La Motte-Servolex : la saison culturelle commence par Ben

Commencer une saison culturelle par un coup de maître, c’est peu de dire que la Conciergerie a réussi : en mettant l’œuvre de Ben Vautier à l’honneur la veille de la 14e édition de la Nuit de la création, la galerie d’art contemporain dirigée par Serge Heliès assoit un peu plus son statut de référence en matière d’arts dans le bassin chambérien. Bien plus, La Motte-Servolex bénéficie elle aussi du rayonnement d’une telle exposition et en fait cadeau à ses habitants, « car la culture est essentielle par nature » , pour le maire, Luc Berthoud.

Ecrire pour entrevoir l’horizon ?

Il l’avait déjà signée la ligne d’horizon, en 1962 à Nice, Ben Vautier. C’est sa fille Eva, également commissaire de l’exposition et agent de l’artiste, qui a pensé que ce point de départ serait idéal, pour tourner la page d’une période si incertaine. Alors, comme pour conjurer le mauvais sort qui a été réservé à la culture durant près d’un an et demi de crise sanitaire, il s’agira de voir « L’art à l’horizon » comme un espoir, peut-être, des questionnements, sûrement.Œuvres historiques de Ben, inédites pour l’occasion, mais également œuvres de dix artistes faisant partie de la galerie niçoise des Vautier, telle est la vision qui attend les curieux, que l’on imagine venir du monde entier pour cette expo exceptionnelle pour une ville de la taille de La Motte-Servolex. Tout est donc possible si l’on ose, et Serge Heliès a osé. D’abord par téléphone, puis de visu, le directeur artistique de la Conciergerie s’est accroché à ce projet, en dépit de la situation incertaine que vivait le pays. A Nice, dans la maison-atelier de l’artiste, Serge Heliès a attrapé Ben au vol, au travers d’images exclusives qui seront montées et retransmises au public durant l’exposition. « C’est artiste qui écrit sans cesse, entouré de son propre univers », explique-t-il, « très préoccupé par les questions de l’ego et de l’art. L’ego est un thème central, tout comme le sont les ethnies du monde entier. Il est toujours foisonnant, très demandé dans le monde entier et s’interroge sans arrêt à propos de tout, tout le temps. » Une chance donc, aux yeux de Luc Berthoud, d’avoir réussi à organiser cette exposition dans sa commune. « Il n’y a rien de plus gratifiant que d’être ouvert à la culture », souligne l’édile, qui ajoute « la culture est un droit parce qu’elle est facteur d’épanouissement et de développement humain. Elle est également le terreau sur lequel une communauté peut et doit se construire. »  Un état d’esprit qui n’a fait que se renforcer à La Motte-Servolex, qui avait déjà signé un grand retour en juin dernier, à la sortie du confinement, où pour l’expo « to be continued » , le maire avait déjà exprimé son amour pour la culture, tout heureux de lui offrir un déconfinement bienvenu.

Des écritures signées jusqu’à l’Ecole de Nice

Ce que le jeune public ne sait pas de Ben, c’est que son art a démarré très tôt, dans les années 1950, où sa boutique niçoise devient un lieu de rencontres et d’expositions, réunissant les membres fondateurs de l’Ecole de Nice, César, Martial Raysse et Arman. Les années 1950 sont le point de départ d’une histoire d’art fulgurante et fantasque, sous le mantra « l’art doit être nouveau et apporter un choc » dont Ben Vautier ne se départira plus jamais. Dans le sérail d’Yves Klein, Ben crée sa propre « signature », mettant sur le carreau tous les faussaires qui tentent de s’emparer de son âme artistique. De voyages en rencontres, Ben ne cesse d’expérimenter et de s’entourer de ses pairs, de découvrir et de créer, de soutenir ses plus jeunes confrères et de marquer de son empreinte plusieurs générations. Ses « écritures » démarrent dès 1953 « il faut manger, il faut dormir » et apparaissent depuis familières, sur tous les supports possible, mêlant dérision, humour et philosophie dans la droite lignée du mouvement Fluxus auquel Ben a participé dès 1962. Ce parcours prolifique sera donc à l’honneur à la Conciergerie, au milieu d’œuvres de contemporains, tels que Viallat et les nouveaux réalistes au travers de sculptures et de toiles qui toutes se rejoindront autour du thème de l’horizon. Un sujet aux mille questionnements, qui ouvre plusieurs voies : l’horizon est infini et se dérobe sans arrêt, et ce n’est pas cette période qui fera mentir cette réflexion. Bien ancré dans son univers tout en gardant les yeux rivés vers l’extérieur, « Ben a les deux mains dans la vie », précise Eve Poinsard, responsable du spectacle vivant et de l’art contemporain à La Motte, « c’est un érudit, un autodidacte qui joue avec les mots et se montre sous des airs faussement méchants. C’est ce que nous souhaitions proposer au public, de remettre les mains dans la vie, avec notre programmation. »

Une programmation culturelle poétique, onirique, presque magique

Des écritures à la poésie il n’y a qu’un pas que Ben franchit aisément, tout comme la programmation culturelle motteraine pensée cette saison en deux temps « automne/hiver » et « printemps/été », s’adaptant aux aléas déjà bien connus des programmations et déprogrammations en chaîne de ces derniers mois. Pour chasser la morosité, rien de tel qu’une pointe d’onirisme et de magie, c’est donc à cette image qu’a été pensée la saison automnale. Après le vernissage de l’exposition, sans doute en présence de l’artiste, ce qui reste à confirmer, s’ouvrira une nuit blanche dédiée à l’art contemporain, « ce qui permet de sortir l’art contemporain des murs et de le mêler à la vie du chaland », nous explique Eve Poinsard. Pour ce faire, arts numériques croiseront le dessin participatif en live, à partir des smartphones des visiteurs et habitants.
De même, la vidéo aura toute sa place avec la diffusion de reportages d’Arte sur l’alliage de l’art contemporain et de l’écologie, pour imaginer un futur acceptable, ainsi que des interviews d’artistes. Enfin, entre autres surprises, une danseuse s’envolera sur ses ailes lumineuses dans « la poésie de la nuit », l’une des meilleures façons d’« amener les gens à sortir de la torpeur », selon la programmatrice. De l’affiche aux accents Mucha, jusqu’à la poésie d’Amélie-les-crayons et le dialogue musical des voix de Nina Lisa, tout a été mis en œuvre pour redonner au public « le goût des choses ».Saison culturelle La Motte-Servolex Automne-Hiver 21/22Exposition « L’art à l’horizon », BEN et ses invités à la Conciergerie – Vernissage le 1er octobre 2021Plus de renseignements sur www.mairie-lamotteservolex.fr et plus d’images La Conciergerie – Espace dédié à l’art contemporain (conciergerie-art.com)