« Premières pages » en Savoie, l’éveil littéraire pour les plus petits

A l’occasion de la 12^e édition savoyarde de « Premières pages » – initiative imaginée par Savoie Biblio qui souhaite valoriser la littérature jeunesse et promouvoir l’importance de la lecture dès le plus jeune âge – c’est l’album de Jean-Michel Billioud et Marguerite Courtieu, « L’ours tendre » paru aux éditions Albin Michel jeunesse, qui a été sélectionné. Un ouvrage simple et doux qui aborde la souffrance à travers la notion d’apparence tout en partageant des valeurs de bienveillance et de tendresse.

Depuis 2009, l’opération « Premières pages » lancée par le Ministère de la culture offre à chaque naissance, ou chaque adoption, un lot de cadeaux « constitué d’un album original, d’un guide à destination des parents et de conseils de lecture » , indique le site de Premières pages. Cette année, pour l’édition savoyarde, le livre sera distribué à 4 100 familles sur 235 lieux répartis en Savoie tels que les médiathèques, les bibliothèques ou bien les crèches. En partenariat avec la Caisse d’allocations familiales de la Savoie ainsi que la Mutualité sociale agricole – Alpes du Nord, elle a déjà permis à plus de 20 000 enfants savoyards d’accéder à l’univers des livres depuis son commencement.

L’album de la tendresse

« C’est un livre sur le thème de l’apparence, on pense connaître quelqu’un et cette personne est différente de ce que l’on imagine, et c’est une souffrance très importante chez beaucoup de gens d’ailleurs. J’ai voulu retranscrire cette idée à travers une histoire pour les plus jeunes, » explique Jean-Michel Billioud, auteur de « L’Ours tendre ».

C’est un sentiment ambivalent qui se dégage de l’album présenté dans cette 12^e édition savoyarde. En effet, choisi par un jury interprofessionnel parmi 12 autres propositions, l’album dépeint l’histoire d’un ours brun plein de tendresse et dont les autres animaux – rennes, chouette, renard et hibou – refusent la gentillesse, estimant que l’ursidé en question n’est qu’un animal sauvage et dangereux. « J’ai cherché un animal qui est potentiellement tendre par son imaginaire. Un ours, c’est un animal que les enfants adorent, et en même temps, c’est un animal qui porte en lui une violence, c’est ambivalent comme sentiment », précise Jean-Michel Billioud.

Pour illustrer l’histoire, l’auteur a collaboré avec Marguerite Courtieu. Diplômée de la haute école des arts du Rhin, Jean-Michel Billioud lui propose le texte alors même qu’elle n’est pas encore illustratrice. La collaboration fonctionne à merveille pour un album qui représente parfaitement les deux artistes. C’est par l’univers blanc fait de peinture à l’aquarelle que la tendresse se dégage. Une technique de peinture à l’eau qu’elle apprécie notamment pour son mouvement lâche : « Je me suis laissée porter » , se souvient-elle. Une aventure amicale et bienveillante où l’auteur reste totalement séduit par l’émotion et la tendresse que dégagent les illustrations de Marguerite Courtieu. « Elle a vraiment rendu le texte lisible pour un enfant et elle l’a rendu plus fort et plus impactant dans l’émotion, » raconte-t-il.

Pathos et catharsis

D’abord journaliste sportif après des études à l’IFP (Institut français de presse) puis étudiant à l’EHESS (Ecole des hautes études en sciences sociales), Jean-Michel Billioud se destine – presque par accident – à l’écriture de livres jeunesse. « Quand j’avais 20 ans, je ne pensais pas une seconde que j’allais devenir auteur jeunesse, » révèle l’auteur. C’est par une rencontre avec un artiste dans une exposition d’art contemporain qu’il commence à écrire, en seulement 10 minutes, une première petite histoire. « J’ai imaginé un texte un peu comme » L’ours tendre », toujours un peu sur le ressort de l’émotion. Je l’ai montré un peu à droite, à gauche. Quand les gens le lisaient, ils pleuraient… « se souvient-il. Il prend alors conscience que ses mots peuvent toucher les gens, ou du moins toucher quelque chose en eux. S’ensuivra alors une série d’albums jeunesse. « J’ai continué et je sais qu’aujourd’hui, c’est ce que je sais faire. Je dis que c’est un accident, mais c’est un accident qui était provoqué ou qui était dans la logique des choses. J’allais arriver à comprendre que c’était mon destin d’écrire, soit pour faire passer un message, soit pour faire passer une émotion, » précise l’auteur marseillais. Au sein de ces histoires, il laisse une grande place au ressenti. L’écriture, dont le ressort est « presque » thérapeutique pour lui, reste toujours un peu « dans le pathos. Il y a toujours quelqu’un qui est mort, il y a toujours quelqu’un qui est triste, ou il y a toujours une forme de souffrance. »

C’est cette aventure humaine qui donne existence à un album fait de sensibilité et de spontanéité : « Même si ce livre avait été vendu à 5 exemplaires, ce n’est pas très grave parce que j’ai trouvé que l’aventure avec Marguerite me satisfaisait déjà, » conclut l’écrivain.