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Législatives : Albin Guillaud, l’amour du Ric

Par Jérôme Bois • Publié le 16/05/22

Les échéances électorales, quelles qu’elles soient, font toujours la part belle à des candidats venus d’ailleurs, pas du tout issus du sérail, aux idées parfois farfelues, parfois tangibles, et qui viennent souvent dynamiter une campagne ronronnante faite d’éléments de langage, un rendez-vous d’initiés soutenus par de gros vaisseaux amiraux. 2022 ne fera pas exception, les électeurs trouveront en Albin Guillaud et Nelly Darbois, sa suppléante, des candidats hors système, dont la présence ici vaut surtout pour la mise en avant du Ric, référendum d’initiative citoyenne, une arme idéale pour rompre avec ledit système, qu’ils jugent archaïque et sclérosé.

La parole aux citoyens. Bien sûr, comme tout le monde le chante allègrement au gré des campagnes… Mais comment ? Avec quel outil constitutionnel ? Le Ric, répondrait Albin Guillaud. Cet Isérois au parcours des plus chaotiques est sur la liste de départ sur la 4e circonscription de Savoie et son moteur, c’est ce référendum d’initiative citoyenne, brandi par les Gilets jaunes puis, depuis par moults personnalités politiques mais outil toujours aussi tabou.

Cortecs et zététique

En parcourant le cursus d’Albin Guillaud, on comprend mieux ce qui a bien pu le pousser à venir jouer des coudes au milieu des François Gaudin, des Patrick Mignola et consorts. Parti pour devenir professeur d’EPS mais freiné par une motivation à géométrie variable, Albin s’imagine ensuite pompier, lui qui jouait les pompiers sauveteurs sur le lac d’Aiguebelette en marge de ses études.

Un duo de choc pour un Ric…

Une licence suivie d’un brevet d’Etat de maître-nageur plus tard, il se met à préparer le concours… de kiné. Jusqu’ici peu rompu à la chose publique, c’est à travers ce biais qu’Albin va pénétrer ce monde qu’il avoue ne pas trop connaître. Diplôme en poche, il intègre l’école de kiné de Grenoble où lui sont dispensés des cours d’esprit critique et de zététique, qui pourrait se traduire par l’art du doute. « Intellectuellement, c’était bouleversant, confie Albin Guillaud, avec Nelly, que j’ai connue là-bas et qui est devenue ma compagne, nous avons été conquis ». Installés à Grenoble après un tour de France qui les mènera en Corse, dans les Pyrénées, en Bretagne, dans le Doubs et dans le Jura, ils découvrent une association avec laquelle ils collaborent à partir de 2014, Cortecs, pour Collectif de recherche transdisciplinaire esprit critique et sciences, collectif né en 2010 entre la cité iséroise, Montpellier et Marseille, qui a pour valeur la transmission de l’esprit et de la pensée critiques (ou zététique). « Nous avons dès lors enseigné, réalisé des dossiers pour le conseil de l’ordre des masseurs-kinés, relance Albin. Tout cela m’a conduit à démarrer une thèse sur les thérapies alternatives de 2017 à 2020. Au sein de cette association, on croit à l’enseignement de l’esprit critique pour les différentes couches de la société ». D’où l’accès à la politique « puisqu’on s’emparait des grands sujets nationaux et internationaux. J’ai trouvé ça passionnant ». Il cite le mouvement de l’altruisme efficace dont l’action pourrait se résumer à « comment aider les autres le plus possible compte tenu de nos ressources limitées ? » En somme, il découvre l’art d’adopter des raisonnements pragmatiques et scientifiques et d’éviter « les positionnement au doigt mouillé ».

Oui à l’assemblée constituante

A titre d’exemple, en tant que kiné libéral, Albin a souvent affaire à des personnes âgées, voire en toute fin de vie. La question, épineuse, de l’euthanasie lui revient aux oreilles : que leur répondre ? Que dit la loi ? A-t-on le droit, en France, de disposer de son corps, même lorsqu’il est question de la mort ? Doit-on décider à la place des personnes concernées ? « Tout est régi par des gens déconnectés » , souffle Albin Guillaud. Il se penche alors sur le droit constitutionnel, son travail l’amène à être repéré, au moment de la présidentielle 2017, par le groupe de la France Insoumise. « Ils m’ont ferré par le biais de l’assemblée constituante. J’ai donc fait du porte à porte, à Chambéry » pour vanter ce processus – une assemblée de représentants d’un pays qui a pour mission de rédiger ou d’adopter une constitution ou une modification de celle-ci – qui trouve grâce à ses yeux. Peu lui importait le reste programmatique de la FI, l’idée d’une assemblée représentative de la population pour s’emparer des grands sujets le séduisait. « Je suis beaucoup moins réceptif à un système qui s’impose à tous les citoyens, relève-t-il. Cela serait venu d’un autre groupe politique, j’y serais allé aussi. J’ai voulu faire émerger cette idée dans l’esprit du plus grand nombre ».

Albin Guillaud, jeune kiné et première candidature…

Lorsqu’un professeur de sciences politiques se greffe au Cortecs, le groupe se met en tête de bûcher sur le référendum d’initiative citoyenne (Ric), avec la mairie de Grenoble. Émerge alors une association, « le Dauphiné démocratique », qui cherche à « améliorer le système politique par le Ric, donc mais aussi par un projet de décentralisation qui dénonce l’idée que le haut de la pyramide des institutions (l’Etat…) décide des compétences de la base (les communes, agglos…), quand en Suisse, c’est l’inverse ». « Espoir Ric 2022 », mouvement politique encore confidentiel sur l’échiquier, voit le jour. « Nous voulons un Ric constituant pour pouvoir modifier les institutions et contrôler les élus, annonce Albin Guillaud. Les citoyens peuvent alors modifier les règles ; plus les gens ont de moyens de contrôle, plus les élus deviennent précautionneux car ils savent qu’il peuvent être destitués. Ça change tout de leur mentalité. Nous aurions un mécanisme permanent » , à la condition que le référendum soit approuvé par 700 000 citoyens.

Si Clara Egger avait échoué à obtenir les 500 parrainages nécessaires pour se présenter au premier tour de la présidentielle, « Espoir Ric 2022 » a obtenu de Jean Lassalle, candidat finaliste le 10 avril, que le Ric constituant soit la première de ses mesures, ce dernier engageant jusqu’à l’ensemble de ses biens matériels par acte notarié afin d’assurer le mouvement de sa bonne foi. Et selon Albin, pas de risque de confier des sujets brûlants ou techniques à n’importe qui puisqu’à travers le Ric, « la communication qui est faite autour donne tous les éléments de compréhensions afin que les gens puissent se prononcer en toute connaissance de cause ». Retraite, fin de vie, droit à l’avortement, tout sujet pourrait ainsi être soumis au vote citoyen « alors que le système actuel avachit les gens. Quand un sujet est soumis à référendum, il faut bien savoir que cette même décision peut ensuite être elle-même renversée par un autre référendum, quelques mois ou années plus tard ».

Ils sont 20 en France

René Descartes a prêché la culture du doute, sa célèbre citation « je peux douter de tout, sauf d’une chose, et c’est le fait même que je doute. Autrement dit – je pense, donc je suis » en atteste, « il faut pouvoir tout remettre en cause, abonde Albin Guillaud, rien n’est acquis ». Une façon de dire que les hommes s’élèveraient a ainsi douter et remettre en cause un système vieux de soixante ans, l’antithèse de l’avachissement décrit par John Stuart-Mills : « Un état qui rapetisse les hommes pour en faire des instruments dociles entre ses mains, même en vue de bienfaits, s’apercevra qu’avec de petits hommes rien de grand ne saurait s’accomplir ». Élever les hommes, voilà une belle intention… Voilà pourquoi Albin Guillaud est candidat, certes d’un système qu’il combat, pour donner aux gens la possibilité de présider aux commandes de l’Etat. « Nous sommes partagés entre le désir de gagner des voix et celui de faire porter nos idées. Gagner plus de voix revient à biaiser notre discours, nous préférons informer sur ces mécanismes. Si je suis élu, je m’engage à voter en faveur de toute proposition qui tendrait vers le Ric et qui redonnerait du pouvoir aux collectivités locales. Sur le reste, tout le reste, je m’abstiendrai ». Le voici désormais à arpenter les sentiers de Savoie, pour faire vivre cet espoir de Ric si chèrement défendu.

Ils sont une vingtaine de candidats, en France, à partager cet espoir, « nous avons simplement ouvert une brèche en Savoie » , conclut Albin.

Une réunion publique se tiendra le 3 juin à Bassens, à la ferme de Bressieux. Pour en savoir plus sur Albin Guillaud, ses idées et « Espoir Ric 2022 » rendez-vous sur le site www.albinguillaud.fr et sur la chaîne Youtube Espoir Ric 2022.

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