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Has’ART’dez-vous ! à Aix-les-Bains : recherche Charles désespérément…

Par Jérôme Bois • Publié le 06/10/21

Ce pourrait être la belle histoire de cette 7e édition de Has’ART’dez-vous !, qui démarre samedi 9 octobre, à une condition, que l’artiste-mystère se manifeste. Et ce ne sera pas simple. Dès samedi, James 2 Aix exposera deux œuvres à Pianissimo, rue de Savoie. Deux œuvres qui lui ressemblent, avec ce rendu béton qu’il affectionne, devenue marque de fabrique. Sauf qu’elles ne sont pas qu’à lui. Et l’artiste aixois espère qu’à travers l’événement et cette exposition, Charles, l’auteur des créations originales se manifestera. Ce ne sera pas simple car Charles est SDF…

Avouez qu’elle aurait de la gueule cette histoire si, à l’instar des meilleures « rom coms » britanniques, le happy end était de rigueur. Le dénouement de l’affaire ne sera pas facilement obtenu parce que Charles n’apparaît plus sur les radars, et pour cause, Charles est SDF…

James Amé et Paul Macari

Charles, si tu nous lis…

Pour comprendre, il faut remonter à janvier 2021 ; la villa Carmen recevait deux artistes, Matt B et James 2 Aix, en vue de réaliser une fresque murale avec Totoro pour modèle. Dans les locaux, des personnes, à la rue, en souffrance, venant chercher quelque réconfort au plus fort des frimas. Et parmi eux, un homme, Charles. La suite, c’est James qui la raconte : « Parmi tous les gens qui étaient dans la maison le jour de l’inauguration de la fresque, un homme avait recouvert les murs avec ses œuvres à lui » , des œuvres dépouillées, des découpages sur du contreplaqué à la finition imparfaite mais faisant montre d’un doigté certain. « Il y avait De Funès, des Harley, plein de personnages et puis là, il m’en offre une. Sur le coup, je lui réponds que oui, j’accepte, à condition que je puisse la re-designer à ma façon. J’en prends même deux, il accepte ». Là dessus, James se met au travail. Charles avait utilisé une scie à chantourner, ce qui lui a permis de découper d’infimes petites surfaces pour signifier les ombres des formes et des visages, le résultat est forcément bluffant, le rendu en trois dimensions affole par la minutie du trait. « Ses réalisations premières n’étaient toutefois pas tout à fait finies, je les ai reprises et repeintes en imitation béton. Un ami s’est chargé de me les encadrer ». Un travail d’orfèvre dont Charles ignore tout. « Pour lui, ce n’était au départ qu’un loisir » , se souvient James, très désireux de le retrouver. « On l’a cherché, je me suis adressé aux responsables de la villa Carmen, puis je suis allé jusqu’à chercher à Chambéry, en vain ». Car l’artiste avait déjà filé, rappelé par la rue.

« James, c’est un copain »

Arrive Has’ART’dez-vous !, rendez-vous inscrit à l’encre indélébile dans l’agenda aixois, James a en tête d’exposer, à Pianissimo, chez Pierre et Paul Macari, facteurs de pianos depuis 1982. Mais pas question d’exposer sans son « binôme ». « J’ai voulu l’inscrire mais en tant que sans abri, il peut être aujourd’hui n’importe où ». Son espoir, désormais, que Charles ait vent de cette 7e édition, de l’exposition, de la présence de James, ou au pire, qu’il passe devant la vitre de Pianissimo par hasard, « parce que ce projet, c’est avec lui et je veux qu’il en soit ». Les œuvres étant à vendre, l’argent serait alors partagé. « Au départ, il était super intéressé » , rembobine James. Ce serait la belle histoire d’Has’ART’dez-vous ! « J’adorerais capter son étonnement, j’aimerais vraiment que ça se passe, le voir dans la rue se retourner après avoir reconnu ses œuvres » , confesse de son côté Paul Macari, gérant des lieux. Les Beatles, d’un côté, Billie Holliday de l’autre, les deux compositions siéent à merveille dans l’univers des Macari père et fils, acteurs de l’opération pour la première fois. « Je suis content parce qu’on y participe avec un copain » , sourit Paul, « et puis j’aime l’aspect technique de ces deux créations ». « Les artistes font la démarche auprès des commerçants, j’avais essayé les grandes enseignes, elles ont des chartes à respecter » , précise James. « C’est lui qui m’a décidé » , reprend Paul, « je n’avais jamais été sollicité parce qu’on était atelier, pas vraiment commerce, jusqu’à présent. Ce n’est que depuis moins d’un an que nous vendons des pianos, que nous ne nous contentons pas de les créer ou de les réparer ». Au-delà de l’opération culturelle annuelle, Paul avait l’habitude de faire l’événement en organisant au pied levé des concerts inopinés, des expositions, des vernissages pour des artistes locaux et d’ailleurs, l’initiative de la mairie faisait donc sens. « On fait l’effort de faire venir les gens par ici, notamment les mercredis et samedis, lorsqu’avec le marché, la rue devient semi-piétonne ».Si l’attention des passants, rue de Savoie, est captée, peut-être que celle de Charles le sera, peut-être qu’une histoire vraie, comme les plus belles fictions, aboutira à un happy end de toutes les mémoires.
Has’ART’dez-vous du 9 au 30 octobre. Pour la 7e année consécutive, Aix-les-Bains se transforme en galerie d’art urbaine vivante durant 3 semaines avec l’événement « Has’ART’dez-vous ! ». Les œuvres de 89 artistes régionaux seront exposées dans les vitrines des commerces du centre-ville du 9 au 30 octobre.

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