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Bien-être animal : que font concrètement nos communes au quotidien ?

Par Jérôme Bois • Publié le 29/03/22

La condition animale avait besoin de revenir sur le devant de la scène locale, à travers une visioconférence co-organisée par Sabrina Haerinck, conseillère municipale de Chambéry et Nicolas Poilleux, adjoint au maire à Aix-les-Bains. Sujet mis sur la touche, au même titre que la jeunesse, les quartiers populaires ou même l’écologie, il fait l’objet, pourtant, de nombreuses décisions fortes dans nos communes, décisions qui n’ont l’air de rien mais qui témoignent d’une vraie avancée en matière de protection du vivant.

Ils étaient une trentaine à s’enquérir des progrès faits par les communes des bassins de Chambéry et d’Aix-les-Bains en matière de condition animale, parmi lesquels quatre élus, de Chambéry, donc, d’Aix, du Bourget-du-Lac et de Barberaz. Un temps d’échange devenu coutumier pour rendre compte de tous les petits actes du quotidien visant à défendre l’écosystème.

Un écocirque à Aix-les-Bains

L’écocirque Bouglione, à Aix cet été

Premier de cordée, au petit jeu du « qui fait quoi », Nicolas Poilleux, s’il ne se reconnaît pas comme spécialiste de cette cause, n’était pas avare de choses à dire. Et pour lui, quoi de plus parlant que l’écocirque d’André-Joseph Bouglione, 100% humain, où les animaux n’apparaissent que sous forme d’hologrammes créés de façon totalement artificielle ? Il faut en effet se souvenir qu’en octobre 2021, une loi sur le bien-être animal était âprement discutée à l’Assemblée nationale et au Sénat, une discussion qui accouchera de la loi contre la maltraitance animale, promulguée le 30 novembre et dont un article prévoit la fin des animaux sauvages dans les cirques itinérants pour 2028. Montpellier avait été précurseur en recevant cet écocirque lors du dernier trimestre 2021. « Nous sommes la troisième ville à le faire » , se réjouissait Nicolas Poilleux. Sandrine Bouglione avait justifié ce choix d’un cirque sans animaux avant même la promulgation d’une loi ainsi : « Les enfants ne veulent plus voir d’animaux captifs, ils sont gênés. Et alors que le cirque est un moment familial, traditionnel, le premier spectacle vivant, là ils n’ont plus envie de revenir, c’est la destruction de la magie… Donc on s’est dit que si on ne se réformait pas de nous-mêmes, on finirait par tomber en désuétude ». Malgré la solide opposition d’un milieu naturellement attaché à la présence d’animaux sauvages dans ses enceintes, les Bouglione ont imposé leur vision et Aix en profitera l’été prochain. Autre initiative prise par la municipalité aixoise et en particulier par Renaud Beretti, « grand fan de chats » , la pose de panneaux pour prévenir de la présence d’animaux sauvages en certains points de la cité, notamment boulevard de la Roche-du-Roi, avec le concours de l’association justice animaux Savoie (Ajas) dans le cadre d’une campagne de sensibilisation lancée en août 2020. « Aix avait été la première à répondre à la sollicitation de l’Ajas » , soulignait Caroline, trésorière de l’association, une ville à tel point engagée dans ce combat qu’elle accueillera la 2e édition de la fête des animaux, le 21 mai prochain. Une manifestation sans animaux, faut-il le préciser, aux objectifs multiples : parler de la cause animale, mettre en avant les associations et des acteurs de la protection animale et du bien-être animal, fédérer les associations de protection animale autour d’un même projet et sensibiliser les habitants et leur faire découvrir des associations locales qu’ils ne connaissent peut-être pas.

Les membres de l’Ajas avaient participé à la pose de panneaux dans la ville d’Aix-les-Bains

Plus de menus végétariens à la cantine

D’autres communes étaient représentées, parmi lesquelles La Ravoire, par la voix de Pauline Di Nicolantonio, à l’origine d’un atelier thématique mené par le groupe Ecoexistons La Ravoire (lire notre article du 12 avril 2021). « Nous avions émis des propositions sur le bien-être animal qui avaient été remises au maire. En ce qui concerne l’alternative végétarienne quotidienne dans les cantines scolaires, c’est bien le maire qui a la main » puisque c’est lui qui lance les appels d’offre pour la restauration scolaire. « L’alternative végétarienne, on y viendra » , concédait Nicolas Poilleux, « nous avons un prestataire, actuellement, Lestroy, localisé en Chautagne qui propose des menus alternatifs et qui travaille en circuits courts pour consommer différemment et mieux ». Lestroy se définit elle-même comme restauration scolaire eco-responsable. Trialp, le service de collecte des déchets, effectue une partie de son ramassage des cartons avec des chevaux depuis plusieurs années*, « nous veillons, à travers le cahier des charges fixé, que ces animaux soient bien traités » , insistait l’élu aixois. Jean-Pierre Tissinié, conseiller municipal à Barberaz, délégué au cadre de vie, aux travaux et à l’urbanisme, reconnaissait, lui, un travail effectué avec la ligue de protection des oiseaux (LPO) pour la protection des nids lors des taillages de haies. « Nous avons installé des hôtels à insectes et proposons des repas végétariens sur deux jours, à la cantine scolaire » , indiquait-il. Sur le plan – éminemment délicat – de la chasse, la ville a obtenu de l’unique association de chasseurs de faire du mercredi un jour non-chassé, remplacé par le jeudi. Des panneaux précisent les jours et les zones de chasse sur le territoire de la commune.

Une partie de Grand Chambéry crie au loup

Ainsi, dans chaque ville, une pierre à l’édifice. Parfois galet, parfois rocher et peu à peu, les consciences évoluent. Alors, lorsqu’au Bourget-du-Lac, la municipalité a été désignée (suite à l’appel à projet lancé par le Département) pour la mise en place d’un atlas de la biodiversité, c’est un grand pas en avant inspirant pour d’autres qui souhaiteraient faire de même (La Motte-Servolex avait déjà répondu avec succès à l’appel à projet). « Pour savoir où elle se trouve, pour mieux la prendre en compte » , résumait Céline Hirschowitz, conseillère municipale déléguée à la transition écologique et représentante de la commune à la Fédération nationale des communes forestières. Un nouvel appel à projet a été lancé le 17 mars, la ville de Chambéry compte figurer parmi les lauréats cette année (date limite de dépôt des dossiers le 15 avril). Mais au Bourget, on est allé un peu plus loin encore, en délimitant des zones de sénescence, où l’on ne récolte plus le bois. L’éclairage public est éteint la nuit et la lutte contre la renouée du Japon se fait par écopâturage.

Les collectes hippomobiles effectuées par Trialp

Restait à évoquer un gros morceau, sensible, la chasse. A la question de savoir quelles pouvaient être les marges de manœuvres des communes en matière de réglementation, Céline Hirschowitz répondit qu’il en était de la responsabilité de l’Etat et des préfectures uniquement. « On aimerait néanmoins traiter ce sujet conjointement avec Bourdeau et les communes du massif de l’Épine. Nous aimerions une demi-journée entière non chassée ». « A Chambéry, il n’y a pas d’espace de chasse » , reprit Sabrina Haerinck, « mais sur le territoire des Bauges, qui fait partie de Grand Chambéry » , on avait assisté à plusieurs attaques de loups, en 2021. Grand Chambéry avait alors émis, lors de la séance du 3 juin 2021 du conseil communautaire, un vœu de soutien aux éleveurs demandant aux représentants de l’Etat de prendre en compte la difficulté à protéger les troupeaux et de répondre à une carence juridique, puisque ces troupeaux n’entrent pas dans les possibles aides de l’Etat. A l’époque, de nombreux élus communautaires n’avaient pas pris part au vote. Philippe Gamen rappelait qu’il ne s’agissait pas « de prendre position pour ou contre le loup ». Il avait été adopté malgré tout. Chambéry toujours, à quelques encablures du terme de la délégation de service public portant sur la restauration scolaire, la ville a déjà manifesté son intérêt pour plus de bio, de produits locaux et de menus végétariens dans la renégociation qui aura lieu l’année prochaine pour la nouvelle DSP. Un tour d’horizon assez large, finalement, des différentes mesures prises çà et là en faveur du respect animal qui va dans le sens d’une opinion publique toujours plus sensible à cette cause. D’après l’Ifop lors d’un sondage publié le 23 février dernier pour la fondation Brigitte-Bardot, près de 86% des Français attendent que les candidats se positionnent très clairement sur la condition animale. 57% estimaient que cette cause serait de nature à influer sur leur vote le 10 avril prochain.

* A Chambéry, la collecte hippomobile ne concerne encore que les sapins en période de fêtes.

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