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Chambéry : pas d’augmentation du budget mobilités de Grand Chambéry avant une enquête-usagers de grande ampleur

Par Laura Campisano • Publié le 13/04/22

Élément central de la transition écologique, de lutte contre la pollution et donc de sauvegarde de l’environnement, la question des transports est incontournable. La compétence « mobilités » étant dévolue à l’agglomération, il appartenait donc à Grand Chambéry de se positionner sur son budget en la matière. Alors que certains élus souhaitaient une augmentation, ou tout au moins l’utilisation de 354 000 euros pour augmenter à très court terme la cadence et la fréquence des lignes de bus sur des communes en demande, Philippe Gamen a indiqué en séance du conseil communautaire du 7 avril dernier vouloir conduire au préalable une enquête auprès des usagers des bus, dans chaque commune de l’agglo, avant tout éventuel réexamen de la situation. 

Après le débat d’orientations budgétaires du conseil communautaire du 17 mars 2022, au cours duquel nombre de conseillers communautaires de la majorité se sont opposés à l’augmentation du budget mobilités, la ville de Chambéry a souhaité passer à l’action pour apporter des éléments tangibles des besoins exprimés par les habitants. C’est ainsi que le 30 mars, avant la séance de vote du budget du 7 avril, les services techniques, l’adjointe chargée des mobilités durables à Chambéry, Isabelle Dunod, et le conseiller municipal délégué aux mobilités mais également vice-président en charge de la mobilité à l’agglo, Alain Caraco, ont convié les habitants autour de la thématique des transports en commun. Cela n’aura pas suffi à obtenir une augmentation de budget pour pallier le manque de cadences sur certaines lignes, voire la remise en place de lignes supprimées au cours de l’exercice précédent dans certains quartiers. Mais cela aura tout au moins permis d’obtenir de Philippe Gamen la mise en place d’une grande enquête sur les usages et attentes des habitants de l’ensemble des communes de l’agglomération, et peut-être, qui sait, cela permettra-t-il de démontrer que ces besoins sont réels ?

Une nécessaire remise en question des comportements en matière de mobilité

Avec 10 millions de voyages par an, dont 8 millions sur les quatre lignes chrono A-B-C et D, le bus est un moyen privilégié de transport « doux » sur l’agglomération. Pourtant, comme tout est perfectible, il en va de même pour la cadence et l’amplitude horaire de ces transports qui pourraient drainer encore plus de voyageurs s’ils étaient plus fréquents en soirée la semaine, et le dimanche, par exemple. Deux autres groupes de lignes complémentaires sont également empruntées régulièrement, l’un hétérogène de 1 à 5, et un dernier groupe, constitué des lignes 11 à 19,scolaires ouvertes à tous. L’ensemble de ces lignes couvre les 38 communes du bassin chambérien depuis 2017, dont les 14 communes du cœur des Bauges, moyennant un contrat de délégation de service public avec Keolis et la SNCF d’un budget s’élevant à 23 millions d’euros en moyenne, afin de faire fonctionner le réseau. Pour comprendre le fonctionnement du réseau, encore faut-il avoir ces données, ainsi que la connaissance de ce que les recettes-voyageurs génèrent, soit 5,5 millions d’euros par an. A cela s’ajoute le versement mobilité employeur, indemnité versée par les employeurs de plus de 11 salariés. Cette contribution est le produit de l’ensemble des rémunérations soumises à cotisations de la Sécurité sociale et du taux de versement de 1,75 % à Grand Chambéry, lequel varie selon les zones géographiques et est réévalué deux fois par an. Le budget de 23 millions d’euros concerne le fonctionnement du réseau de bus, couvert pour moins d’un quart par la billetterie et pour trois quarts par le fameux versement mobilité, dont les principaux contributeurs locaux sont l’hôpital et la municipalité de Chambéry. En 2022, l’heure est au bilan après deux années de fréquentation en demi-teinte, bien que l’offre de service ait été maintenue durant le 1er confinement, sauf le soir. Cela n’a pas permis d’atteindre les 5,5 millions d’euros de recettes voyageurs attendues (2,2 millions) tandis qu’en 2021, 1,2 million d’euros de recettes voyageurs manquaient également à l’appel. Si l’on ajoute à cela la hausse des carburants, poste de dépense représentant 10% du budget de réseau de bus, la demande d’augmentation du budget mobilités à l’agglo afin d’obtenir une offre de services encore plus performante n’apparaît pas farfelue. Car la question des transports est loin d’être anecdotique compte tenu de la hausse du coût de l’énergie, de la pollution, du bruit… « Il y a urgence à changer nos comportements », expliquait Isabelle Dunod en préambule de la réunion du 30 mars dernier, « et une évolution à apporter à l’offre de transports en commun. Il ne s’agit pas d’une liste au père Noël que nous vous proposons d’ériger, mais de recenser, collectivement, les besoins de chacun. Comme vous le savez, la compétence » transports « relève de Grand Chambéry, et c’est au conseil communautaire que nous allons relayer les priorités et les urgences, car le vote du budget se tenant bientôt, il faut une volonté politique. »  A cette réunion, peu de participants mais suffisamment pour faire remonter des problématiques récurrentes : manque de cadences, manque de régularité, manque de dessertes dans certains quartiers comme les Monts, problème d’amplitude, notamment en soirée, absence de fiabilité des horaires, sans parler du manque de connaissance de l’offre existante, comme ont pu le constater les élus chambériens.

Divergence d’opinions jusqu’à une forme de consensus

Avant que les élus de la minorité ne déposent un amendement sur cette demande d’augmentation, Alexandre Gennaro volait au secours de la majorité communautaire : « Nous sommes tous conscients qu’il faut retravailler cette offre de mobilité », a-t-il démarré, « je rejoins le VP aux finances, il faut, avant de décider d’augmenter le budget aller voir toutes les communes, regarder quelles sont les marges de manœuvre en matière d’économie, pour avoir une photographie globale des besoins avant de remettre de l’argent de la collectivité. D’ici la fin d’année, nous pourrions avoir l’état des lieux sur la globalité du réseau avec les coûts ligne par ligne pour pouvoir avoir tous les scenarii avant le prochain vote de budget afin de pouvoir prendre une vraie décision. Rien n’est figé, c’est un souci d’équité, le travail doit être fait sur l’ensemble de l’agglo, pas uniquement sur certaines lignes choisies on ne sait comment. » 

Pas d’augmentation du budget mobilité lors du vote… pour le moment ?

Restait à Philippe Gamen à mettre ce budget au vote, non sans avoir à son tour tenté de rassurer les demandeurs : « J’ai entendu vos interventions sur le budget mobilités, et je le redis je n’ai pas une vision globale ni structurée dans ce qu’on me présente aujourd’hui, j’ai besoin d’y voir plus clair, j’entends un peu de tout chacun y va de son couplet, d’autres ont fait des réunions publiques avec très peu de personnes présentes, ça questionne : y a-t-il un vrai sujet finalement ? » a-t-il ironisé, avant de reprendre : « Je ne doute pas une minute que c’est un sujet. On entend aussi des associations ou des collectifs militants qui défendent des quartiers bien précis. Ce n’est pas cette visibilité-là qui permet de dire » oui, on va mettre encore plus que ce qu’on a prévu sur le budget mobilités «. Je suis bien convaincu qu’il y a une demande d’amélioration de cette offre et comme je m’y suis engagé suite à l’approbation du projet d’agglomération, je vais faire entamer cette tournée, secteur par secteur, pour écouter les maires sur l’ensemble des secteurs de l’agglomération et me forger ma propre opinion, en faire le retour auprès de l’exécutif, de manière à pouvoir arbitrer et prioriser. […] Nous avons de la marge, on pourrait faire des transferts certainement, mais je veux gérer en bon père de famille ce budget », a-t-il conclu, « il faut qu’on soit très prudent, nous avons reçu un courrier du ministre des transports nous mettant en garde sur la hausse du prix du carburant et l’impact sur les transports en commun. Donc, prudence. » Avant la mise au vote du rapport 26 sur le budget, les élus qui soutenaient la demande d’augmentation ont donc souhaité déposer un amendement pour qu’une somme de 354 000 euros soit prévue pour les aménagements immédiats de lignes ; avec 28 voix pour, 36 voix contre, une abstention, sur 51 présents et 19 pouvoirs, cet amendement était rejeté avec une forme de consensus « On voit que ça bloque toujours au même endroit », intervenait Aurélie Le Meur, « il serait donc bien de prendre l’engagement d’un travail de fond avec l’ensemble des retours des maires, l’ensemble des chiffres demandés et une échéance pour pouvoir déposer une proposition de réétude sous la forme d’une demande de modification budgétaire ». Ce à quoi Jean-Marc Léoutre répondait, tentant d’être rassurant : « Qu’une demande de modification budgétaire peut être affectée en septembre si le travail est étayé et ainsi modifier la dotation budgétaire annuelle. » Finalement, une opposition et quatre abstentions plus tard, ce rapport budgétaire sur les mobilités était adopté. Rendez-vous est donc pris d’ici la rentrée, pour connaître l’évolution de l’offre de Grand Chambéry en matière de transports en commun…

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1 commentaire

gerard Blanc

13/04/2022 à 15:15

Déficits démocratiques ? 82 conseillers, mais seulement 51 présents + 19 pouvoirs = 70. Votes : 28 pour + 36 contre + 1 abstention = 65. Où sont passés les 5 voix de différence ? Et les 12 élu.es absent.es sans remplaçant.es ou sans donner procuration à un.e collègue ? Et pourquoi ces votes cruciaux et significatifs ne font pas l'objet d'un relevé nominatif pour permettre aux citoyens-électeurs de connaitre les votes de leurs "délégué.es" et vérifier les éventuels double discours sur "c'est la faute à l'agglo si y'a pas assez de bus dans ma commune"/ "à l'agglo je vote contre une petite augmentation du budget bus" ?

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