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Chambéry : la protection judiciaire de la jeunesse, active bien que silencieuse et méconnue
Par Jérôme Bois • Publié le 19/11/21
Parce que la justice française avait grand besoin d’une vaste introspection, le président de la République avait lancé, en octobre dernier, les états généraux de la justice, censés démarrer en juin, à l’origine. Jusqu’en février 2022, une série d’événements en ce sens seront structurés en quatre étapes, une phase consultative, d’expertise, de convergence et de synthèse/proposition. Dans ce cadre et pour répondre à la première phase, les directions interrégionales de la protection judiciaire de la jeunesse, organe essentiel dans le fonctionnement de la justice des mineurs, ont ouvert leurs portes en simultané, le 17 novembre.
« Dresser un état de la situation de la Justice dans notre pays et formuler des propositions concrètes pour mettre la Justice au centre du débat démocratique ». Voilà, en une phrase, l’objectif poursuivi par le président de la République au moment de lancer les états généraux de la justice, le 18 octobre dernier, une véritable remise à plat d’un système de justice en quête de modernisation et d’efficacité. Raillée, contestée mais surtout alertant depuis de nombreuses années les chefs d’Etat sur le besoin de moyens suffisants pour s’exercer sereinement, la justice française a besoin de renouveau.
C’est peu dire que les professionnels n’ont que peu goûté à cette grand-messe organisée en fin de mandat, sans en avoir été informés au préalable. Avec dans le même trait de temps, une réforme en profondeur de la justice des mineurs et de l’Ordonnance de 1945, aboutissant à un code de justice des mineurs flambant neuf, c’est dans une ambiance morose – voire de défit envers le gouvernement – qu’ont démarré ces états généraux avec pour objet d’aboutir à des propositions très concrètes.
La consultation s’est donc ouverte voici un mois, auprès de toutes les composantes de la justice (magistrats, fonctionnaires, contractuels) ainsi qu’auprès des élus, citoyens et partenaires, institutionnels et associatifs. Chacun peut ainsi formuler un avis, les contributions individuelles pouvant être recueillies sur le site parlonsjustice.fr pour servir de base de travail pour les prochaines phases.
De nouveaux locaux pour un meilleur accueil des jeunes en difficulté
A Chambéry, comme partout en France, la direction interrégionale de la protection judiciaire de la jeunesse a dès lors ouvert ses portes, mercredi 17 novembre. En Savoie, la DT PJJ, dirigée par Danièle Burel, était concernée à plus d’un titre par cette journée-événement puisqu’elle révélait ses nouveaux locaux de la rue Amiral Gérard-Daille, l’une des deux unités éducatives de milieu ouvert (UEMO) du service territorial éducatif de milieu ouvert (le STEMO, dirigé par Audrey Chol) avec l’établissement albervillois. Des locaux flambant neufs, comprenant bureaux, salles d’activités (arts plastiques, relaxation, ateliers jardin et bois…), salles de réunion et d’entretien, accueillant notamment une psychologue pour ses consultations, l’ensemble se révélant un endroit spacieux, opérationnel et agréable. Sur les murs étaient visibles les différents travaux des jeunes encadrés par la PJJ avec le concours d’artistes, dont certains avaient précédemment été exposés au sein du Palais de Justice de Chambéry.
Toujours plus proche de sa mission d’éducation, la DTPJJ de Savoie proposait dès l’entrée de ses locaux une exposition – également disponible en version numérique – régulièrement présentée dans les établissements scolaires : au menu, des thématiques sur les droits et devoirs dans tous les sujets qui émaillent le quotidien de la jeunesse, public de la structure. Harcèlement, conduite automobile, relations sexuelles, viol, addictions, apologie du terrorisme, injures, menaces, notamment au travers des réseaux sociaux.. tant de choses assaisonnant si mal le quotidien des mineurs et justifiant des réponses éclairées et éclairantes.
Une table ronde était également organisée à la mi-journée, entre intervenants du service et extérieurs, devant déboucher sur des préconisations utiles à l’adresse du ministère de la Justice.
La DT PJJ, rouage essentiel de la justice des mineurs
Injustement méconnue du grand public, qu’il s’agisse de ses missions ou de ses locaux, la PJJ – nouvelle appellation de l’éducation surveillée, créée en 1945, depuis 1990 – a pourtant une mission essentielle auprès de la jeunesse, celle d’effectuer des missions de prévention, d’éducation et d’insertion en faveur des jeunes sous mandat judiciaire, pénal ou civil, et de leurs familles.
Elle est également une aide aux magistrats à l’heure de prendre des mesures « d’investigation », visant à évaluer leur personnalité et leur situation. Elle prend enfin en charge les mineurs qui lui sont confiés dans ses services, comme les deux UEMO de Savoie. Aujourd’hui, plus de la moitié (52%) des jeunes suivis par la PJJ sont en milieu ouvert. Ils sont alors accompagnés par un éducateur référent pour les guider vers leur réinsertion à la fois sociale et professionnelle, tandis 4% sont placés en foyer, en famille d’accueil ou en centre éducatif. Les 44% restants font l’objet de mesures d’investigation, l’ensemble de ces jeunes étant confiés à la PJJ par un juge des enfants lorsque des actes jugés très sérieux ont été commis.
Un travail de l’ombre qui prend le contre-pied d’une idée reçue qui a la dent dure, qu’il n’existe pas de justice efficace pour les jeunes. Vous ne la voyez seulement pas agir…
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