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Musilac 2023 : « Le succès de cette édition était inespéré »
Par Laura Campisano • Publié le 11/07/23
Les portes de Musilac viennent de se refermer et déjà les dates de l’édition 2024 ont été annoncées. C’est bon signe, évocateur de la réussite du cru 2023. Rémi Perrier, l’organisateur de la « cure de rock » aixoise s’en est réjoui, mais comme pour tout organisateur de festival qui se respecte, le succès n’exempte pas de prudence.
L’année dernière, pour les 20 ans de Musilac, Rémi Perrier avait voulu voir grand. Un festival sur cinq jours au lieu des quatre habituels, encore plus d’artistes, et finalement un résultat qui avait fait craindre l’arrêt brutal de cette grande fête à ciel ouvert au bord du lac du Bourget. Alors cette année, la prudence était de mise : les festivités ont été programmées sur quatre jours, et sous un soleil de plomb, le public a répondu présent : 90 000 entrées payantes, 110 000 personnes au sens global, y compris les partenaires et la presse, le boss était content.
« C’était inespéré, on n’y croyait pas »
Une telle réussite, après 2022, Rémi Perrier n’osait même pas y croire. « C’était inespéré, on n’y croyait pas, c’est un vrai succès cette année, et on peut donc d’ores et déjà vous annoncer que Musilac aura lieu en 2024, du 10 au 13 juillet. On a même déjà deux artistes importants prévus l’an prochain ! » Heureux oui, malgré la fatigue qui tire les traits et la dernière soirée qui venait à peine de démarrer, charriant avec elle les changements de dernière minute avec les managers d’Iggy Pop concernant les photographes du crash barrière. Les festivals d’été, ce sont toujours des surprises, des artistes qui peuvent tomber malades et déclarer forfait (Pedro Winter), d’autres qui arrivent sur scène par surprise (Clara Luciani, venue chanter avec son compagnon Alex Kapranos, du groupe Franz Ferdinand rencontré à Musilac !) et d’autres qui changent les conditions d’accès des journalistes et photographes à l’avant-scène. En bref, des aléas il y en a quelques-uns, mais fort heureusement, cette édition a été plus festive que problématique. En quatre jours de festival, 52 artistes se sont succédés sur les trois scènes (Lac, Montagne, Korner) et au plus fort de la fête, pour les concerts d’Indochine et d’Iggy Pop, respectivement vendredi et samedi, 26 000 personnes se sont enjaillées. Quatre jours, la recette gagnante ? « Ce n’est jamais gagnant, répond sans détour Rémi Perrier, chaque année on risque la mort du Festival, chaque année on repart de zéro. Ce n’est jamais acquis, c’est le public qui fait le succès d’un festival et le public a toujours raison. »
C’est d’ailleurs sur le public que l’organisateur avait misé en 2022, après deux ans d’absence en raison de la crise Covid. « On avait présumé de l’appétence des gens après deux années sans festival, enfermés, et on voulait marquer le coup pour les 20 ans, alors on s’est lancé sur cinq jours, analyse Rémi Perrier, mais peut-être que parmi eux, certains étaient encore frileux à l’idée de se retrouver au milieu de la foule, on ne sait pas. » Toujours est-il qu’il avait fallu chercher des solutions. Une souscription pour avoir un filet de sécurité ? « On y a pensé trente secondes, et on a vite oublié, ce n’est pas au public de payer pour sauver un projet privé, on ne va pas leur demander en plus des 60 euros par soir, de mettre 30 euros pour sauver le festival. »
Musilac soutenu par la Région et la ville d’Aix-les-Bains pour perdurer
Après l’appel à l’aide de l’an dernier, et alors que jusqu’ici la région soutenait financièrement Musilac à hauteur de 50 000 euros, selon nos confrères de Lyon Entreprises, cette année 2023 a permis au festival (mais pas seulement celui-là, Jazz à Vienne, le Printemps de Pérouge, entre autres, également) de bénéficier d’une aide de 220 000 euros. Cela s’inscrit dans le cadre de l’augmentation des aides de la Région de 1,3 million d’euros voulue par Laurent Wauquiez et Sonia Rotkopf, vice-présidente à la Culture de la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui s’était félicitée de soutenir des événements « inscrits dans une culture de pérennité » De son côté, la ville, qui accueille le festival de musique le plus important de la région a également mis à la main au portefeuille en accordant cette année encore la subvention classique de 200 000 euros* bien que certains semblent encore s’en émouvoir. D’après le site « Vie-publique », « le mode d’implication d’une collectivité territoriale dans un festival détermine le type de financement : soit via le soutien à une association organisatrice d’un festival, via une subvention, soit un marché de service public si la collectivité territoriale intervient dans l’organisation (mission de service public culturel). » Sans compter que la commune met également le paquet sur la sécurité du site et routière, et les moyens techniques apportés à l’organisation du festival (groupes électrogènes, barrières métalliques, transports en commun via l’agglo entre autres). Bien sûr, il y a des retombées pour la ville, les navettes pleines à craquer que nous avons empruntées véhiculaient des festivaliers provenant de la région mais aussi de l’étranger, qu’il faut loger, nourrir, hors esplanade. Alors forcément, tout le monde s’y retrouve plus ou moins. Quid du département de la Savoie, qui recevait Christophe Maé aux Estivales du Château ce même samedi soir ? « Toujours rien, on ne change pas les rayures d’un zèbre », philosophait Rémi Perrier, visiblement blasé de cette situation, vu l’envergure de la manifestation. « Chaque collectivité locale dispose de ses politiques publiques et doit être respectée comme telle, coupe court Renaud Beretti en sa qualité de vice-président à la culture au Département. » Le département fait le choix de soutenir 35 festivals associatifs en Savoie et organise le sien, les Estivales, dont l’entrée est gratuite « conclut-il.
Il faut dire qu’entre la crise COVID, les risques d’attentat, la flambée des coûts de l’énergie et la sécurité, les festivals qui se maintiennent sont assez chanceux, comme le souligne le site « Vie Publique » qui pointe les raisons qui fragilisent les festivals « aléas des subventions, alourdissement des coûts de sécurité depuis les attentats de 2015, envolée des factures artistiques (notamment augmentation des cachets de certains artistes ndlr), irruption de grands groupes organisateurs de festivals. » C’est pourquoi selon le site, « les festivals doivent opérer des choix économiques difficiles entre : augmenter le prix des billets (et risquer de se couper d’une partie du public), jouer la carte de la sécurité par une programmation consensuelle (et renoncer à découvrir de nouveaux talents ou à suivre des talents émergents) et abandonner les actions culturelles et sociales en marge du festival (et risquer la perte de la spécificité de l’événement, voire la justification des subventions perçues). »
Une réalité pour Rémi Perrier qui a expliqué que Musilac avait des limites de budget concernant les artistes qu’il peut accueillir, et qu’il souhaite surtout pouvoir pérenniser les tremplins afin de faire connaître des artistes émergents au public. « Il y a des artistes que l’on ne pourra pas s’offrir, comme dans la plupart des festivals indépendants, certains grands groupes ne sont pas accessibles », relevait-il, espérant ne pas être contraint d’augmenter les pass pour les festivaliers « la volonté serait plutôt de les baisser, la gratuité est même une idée. Mais il faut quand même savoir que l’assurance globale du festival a augmenté de 70%. On compte beaucoup sur notre partenariat avec Miraval »
Cette année, tout s’est bien passé, public, soleil et artistes étaient au rendez-vous. Il ne reste plus qu’à croiser les doigts pour qu’il en soit de même du 10 au 13 juillet 2024.
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