Humoriste, chroniqueur chez Cyril Hanouna, acteur, bientôt réalisateur, Booder s’est multiplié au fil des années. De ses premiers pas à la galère du RSA jusqu’à sa renaissance, le voici de nouveau sur scène pour se raconter avec sensibilité et respect pour un parcours chaotique. Le 4 septembre, il se présentera sur la scène de l’espace Bellevarde. « Booder is back », c’est lui, tout craché.
A l’heure, affable, Booder, de son vrai nom Mohamed Benyamna, même si son emploi du temps chargé le contraint, fait preuve d’une grande disponibilité. Dans cinq jours, à 20h, il se donnera sans compter sur la scène de l’espace Bellevarde à Challes-les-Eaux. Un peu d’humour pour entamer une saison culturelle que l’on escompte plus généreuse que la précédente, tronquée, rognée dans son expression par un virus pas si quelconque. Tiens, d’ailleurs, avec Booder, il n’en a pas été question. Rien que pour cela, cet entretien avait quelque chose de rafraîchissant. Rencontre.
Booder, une première chose puisque nous sommes de la même génération : comment en êtes-vous arrivé à devenir fan du footballeur marocain Aziz Bouderbala*, duquel est tiré votre nom de scène ?
« Il jouait au Matra Racing puis à Lyon, mais je l’avais découvert lors du mondial 86 au Mexique. J’étais fan. Sur mon maillot, je voulais écrire son nom mais je n’avais pas la place. Je me suis contenté d’écrire Booder. Ça m’a collé, on m’a toujours appelé comme ça depuis.
Avez-vous pu le rencontrer ?
On est très potes, en fait. Il a été touché par cette histoire et moi de savoir que ses enfants sont aujourd’hui fans de moi. A ma connaissance, il est toujours dans le foot marocain, à la Fédération.
Jeune, vous étiez parti pour devenir footballeur…
Je ne vivais même que pour ça, dès que j’avais une minute à moi, avec ma bande de potes, on faisait des matches inter-quartiers, c’était notre passe-temps favori. Petit en taille, je n’avais pas accès aux jeunes de mon âge, j’ai joué sous une fausse licence et à 12 ans, j’évoluais avec les 8 ans. Le PSG m’avait repéré pour intégrer son centre de formation. Mais quand le coach leur a dit qu’en réalité, j’avais 12 ans…
Revenons à votre spectacle, est-ce la première fois que vous venez jouer en Savoie ?
Je suis déjà venu présenter des films, j’ai joué à la Toussuire, ce doit déjà être en Savoie… A Grenoble, aussi… euh, c’est en Savoie, Grenoble ?
En Isère.
Ouais, je suis donc déjà venu dans le coin, quoi (rires).
Votre spectacle parle surtout de vous…
Surtout sur ce qu’il se passait dans ma chambre d’enfant, je raconte ma vie depuis ma chambre, je me livre beaucoup sur ma vie personnelle ; mes déboires, mon premier spectacle, mes inquiétudes de père, sur la société actuelle, cette société d’apparence, la culture du beau, etc. Mais avec légèreté, surtout. Le maître mot de « Booder is back », c’est le vivre ensemble.
Vous avez évoqué vos déboires…
Oui, lors de mes premières tournées, à partir de 2001, on n’est pas tout de suite devant une salle comble, parfois, tu te retrouves à jouer dans des hôtels. J’ai joué le même spectacle pendant 4 ou 5 ans, ce n’était pas tout rose.
Vous n’avez pas de regret, sur cette période ?
Non, c’est de l’expérience, ce n’est jamais mauvais, à condition que l’on ne répète pas les mêmes erreurs.
Vous avez, depuis, joué dans beaucoup de pays – en Suisse, en Belgique, en Algérie… – et même en prison ; comment avez-vous vécu cette expérience-là ?
J’en parle sur scène, donc je ne peux pas tout spoiler mais c’était rigolo. J’essaie toujours de faire abstraction du lieu quand je suis sur scène. Je ne demande jamais pourquoi ils sont arrivés là, je ne suis pas juge d’instruction. Je joue dans des centrales, il n’y a que des longues peines, de toute façon.
Ça doit interpeller, tout de même, de se retrouver dans un tel environnement…
Vous savez, on me le propose, ça ne me dérange pas. Les échanges sont rapides. Ça se fait dans le cadre d’ateliers-théâtre, c’est comme ça que des artistes peuvent venir jouer en prison.
Autre événement majeur, dans votre vie, la paternité, alors même que vous étiez au RSA**.
Alors là, tu vois le monde autrement, tu deviens attentif à plein de choses. Être père te donne une bonne raison de devenir adulte, tu es responsable d’un petit homme, c’est pas rien, hein ! Je m’efforce d’être un papa cool, de répondre à toutes ses questions. Je suis pleinement concentré sur ce petit humain.
Ce fut une source d’inspiration pour vous ?
Carrément ! La paternité apporte son lot de situations burlesques et drôles. C’est par exemple toujours marrant de voir un enfant poser des questions et ne pas pouvoir y répondre.
Parmi vos nombreuses activités, vous vous êtes lancé tôt dans le cinéma. En faire un sur votre vie, après avoir écrit votre autobiographie, ça aurait du sens, non ?
C’est déjà dans le four ! J’ai eu une vie trépidante avec beaucoup d’obstacles. Pour le moment, je suis en train de travailler dessus. Je dois d’abord finir un long métrage que je co-réalise. On attend le bon moment.
Et vous parvenez à tout concilier ?
C’est mon boulot. On peut penser le contraire mais si, c’est vraiment du travail, je dois avoir un vrai emploi du temps. J’ai trop bien connu ces moments où les choses allaient moins bien pour moi alors je suis blindé. Les projets, il faut tous les mener à fond.
Vous vous sentez aussi à l’aise au théâtre, dans le registre de l’humour ou dans le cinéma ?
Ce sont des kiffs différents. Sur scène, au théâtre*** on casse le quatrième mur, on est face au public. On vit la chose dans l’instant, tu n’as pas le droit à l’erreur. J’ai kiffé l’exercice. Quant au cinéma, c’est quelque chose qui ne nous appartient plus, une fois qu’on a tourné nos scènes, le reste n’est plus de notre ressort. Ce sont vraiment deux sensations différentes. J’essaie d’être un touche-à-tout.
Et puis il y a cette autobiographie, « un bout d’air »…
Il fallait que je me raconte. Je l’ai fait pendant le premier confinement. J’ai proposé ça à des maisons d’édition, ça a été accepté. En fait, ma vie ne pouvait pas être racontée par quelqu’un d’autre que moi.
Ce livre vous a-t-il fait du bien ?
Oui, quand le manuscrit arrive chez toi, quand on te demande de le dédicacer, ça fait vraiment quelque chose. J’ai voulu qu’il soit léger, il a apparemment été plutôt bien accepté par le public****. C’est une histoire positive au final.
Vous aviez un modèle avant de monter sur scène pour la première fois ?
Louis de Funès ! Mais je pourrais ajouter Pierre Richard, Jacques Villeret, Pierre Mondy… Des films comme la 7e compagnie, c’est une madeleine de Proust, ça me rappelle ces soirées en famille où on se retrouvait tous devant un bon Louis de Funès.
Dernière question, on vous avait connu avec le bonnet blanc, le chapeau, quel sera votre prochain couvre-chef ?
Je ne sais pas, je n’y ai pas pensé… Attends, disons, le haut-de-forme, voilà. Ça me paraît pas mal, ça, le haut-de-forme «.
« Booder is back », espace Bellevarde, le samedi 4 septembre, à 20h. Plus d’infos : www.ville-challesleseaux.fr/evenements/booder-is-back
* Il a également été élu meilleur joueur de la Coupe d’Afrique des nations en 1986 et en 1988. Il a par ailleurs reçu la distinction de Légende du football marocain en 2017.
** Il venait alors de tourner « Beur sur la ville », un film qui aurait peiné à trouver son public. S’ensuivront deux années de galères. « Je me retrouve au RSA et puis, j’ai mon gamin qui arrive au monde. Mais pareil, je positive, je repars de plus belle, je me dis : ‘Non, il faut payer les couches, il faut y aller, il faut écrire, » confie-t-il à France Info.
*** Il a joué dans la pièce « la Grande évasion », en 2017.
**** Son livre « un Bout d’air » se serait déjà vendu à 10 000 exemplaires.
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