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Législatives : Mireille Bouvier, au nom du vivant

Par Laura Campisano • Publié le 06/06/22

Candidate dans la 4e circonscription, sous l’étiquette « l’écologie au centre », Mireille Bouvier ne rêve pas, à 68 ans, d’un poste prestigieux dans la politique, ni d’une carrière. Ce qui la motive, c’est la défense du vivant, c’est la fin de cette course folle consumériste qui pousse à posséder toujours plus, alors que les ressources de la Terre s’épuisent. Un discours qui détonne au milieu de ses co-candidats, qui cherchent et proposent d’autres solutions là où elle n’en voit qu’une : protéger l’environnement, les animaux, c’est protéger la vie, et ce n’est plus une option.

Ce n’est pas une professionnelle de la politique, ça, elle le revendique. Mireille Bouvier a fait de très longues études de management hôtellier international de luxe à l’Essec de Cergy-Pontoise, secteur dans lequel par la suite elle a travaillé, durant cinq ans, avant de réaliser que ce n’était pas du tout ce pourquoi elle était faite. « Je me suis demandée ce que je faisais là. J’ai pris conscience du prix que je demandais à des clients pour une suite tandis que d’autres personnes dans le monde mourraient de faim. C’était trop pour moi, il fallait que je sois cohérente. Et à partir de là, j’ai fait du bénévolat, en faveur de la protection animale pendant des années à Chambéry, tout le reste de ma vie, des conférences, des ateliers, l’organisation du premier festival de l’animal à Chambéry. En plus de cela, je faisais l’école à la maison pour mes deux enfants. » Un parcours, une vie, une philosophie différentes de ceux qui jalonnent l’existence des candidats à des élections, et finalement, rien de si étonnant à cette candidature sur un territoire qu’elle connaît bien. Mireille Bouvier est engagée, engagée auprès des animaux, qu’elle recueille chez elle à l’instar de ses huit chiens et dix chats, puisqu’elle a la place et le terrain, pour les accueillir, auprès des humains également, auprès, finalement, de tout ce qui est vivant.

« La façon dont on traite l’animal a des conséquences sur la détérioration du monde »

« Quoique l’on dise, dans toutes les matières au niveau sociétal, on renvient toujours à cet élevage industriel et à ce comportement envers les animaux. La façon dont on traite l’animal a des conséquences sur la détérioration du monde. » Pour la candidate c’est une évidence, la protection des animaux, la protection du vivant, c’est la protection de l’homme et c’est pourquoi le mouvement fondé en 2009 qui présente 400 candidats à ces élections législatives, a écrit 80 propositions « immédiatement applicables et pas chères pour agir tout de suite, avant qu’il ne soit trop tard, hélas. » explique-t-elle. En binôme avec un accompagnateur de haute-montagne, anciennement maire de Tessin, Roger Chenu, elle estime constituer un « bon tandem, l’une côté ville, l’autre côté montagne » car de par sa profession, « il voit très bien les problématiques d’environnement et les problématiques induites par le transport, l’afflux de touristes, même si on en a besoin. » 

On ne peut pas dire d’elle qu’elle soit tombée dans la marmite de l’écologie étant petite, car à son époque, ces questions n’existaient pas du tout : dans les années 50, la question de la sauvegarde de la planète n’était pas aussi prégnante qu’aujourd’hui. Mais que les choses soient bien claires, Mireille Bouvier ne rejette aucune des idées des autres candidats, parmi lesquels certains ont de « beaux projets, on va me dire qu’il a des choses à faire avant, tandis que je veux leur faire comprendre qu’il existe d’autres modèles de société que ceux formatés, bien programmés, pour que les gens restent dans leurs habitudes. » La gauche, par exemple, « a un très beau programme écolo, mais ce qui freine beaucoup de gens, c’est que c’est la gauche, explique-t-elle, la droite développe encore trop peu d’idées écologistes, ça commence, doucement. Nous, nous sommes au centre, ni à droite, ni à gauche, mais au centre de la question actuelle, parce que l’écologie est la réponse à tous les problèmes de société : l’économie, le plein emploi, une meilleure santé… Il y a des gens qui ne votent plus, certains qui ne votent pas pour EELV pour une question de cohérence. Sincèrement ces clivages gauche/droite sont insignifiants face à l’urgence écologique, ils pèsent peanuts face à la catastrophe écologique qui nous attend. » Elle se défend toutefois de tout catastrophisme outrancier, car selon elle « il existe beaucoup de possibles pour stopper cette catastrophe à condition de s’y mettre tous ensemble et pas de sortir des mesurettes écologiques. Il faut des mesures d’urgence, exposer ce que l’on fait pour l’environnement pour une meilleure société. » 

« A l’Assemblée nationale, je serai peut-être la seule à ne pas me laisser influencer par les lobbys »

Elle l’affirme avec aplomb, même si elle étudie la chose politique depuis suffisamment longtemps pour faire preuve d’humilité, son objectif n’est pas « de prouver à tout prix que ce que je pense est la seule vérité, mais simplement d’agir pour ce dont les gens ont besoin ». Mireille Bouvier ne compte pas se laisser influencer, parce que son but est plus grand « que [ma] petite personne, nous sommes là pour œuvrer en faveur de l’humanité, alors sans doute qu’à l’Assemblée nationale, je serai la seule à ne pas me laisser influencer par les lobbys. » estime la candidate qui n’a pas souhaité mettre sa photo sur les affiches de campagne, « ce n’est pas pour ma tête que les gens votent, mais pour les idées que je défends. » Original.

Bien sûr, elle sait qu’elle n’est pas une pro des longs discours et des jugements à l’emporte-pièce, n’empêche qu’en tant d’années de bénévolat, elle a rencontré du monde et qu’elle a eu le temps de se forger un bouclier, et une sacrée connaissance du terrain. C’est ainsi que la colocation serait une bonne réponse au problème du logement en Savoie, que le développement des éco-lieux pourrait aussi répondre à certains besoins, où les habitants seraient acheminés en minibus « au lieu de mettre de l’argent dans des choses inutiles » ironise-t-elle. Pour elle, c’est grâce à la colocation, la coopération, l’économie circulaire que les choses bougeront. Quant à la question du loup, elle rappelle que c’est la ville qui s’étend aux animaux, et se rapproche de leur écosystème, « on ne voit pas les éleveurs pleurer quand ils amènent leurs bêtes à l’abattoir mais quand c’est un loup qui les mange, on veut tuer le loup. C’est surprenant comme façon de penser. » 

C’est une candidature qui sort des sentiers battus sans que l’on puisse la qualifier de rebelle ou de farfelue. Mireille Bouvier sait parfaitement ce qu’elle fait et pourquoi elle s’engage, « on voit tous les jours de notre vie une avalanche de catastrophes, principalement envers les animaux, alors on doit s’interroger : qui a les manettes ? Pourquoi les choses ne changent pas ? Pourquoi un tel laxisme sur le mal que l’on inflige aux animaux et pourquoi des gens sont si dégoûtés de la vie qu’ils ne se responsabilisent pas en politique, au point de laisser les choses comme elles sont ? On se plaint, et on laisse les rênes aux mains de ceux que l’on n’apprécie pas. Si on ne s’occupe pas de la chose politique, ça continue. Je ne suis pas là pour parler de la politique, je suis là pour apporter des solutions concrètes, immédiates à une urgence écologiste qui est telle que c’est notre devoir de l’enrayer. Pour le bien collectif, je m’engage, l’écologie se préoccupe autant et à quantité égale de l’homme et de l’animal : on offre une autre solution. On s’agite dans le vide si on n’est que révolté. » Voilà qui est dit. Reste à savoir ce qui sortira du débat entre les 10 candidats de la 4e circonscription, lundi 6 juin…

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