l’adjoint à la sécurité de la commune de Chambéry. Leur objectif, travailler en commun pour faire baisser la petite délinquance du quotidien, celle qui pollue la vie des Chambériens. 

Un travail collectif sur des zones géographiques délimitées

Il existe des GLTD sur plusieurs secteurs de la Savoie : les communes de Barby, Cognin, Pont-de-Beauvoisin et Aix-les-Bains en font notamment partie. Ces groupes de travail ont pour vocation de cibler les zones géographiques, pas uniquement les quartiers par ailleurs, où la délinquance habituelle sévit. A Chambéry, où le procureur Pierre-Yves Michau a relancé le dispositif, facilité par l’arrivée d’une chargée de mission, plusieurs secteurs sont concernés ; les Hauts de Chambéry, Bissy, le Biollay, le centre-ville, tout comme Mérande ou Joppet. « Le GLTD s’appuie sur les constatations des veilles territoriales mises en œuvre par les groupes de travail de prévention de la délinquance », détaille le magistrat, « car il s’inscrit dans une démarche de répression des fauteurs de trouble, en étant au plus près du terrain, quartier par quartier, là où les manifestations de délinquance sont les plus caractérisées. » Prenons l’exemple de riverains faisant remonter de régulières difficultés dans leur hall d’immeuble, ou aux alentours de leur domicile, la coopération de l’ensemble des services permet d’appréhender les personnes concernées, remises aux services de police et de justice pour que leur soit appliquée la réponse pénale « adaptée et personnalisée » selon l’un des principes moteurs de la justice française, la personnalisation de la peine. L’objectif final poursuivi, « est que la tranquillité publique de tous, ne soit plus perturbée par quelques-uns dans les quartiers. » explique le procureur. 

La municipalité, partie prenante des GLTD 

En sa qualité de premier magistrat de la ville, Thierry Repentin est naturellement impliqué dans le dispositif GLTD, ce qui améliore son efficacité, et qui facilite la fluidité des échanges avec la police nationale et municipale, et les services du Parquet. Un outil nécessaire pour le maire de Chambéry, qui voit dans cette coordination la clé d’une réussite pour préserver la tranquillité publique de la cité des ducs. « Chambéry, comme beaucoup de villes en France, souffre d’actes de délinquance : cela génère un sentiment d’insécurité, voire parfois d’impuissance, chez les habitants. La Ville participe au côté de l’Etat à maintenir l’ordre public dans une approche partenariale et de proximité », souligne Thierry Repentin. « Participer à ce GLTD piloté par le procureur nous permet de croiser les informations avec nos partenaires pour suivre les situations individuelles et agir plus efficacement et de manière plus précise concernant les auteurs d’actes de délinquance. » Pour lui, impossible de passer outre la coordination, souhaitable, entre les différents services qui participent à ces groupes de travail, compte tenu des enjeux pour les habitants. D’autant plus que « Chambéry est une ville à taille humaine, c’est une chance aussi pour la sécurité et la tranquillité publique. La Ville, grâce à sa présence dans les quartiers, ses élus et services de terrain, sa police municipale, qui mènent un travail de proximité, et ses nombreux partenaires de prévention, connait les situations individuelles, les actes perpétrés et leur impact sur les habitants rue par rue. Nous pouvons donc alerter en amont, mener un travail de prévention, et pour les mineurs agir en lien avec les familles. » La commune peut aussi s’appuyer sur les bailleurs et médiateurs sociaux qui mettent également leurs services à contribution pour parvenir à un travail collectif efficace. 
Pierre-Yves Michau souhaite pouvoir réunir ces groupes de façon récurrente, pour trouver identifier les difficultés recensées et trouver des solutions rapides et efficaces, grâce à l’arsenal des réponses pénales qu’il a à sa disposition. Il peut par ailleurs, compter sur la mise en place d’autres initiatives de la ville de Chambéry, pour lutter contre la délinquance, que détaille Thierry Repentin : « Nous menons depuis septembre, en lien avec la Direction Départementale de la Sécurité Publique (DDSP), des ateliers de tranquillité de proximité avec les habitants », détaille-t-il, « qui permettent de mieux cibler les lieux impactés par la délinquance, et d’ajuster les consignes de patrouille des policiers nationaux et municipaux. Nous voterons également au prochain conseil municipal le renforcement des médiateurs de nuit dans différents quartiers de Chambéry. Enfin, la Ville implique et responsabilise les parents dans le cadre du Conseil pour les Droits et Devoirs des Familles (CDDF). » Un corollaire aux GLTD tout à fait opportun.

Le retour en grâce de la police de proximité 

Bien entendu, ces dispositifs sont par définition temporaires, « bien qu’ils s’inscrivent dans la durée, car il toujours compliqué de les voir disparaître totalement », reconnaît Pierre-Yves Michau. Certaines périodes sont plus ou moins calmes, comme l’a également constaté Julien Duhamel, commissaire divisionnaire de Chambéry. Après avoir vu disparaître la police de proximité sous le mandat de Nicolas Sarkozy, Julien Duhamel rappelle que les missions de police de proximité, bien que l’apanage de certains services spécialisés faisant également de la prévention, sont aujourd’hui le quotidien de l’ensemble des agents de police nationale. « Cela permet de mieux connaître les problématiques locales », précise-t-il, « ce n’est plus cantonné à certains quartiers sensibles, il n’y a pas que les cités qui sont concernées par ces besoins. » Les GLTD font partie de ces palettes d’outils mis à disposition des services de police et de justice pour ramener la tranquillité là où elle avait peine à se maintenir, parfois. « On cherche à renforcer le lien entre la police et les habitants, et les GLTD sont une façon d’institutionnaliser ce que nous faisions avant », relève-t-il, « cela est d’ailleurs facilité avec les contacts noués avec la mairie, les bailleurs, la PJJ et les transporteurs, par exemple. Nous voulons vraiment poursuivre cet objectif de tranquillité publique pour éviter que les comportements nuisibles de certains pourrissent la qualité de vie, y compris en dehors des cités. » En se regroupant, en coordonnant leurs informations et leurs actions, l’ensemble des acteurs de ces GLTD démontrent que la coopération est bénéfique, quand elle est possible. « C’est au bon vouloir local », souligne le commissaire Duhamel, « il est arrivé que les gens ne se parlent pas du tout entre services. C’est un bon outil, et c’est bien que cela se refasse. Quand cela s’était arrêté, les générations avaient grandi, les choses s’étaient calmées. Avec les équipes actuelles [municipale et au Parquet NDLR], il est possible de remettre les choses en marche. Nous faisons beaucoup de prévention, pour faire comprendre ce que nous faisons aux habitants, et rapprocher Police et la population. » conclut-il. Une première étape que cette réunion d’avril, au-delà des desiderata de la Chancellerie, un travail de terrain concret pour que justice, police et ville, démontrent leur engagement au service de la population. A suivre. 

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