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Novalaise : une journée pour rendre le lac d’Aiguebelette accessible à tous… tous les jours

Par Jérôme Bois • Publié le 20/04/22

Le sourire de Coline dissimule bien peu le mal dont elle souffre, un mal rare, cher, préoccupant à bien des égards. Un mal qui contraint sa famille à se plier en quatre pour offrir à cette fillette de trois ans une vie de confort, autant que faire se peut. Nous les avions quittés sur une grande victoire, celle d’avoir fait connaître sa pathologie à travers un projet fédérateur et collectif, la création d’une aire de jeux inclusive sur la petite commune de l’avant-pays savoyard. Aujourd’hui, et dans la droite ligne du travail déjà effectué, la deuxième phase du projet s’enclenche, avec une journée dédiée à rendre la plage du pré d’Argent inclusive, le 23 avril. 

C’était un jour de de septembre, à peine venions-nous de mordre à pleines dents dans une nouvelle rentrée scolaire enfin rendue plus douce avec la fin des restrictions sanitaires. Le soleil brillait, Coline venait d’accomplir ses cinq premiers jours dans sa classe de maternelle et le projet n’était encore qu’en gestation. Il restait à obtenir des financements et Christelle et Nicolas avaient, pour cela, participé au budget citoyen, un appel à projets concocté par le département de Savoie récompensant les initiatives plébiscitées par le public savoyard lui-même, lancé en octobre 2020. Un travail titanesque rendu possible par les bonnes âmes qui se greffèrent à sa construction, dont celle de José Crépy, nous le verrons. Il s’agissait de la création d’une aire de jeux inclusive à Novalaise, dotée d’équipements pour valides et non-valides et de l’aménagement de la plage du Pré-d’Argent.

Un projet largement plébiscité par le public savoyard

Lui est chercheur, elle, professeure agrégée, et tous deux ont dû se résoudre à puiser dans leurs ressources énergétiques, leur temps, pour à la fois gérer le quotidien d’une fillette de 3 ans née polyhandicapée car porteuse d’une mutation d’un gène Gabra 1 – un neurorécepteur – qui impacte son développement moteur et cérébral, et répondre à ce budget citoyen. Montant total estimé de l’aire de jeux et de l’aménagement de la plage, environ 83 000 euros. Ils y passèrent nuits et jours.

Un tiralo.

La mairie de Novalaise, via Claudine Tavel, répondit présent sans sourciller et se proposa d’appuyer la demande des parents de Coline. « Dépassons le handicap à Novalaise » venait de naître et déjà apparurent les messages de soutien ainsi que les premières lueurs d’espoir. Meaux, Vannes, Grenoble possédaient déjà ce type d’équipement, particulièrement coûteux, mais curieusement, compte tenu de sa singularité, ces communes n’ont été que trop peu copiées. « Nous ne faisons pas cela pour Coline » , reconnaissaient, à l’époque, les parents de Coline, désireux de moins mettre leur fille en avant que l’aspect universel et bienveillant de ce projet. Malgré une forte concurrence, l’initiative séduit, rallie à elle un grand nombre d’adhésions et si, au final, le Département consentira à accorder à trente projets une somme maximale de 50 000 euros, le public avait au préalable largement plébiscité ces aires de jeux, uniques en leur genre sur le secteur.

Lucas Ratel, copilote du processus et assistant au projet de modernisation attaché à la direction générale, avait alors expliqué qu' «à la demande du président Hervé Gaymard et compte tenu du succès de l’opération, nous avons porté ce budget à 1,2 million afin de pouvoir récompenser les trente lauréats à la même hauteur ». Soit le maximum. Les 659 voix venues récompenser l’opiniâtreté de Christelle et Nicolas les placèrent tous deux à la deuxième place à l’échelle du département en nombre de votes. 60% de projet global était donc financé. Mais ce n’était pas fini.

Structuration rapide, grands effets

Car au-delà des deux aires à implanter sur la commune – car il y en aura finalement deux ! – il restait à poursuivre le travail en trouvant de nouveaux financements. Un dossier a donc été déposé auprès de la région Auvergne-Rhône-Alpes pour l’obtention d’une aide de 15 000 euros et, en décembre 2021, l’association « Pour le sourire de Coline, dépassons le handicap » a été créée.

Angélique Clerc, au moment de débuter l’ascension de l’Everest sur son tapis de course.

Son président, José Crépy, soutien de la première heure, détaille. « Il reste à financer l’achat de tiralos, ces fauteuils permettent aux personnes à mobilité réduite d’aller dans l’eau en toute sérénité » , sans avoir à ramper ou à se faire aider. A l’époque, un fauteuil coûtait 2 000 euros. Une crise mondiale plus tard, les voici à 2 800 euros, les matières premières ayant explosé en quelques semaines. Alors, la caisse locale du Crédit agricole est arrivée, les mains pleines. « Il a fallu que nous créions l’association pour effectuer une demande de budget. La caisse locale s’est alors proposée d’organiser de A à Z une journée dédiée, le 23 avril ». Elle a fait appel à son inestimable réseau de bienfaiteurs : comités des fêtes, groupes de musique, associations… auxquels s’ajouteront la confrérie du gâteau de Saint-Genix, la chorale des Chœurs du lac, Handi Montagne, un viticulteur de Jongieux, les serres François ainsi que les IME des Mésanges et de Bassens, toutes les ventes se faisant au profit de l’achat de deux tiralos (5 600 euros). A terme, l’association vise la labellisation de la plage du Pré-d’Argent, une première en Savoie.

A ce jour, « Pour le sourire de Coline, dépassons le handicap » s’articule autour de deux axes. « Elle est un soutien aux parents de Coline, dont le quotidien est très difficile, et elle vise à faire connaître l’inclusion » , résume José Crépy, « car le handicap réclame beaucoup d’équipements de tous les jours extrêmement coûteux. A titre d’exemple, je croyais que de simples toilettes adaptées suffisaient, mais aucune ne possède de table de change. Beaucoup de jeunes PMR portent des couches, souvent, elles ne sortent même plus de chez elles. Ce sera l’une de nos actions ». Arras et Nancy furent les deux premières villes de France à inaugurer de tels équipements, il reste à les multiplier à l’échelle de l’Hexagone car de l’autre côté de la Manche, on en dénombre déjà 1 500 depuis 2006 !

A Nancy, une telle installation s’est élevée à 75 000 euros, ce qui donne une idée du casse-tête financier que représente le handicap au quotidien. C’est donc un univers à part qu’il est temps de faire découvrir au grand public et la journée du 23 avril s’y emploiera. « On souhaite faire travailler valides et non-valides, créer des synergies au service d’actions collectives » , soutient José Crépy. Et quel meilleur exemple que celui d’Angélique Clerc, qui depuis lundi 18 avril, court pour gravir l’Everest à Saint-Alban-Leysse ? Depuis son tapis de course du Fitness Park, elle parcourt les 8 848 mètres du toit du monde en tenant compte du dénivelé, sur un tapis de course incliné jusqu’à 18% ! L’objectif est de récolter 8 849 euros (elle en est à 2 015 euros en trois jours) pour financer l’achat d’un fauteuil de déplacement ou d’une poussette adaptée pour Coline (tous les détails ici). « C’est elle qui nous a rejoints » , témoigne le président de l’association, « elle travaille comme auxiliaire ASH en école à Chambéry et a été sensible à ce projet ». Angélique Clerc, runneuse émérite, est aujourd’hui marraine de l’association.

Avec de tels soutiens, on va toujours un peu plus loin…

 

Journée festive pour rendre le lac accessible à tous, le 23 avril, de 11h à 17h, plage du Pré-d’Argent (repli en salle polyvalente de Novalaise en cas de mauvais temps). Restauration et buvette sur place. Réalisée par la caisse locale du Crédit agricole de Novalaise.

 

Lors de la remise du chèque de 50 000 euros, versé dans le cadre du budget citoyen.

 

 

 

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