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Législatives : Vincent Thomazo, le deuxième tour de piste
Par Jérôme Bois • Publié le 03/05/22
Engagé pour la 2e fois dans une élection législative en Savoie, sur la 3e circonscription, Vincent Thomazo, représentant local de Debout la France, est un électron libre dans le microcosme. Sans langue de bois, sur les réseaux comme dans la vie, il se distingue par ses méthodes de communication et surtout, il s’appuie sur une carrière qui l’a mené des portes du football professionnel au cœur du combat syndical puis jusque dans le grand bain politique. Le voici désormais là où il se sent le mieux, près des gens d’ici, ceux qui font le terroir qu’il souhaite défendre bec et ongles.
Sur les réseaux sociaux, on ne verrait que lui tellement la plume est aiguisée. Il fustige, râle, dénonce avec la vigueur du convaincu, partage à loisir la parole de Nicolas Dupont-Aignan, qu’il avait rencontré peu avant la présidentielle 2012 alors qu’il était encore secrétaire national Unsa Douanes ou soutient un Jean Lassalle affaibli par un Covid tenace. La dernière campagne, la crise sanitaire et celle des gilets jaunes ont été autant de pages blanches noircies par ses éclats verbaux. Vincent Thomazo dit ce qu’il pense et n’espérez pas qu’il varie à 59 ans.
Il est de la génération des Barnier, Dantin mais son engagement n’a pas toujours été ce qu’il est aujourd’hui. Forgé par 35 ans de syndicalisme, Vincent Thomazo a connu le secteur privé, le public, a flirté avec le sport de haut niveau, lorsqu’il fut à deux doigts d’intégrer le Stade Malherbe de Caen au tout début des années 80, celui venait de tomber en 3e division. Et l’a clairement côtoyé lorsqu’il fit partie de la sécurité du site d’Albertville lors des Jeux de 1992, en qualité de responsable adjoint. « Ça a été une véritable expérience, une aventure humaine. Jean-Claude Killy et Michel Barnier avaient fait fort… »
Du RPR à Debout la France…
En 1981, il effectue son entrée en politique, au sein du RPR, conjointement aux naissances politiques des Thierry Mariani, des Renaud Muselier, des Roger Karoutchi. A l’époque, cette adhésion était une réponse à l’élection de François Mitterrand à la présidence de la République. Lors des législatives de 1986, les membres du RPR s’allièrent avec l’UDF « mais la base militante était RPR, rembobine Vincent Thomazo, nous étions la base la plus active, une véritable école du militantisme ». Une volonté commune de faire valoir les idées d’une droite alors malmenée. La victoire sera au bout. Un temps que l’intéressé en serait presque à regretter : « Il y a désormais un tel changement de mentalités que les gens ne s’engagent plus pour les autres. On retrouve toujours les mêmes ». Une façon pour lui d’annoncer une transmission de témoin à sa suppléante, Laetitia Burgos, 22 ans ? « Elle est jeune, très impliquée, mais je n’en suis pas encore là » , tempère Vincent Thomazo.
Ce n’est qu’en 2005 qu’il sortira du RPR, voué à disparaître au profit de l’UMP. La France venait de rejeter, par référendum, le projet de traité constitutionnel européen et Nicolas Sarkozy passera en force. « A ce moment-là, je me suis mis en retrait de la vie politique du fait, aussi, d’un changement de vie professionnelle » , confie-t-il. Il deviendra secrétaire général national de l’Unsa Douanes, lui le douanier de profession, et aura l’oreille des plus grandes personnalités politiques du pays. C’est ainsi qu’à la veille de l’élection présidentielle 2012, il interpellera, au nom de son syndicat, les 10 candidats finalistes. Il n’obtiendra que trois réponses : « Nicolas Dupont-Aignan, en premier, François Hollande et Nathalie Arthaud, qui devait être trop contente d’être sollicitée » , sourit-il. « Mais seul Dupont-Aignan a demandé à me rencontrer ». Ils passeront trois bonnes heures à palabrer sur l’environnement des douaniers français en général et les problématiques qui leur sont propres. « On a même participé à une opération médiatique ensemble pour dénoncer les containers venant de Chine. Mais honnêtement, si un autre candidat me l’avait proposé, je l’aurais fait aussi ». Le personnage le séduit, « j’ai retrouvé du Chirac en lui, et vous savez, on avait coutume de dire que quand vous passiez une soirée avec Chirac, vous deveniez chiraquien. Nicolas Dupont-Aignan, c’est pareil. C’est quelqu’un qui a tout sacrifié par respect pour ses convictions ». Et en 2015, le voici propulsé aux Régionales. « J’avais déjà été candidat aux municipales en 1983 puis en 1989 à Chambéry aux côtés de Claude Bosser » dont la liste sera torpillée de l’intérieur au profit de celle de Jean Bollon finalement défait par Louis Besson au 2e tour. Et en 2020, il fut candidat sur son fief d’Epierre. Les scrutins, il connaît.
« Un candidat aux législatives qui vient avec un programme est un menteur »
2022 sera donc son deuxième tour de piste aux législatives après 2017, une année qui l’a vu échouer au 1er tour avec 2,12% et 745 voix, face à 12 autres candidats. Pas de quoi calmer ses ardeurs. Le voici de nouveau sur le pont, à tracter, incessamment, à aller à la rencontre des habitants d’une circonscription pour le moins curieuse et longtemps propriété de Michel Bouvard. « Il faudrait vérifier mais je crois bien qu’il s’agit de la plus longue de France avec 145km ». De Bonneval aux portes de La Ravoire et de Barberaz, il en aura, du chemin à parcourir pour séduire : « Je suis obligé de faire de la proximité, commune après commune, porte après porte ». Et régulièrement, il poste des photos de ses pérégrinations sur le pré. Bâton de pèlerin en main, il sillonne les routes de sa circo, sans programme mais avec quelques points-clés : « Le candidat qui vient à vous avec un programme tout prêt est un menteur. C’est le gouvernement qui fait la loi. Tout juste peux-tu te permettre de venir avec une colonne vertébrale. Moi, je préfère dire » pas de programme, pas de promesses « et parler de mes valeurs ». Qui sont ? « Le souverainisme, avec la reprise en main du contrôle des frontières et la lutte contre l’immigration illégale. Et le localisme, que j’ai toujours défendu, à titre personnel. Le rôle d’un député est d’être le législateur mais aussi et surtout le représentant d’un territoire en lien avec ses acteurs, ceux qui font la vie du village ».
Estampillé Debout la France, le candidat assume rester petit, « on refuse le principe des boutiques. Déjà, il m’est impossible d’imaginer me présenter ailleurs que chez moi ». Son âme n’est donc pas à vendre. Et qui dit petit dit éloignement des médias. « La presse savoyarde parle assez peu de vraie politique, les gens s’éloignent de cette presse alors il faut être sur les réseaux » , là où il fait feu de tout bois. Ciblés, Emmanuel Macron, bien sûr, Coralie Dubost, cette députée épinglée pour s’être vêtue au frais du contribuable, la justice, pour avoir mis en examen le policier qui avait abattu deux individus au Pont-Neuf ou encore les gens de Reconquête ! 73, qui avaient appelé à l’union sacrée des droites, la semaine dernière… « Les réseaux sociaux, pour moi, c’est volontaire, il faut exister quand on ne parvient pas à se faire entendre dans les médias. J’essaie de ne pas être trop agressif ni trop politique ». Et même si face à lui se dresse une Emilie Bonnivard « sans véritable colonne vertébrale » , il se gardera de toute agressivité la concernant comme concernant ses adversaires. « Moi, je ne veux rien d’autre que défendre les petites communes, notamment touristiques et pas seulement en station. Le réchauffement climatique, il faut s’y préparer » , prophétise le candidat. Et tant pis s’il ne brosse pas son monde dans le sens du poil, tant pis s’il risque de ne pas être élu, seules comptent les convictions et Vincent Thomazo n’en manque pas.
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