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Présidentielle 2022 : « s’il y a un vote utile, c’est le vote écologiste » pour les militants EELV chambériens
Par Laura Campisano • Publié le 08/04/22
Bien que pressenti comme étant à la traîne dans les sondages, le candidat Yannick Jadot poursuit toutefois sa trajectoire. Sur le terrain, les militants sont surpris de constater l’accueil plus que positif qu’il reçoivent en comparaison de ces projections, instantanés d’échantillons qui sous-estiment leur candidat. Si l’ensemble des prétendants à l’Elysée verdit ses programmes, les écologistes persistent et signent, depuis 30 ans déjà, leurs prévisions finalement avérées, à la lecture du dernier rapport du GIEC. Mais loin de céder au catastrophisme et au pessimisme ambiant, les militants souhaitent davantage croire au réenchantement de la politique, à la célébration du vivant, à la coresponsabilité, qu’incarne à leurs yeux la candidature de Yannick Jadot.
Faut-il en faire plus pour faire entendre la voix de l’écologie, ou bien le programme de Yannick Jadot se suffit-il à lui-même sans qu’on aie besoin d’en rajouter ? Dilemme, quand le constat d’une démocratie vacillante est faite de toutes parts, que les fake-news sur l’écologie circulent plus que les idées écologistes elles-mêmes. Prompte à faire son auto-critique, la formation politique, dont le candidat est crédité à ce jour de 5% des intentions de vote, souhaite avant tout que les citoyens votent pour leurs idées davantage qu' «utile », ce qui viendrait à faire croire que les sondages font le vote et que tout est joué d’avance, alors qu’il reste tant à faire.
« Comment parler de rendez-vous manqué alors que le vote n’a pas encore eu lieu ? »
Ils sont habitués aux courses de fond, les écolos, reconnaît Marc Pascal, porte-parole EELV en Savoie, tout comme pour les européennes, les municipales, où personne ne les avait vus arriver à la tête de municipalités comme Lyon, Grenoble, Strasbourg ou encore Annecy. « Le vote écolo, vous savez, il ne fait pas de bruit, mais les gens savent où mettre leur bulletin de vote, » sourit-il, « alors qu’il y a de quoi être effaré par le traitement médiatique de la candidature de Yannick Jadot sur le service public : comment parler de rendez-vous manqué alors que le vote n’a pas encore eu lieu ? C’est effarant ! » Issue d’une primaire réunissant plusieurs organisations et formations politiques dont EELV, Génération.s, Génération écologie, Les écologistes 2022, Mouvement des progressistes et les Nouveaux démocrates, la candidature de Yannick Jadot a fini par emporter l’adhésion des militants qui tractent, collent, arpentent les rues, rencontrent les citoyens, mais également… ramassent les poireaux. Une tonne de poireaux a été ainsi récoltée à l’appel d’un maraîcher chambérien, qui ne parvenait plus à écouler son champ, au profit de l’aide alimentaire qui distribuera les légumes en circuit court sur la Savoie. « Nous voulions montrer que par des actions concrètes, aussi simples que cela, le monde irait beaucoup mieux », reprend Marc Pascal, « il faut agir plutôt que se laisser happer par l’éco-anxiété qui est un vrai problème. Nous voulons dire aux jeunes qu’ils doivent se mettre en mouvement, car il n’y a rien de pire que de rester tétanisés par la peur. » Sur le terrain, en dehors des actions militantes classiques, ont également lieu des rencontres, des actions de campagne de fond, qui bien qu’elles aient attiré du monde, ne seront jamais aussi puissantes que la télévision, comme un « Café des possibles » pour évoquer avec les citoyens l’idée d’un passage à une VIe République, avec un débat ouvert autour du changement des institutions. « Car c’est de pire en pire, cette idée de monarchie républicaine vécue depuis plusieurs mandatures risque de devenir encore plus pyramidale à chaque élection, et c’est une des raisons pour lesquelles il faut aller vers une 6e république, » estime Marc Pascal, « ce que souhaite Yannick Jadot, tourne autour de l’idée de faire société ensemble, de mieux séparer l’Etat et les lobbies, d’accorder davantage d’indépendance aux médias et de renforcer les rédactions en leur donnant les moyens d’exister. » Un programme, une ligne, un travail qu’ils défendent bec et ongles tant ils s’emploient depuis 30 ans à faire exister les idées de justice écologique dans le débat politique français. « Tous les autres candidats sont dans le toujours plus. Le seul qui propose une alternative à ce toujours plus c’est Yannick Jadot, » appuie le porte-parole EELV, « c’est pour cela qu’il a du mal à exister médiatiquement, il renvoie dos-à-dos d’une part les néo-libéraux de droite et d’extrême-droite qui tendent tous vers une forme de fascisme et d’autre part les candidats qui poussent à une sorte de productivisme de gauche. La campagne est trustée dès le départ par deux thèmes : le pouvoir d’achat et l’immigration, cela a stérilisé d’autres façons de s’exprimer. Il faut que nous réussissions à montrer que l’on peut changer. » Cela implique de parler de co-responsabilité, de remonter en selle pour modifier des modes de pensée et d’actions. « Or tout le monde veut changer, sans mettre en place de changement. Par exemple tout le monde est pour la sortie du nucléaire, qui est une énergie fossile, incompatible avec la vie. Nous disons qu’il faut que cela arrive le plus vite possible ! On nous rétorque qu’il n’y a pas de capacité suffisante en énergies renouvelables : la faute à qui ? Cela fait des années que nous le disons, et personne ne nous a écoutés. Reconnaissons aux écologistes leur clairvoyance ! On le voit aujourd’hui avec la crise de l’Ukraine, le nucléaire qui devait nous rendre plus indépendants, plus forts, c’est tout le contraire ! » tonne Marc Pascal, « De même la politique agricole d’Emmanuel Macron est jugée par Bruxelles comme n’étant pas assez respectueuse de l’environnement, utilisant trop de mode de productions qui ne sont pas durables. Voilà ce qui nous crédibilise. Le programme des écologistes est assez juste, d’ailleurs bien que nous soyons toujours décrits comme des fous, tout le monde vient sur l’écologie… »
« C’est une chance de pouvoir repenser le modèle de société, cela devrait être enthousiasmant »
Tant de morosité dans la société actuelle interpelle Alexandra Caron-Cusey, animatrice du groupe local EELV Grand Chambéry. « L’élection présidentielle devrait être l’occasion de renouveler le modèle de société, de le repenser, ça devrait être enthousiasmant, la question du vivant ». Au lieu de cela, les sondages sont brandis sur la base de peurs, on parle de vote utile, depuis la déflagration politique du 1er tour de l’élection présidentielle de 2002, il y a 20 ans tout pile, « ce qui impose aux gens de voter pour » le moins pire « parce que s’ils votent par conviction, ils sont perçus comme des salauds. Cela démontre surtout le très mauvais état de la démocratie de notre pays, » estime-t-elle, « toute la campagne se fait autour du commentaire. Finalement le vote utile devait servir à combattre l’extrême-droite qui ne fait qu’augmenter. A un moment, on doit se parler des vrais problèmes de société, au lieu de commentaires et de techniques électorales. » Pour faire mieux, EELV estime devoir se réapproprier son histoire politique, ses racines, expliquer ce qu’est l’écologie, plutôt que de laisser les commentaires prendre le dessus sur leur réalité « C’est notre responsabilité de dire stop à toutes les inepties sur nous, » souligne Alexandra Caron-Cusey. Car l’urgence est bien là, si on s’en tient au dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, « il nous reste 5 ans, alors il faut s’y mettre, nous avons la responsabilité de mettre en lumière ce qui existe et de sortir les gens d’une forme de sidération. »
Mais l’autre urgence, l’autre enjeu de cette élection présidentielle pour Alexandra Caron-Cusey, c’est l’état de la démocratie, elle se dit « inquiète de la nullité du débat public, il faudrait réinstituer la culture de ce qu’est la démocratie, la faire évoluer, réussir à articuler démocratie participative et incitative. C’est le deuxième grand chantier si l’on veut sortir de cette ornière. » Fustigeant les lobbies, dont le rôle est dévastateur comme en témoigne le documentaire diffusé par Arte « la fabrique de l’ignorance » qu’elle cite en référence, la militante écologique craint l’impact du populisme, grandissant avec la puissance des réseaux sociaux « qui alimente le ressentiment, le ressassement victimaire, il faut sortir de ces passions tristes, » souligne-t-elle. Lucide, Alexandra Caron-Cusey reconnaît que dans un moment politique aussi brouillé que celui que nous vivons, l’écologisme peut paraître suspecte, puisqu’elle prône l’interdépendance, la solidarité, la remise en cause des systèmes et la question de la responsabilité. « Tout commence par soi, » reprend-elle, je suis toujours frappée par les gens qui jettent des déchets dans la nature, comme si par magie, ils allaient se résorber. Il est temps de réenchanter la politique, les gens ne vont plus voter, déconcertés par les sondages, culpabilisés par le vote utile qui est un piège démocratique majeur. Aucun candidat ne sera parfait. Les gens sont habitués à choisir, c’est une personnification de l’expérience client : ils s’attendent donc à avoir un président qui leur corresponde parfaitement. Mais l’intérêt général doit toujours primer sur l’intérêt individuel en démocratie. « Dans un communiqué du 7 avril, la section EELV a réagi à l’appel au » vote utile « du maire de Chambéry Thierry Repentin, exhortant les citoyens à lire les programmes des candidats et à se faire leur propre opinion. Pour Marc Pascal en tout cas, » s’il y a un vote utile, c’est le vote écologiste, pour leur permettre de poursuivre leur travail de fond depuis des décennies. En cela mieux vaut choisir le programme original qu’une copie trop récente pour être vraiment convaincante. « Chacun est donc invité à faire ce qu’il pense au plus profond de soi, et à l’exprimer, dans le secret de l’isoloir.
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1 commentaire
Unknown
08/04/2022 à 10:03
les écolos prendront des roustes tant qu'ils seront gauchistes .... l'écologie est un concept apolitique