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La gazette du Festival : Gaetano Naccarato, après les Oscars, Aix-les-Bains

Par Laura Campisano • Publié le 25/06/22

Gaetano Naccarato est un enfant du pays, de retour dans sa Savoie natale pour y fouler le tapis rouge du premier festival du cinéma français Aixois. De l’émotion pour ce réalisateur émérite dont le documentaire s’est exporté dans le monde entier, jusqu’aux Oscars, avant d’être diffusé gratuitement sur Youtube, dès lundi 27 juin. Itinéraire d’un enfant doué.

Une trentaine de prix internationaux font de lui un prodige de la réalisation et avec la chance et les bonnes fées qui se sont penchées sur la Savoie, Gaetano Naccarato y est bien né, au Bourget-du-Lac précisément. Autodidacte, son nom chante les parfums de la Calabre mais c’est bien en France que le réalisateur a poussé telle une graine de star caméra au poing. La publicité, le documentaire, le court-métrage, jusqu’ici ses choix audacieux sont comme ces bonnes cartes qui tracent une destinée. Soucieux de faire passer son message au plus grand nombre, Gaetano Naccarato n’a pas cédé aux sirènes des plateformes de streaming pour y diffuser « Farmer, a way of life », le court-métrage qui lui a ouvert les portes des Oscars, il s’apprête à le lancer en accès libre sur Youtube, pour que le plus grand nombre puisse le voir.

Gaetano, le passionné

Fier de sa région, de sa Savoie natale, c’est une évidence : Gaetano Naccarato est chez lui au festival du cinéma français d’Aix-les-Bains, et il est heureux de pouvoir faire voyager son travail et à travers lui la Savoie autour du monde. « J’espère faire du bon travail, confie-t-il, et en le faisant voyager, faire rayonner la Savoie au-delà des frontières. J’ai voyagé dans de nombreux endroits, en Asie, aux USA, en Afrique, pour des tournages de publicité, j’ai donc un point de comparaison pour dire que notre territoire est beau. »

Fier donc, sans exagération, juste droit dans ses bottes. Autodidacte, issu d’un milieu modeste bien éloigné de celui du cinéma, Gaetano est passionné, perfectionniste aussi, se lançant des défis à lui-même, plaçant la barre de ses objectifs très haut, depuis l’âge de 15 ans. C’est un touche-à-tout, qui « passe par la fenêtre quand la porte reste fermé » et n’a pas peur d’aller au-devant de nouveaux projets, il a déjà tant réussi jusqu’ici, juste en étant lui. Curieux de nature, volontaire, il a aussi le talent d’être au bon endroit, au bon moment, ce que d’aucuns appelleraient « chance ». Car si l’Union Européenne vient le chercher et lui donne carte blanche pour réaliser un documentaire sur les agriculteurs c’est que Gaetano a fait ses preuves, qu’il a travaillé dur. Mais surtout qu’il a accepté de sortir de sa « zone de confort, après les gros prix, j’aurais pu continuer sur cette voie, souligne le réalisateur qui a été plus de 30 fois primé, mais j’ai le goût de l’aventure, j’ai donc accepté la proposition. » Le résultat est bluffant : les plans, les couleurs, le détail de chaque parcelle, de chaque épi de blé, de chaque abeille butinant des fleurs aux teintes extraordinaires, de chaque regard animal ou visage humain est magnifié.

Chez le réalisateur bourgetain, rien n’est laissé au hasard. « Toutes les images que vous voyez dans le documentaire sont les nôtres, précise Gaetano, j’ai parcouru l’Europe en voiture durant un an, pour prendre des images de l’agriculture fragmentées selon chaque saison, rencontrer les agriculteurs et montrer leur travail. » Les mains dans la terre, les yeux vers le ciel, le contact avec la nature, les agriculteurs européens qui apparaissent dans ce court-métrage sont mis en valeur comme rarement cela a été fait auparavant. Avec l’habillage sonore, le documentaire plonge le spectateur dans le voyage effectué par Gaetano, à la rencontre de ces hommes et de ces femmes dont le travail nourrit l’ensemble des habitants de l’Union Européenne. Le narrateur, qui s’exprime en anglais (sous-titré), livre un message engagé en faveur d’une reconnaissance du travail de ceux qu’il appelle « nos héros ».

En somme, « Farmer, a way of life » sonne comme une ode à ces activités autrefois vues et considérées comme essentielles qui manquent cruellement de reconnaissance depuis ces dernières années, fragilisant un peu plus la politique agricole commune. Dans le contexte écologique actuel, alors que les préoccupations environnementales touchent de plus en plus d’européens, de citoyens à travers le monde, ce documentaire tombe à pic.  « Je pense qu’il faut retrouver une démarche saine face à nos vraies valeurs, expose le réalisateur, aujourd’hui, je peux dire que je me suis retrouvé en tant qu’homme, j’ai grandi à travers ce film et même au-delà, je défends des valeurs universelles, qui nous touchent tous. » En compétition, son court-métrage est en lice pour remporter l’un des prix du public, jury du festival, ce que Gaetano Naccarato a appelé de ses vœux à sa montée des marches, vendredi 24 juin. « On ne va pas laisser ce prix partir à Paris, il faut qu’il reste en Savoie » a-t-il lancé, comme un défi, au public qui se pressait pour le voir.

Effervescence du public autour de « Farmer, a way of life »

Car sur le tapis rouge avant la diffusion du film dans le cadre de la compétition, le public était nombreux pour acclamer Gaetano Naccarato. Idem dans la salle, bondée, du centre culturel et des congrès où se déroule la projection, où les applaudissements étaient  nourris. Certes, Gaetano est chez lui, mais cette effervescence n’est pas seulement locale, il la ressent partout où il présente son travail. « Le public accroche, se réjouit-il, il faut tout faire pour aller le chercher, ça s’entretient au quotidien cette effervescence autour de notre travail. Je veux transmettre et surtout dire que le chemin est aussi beau que le résultat. L’argent n’a jamais été un moteur, c’est pourquoi j’ai fait le choix de mettre le fruit de mon travail en accès libre, publiquement sur Youtube, pour toucher le plus de monde possible, que le message du film voyage partout. C’est un film français, c’est une grande fierté qu’il franchisse les frontières et soit validé parmi les plus grands du monde. » A ses côtés, ses amis et partenaires, qui le soutiennent sans faille car Gaetano le sait, « il est très important d’être accompagné des bons partenaires, sans rancœur, problèmes ni animosité. » car le réalisateur perçoit la fabrication d’un film comme un match de boxe, durant lequel il faut savoir encaisser les coups. Son secret, c’est sa passion, son amour des gens et de son pays « je suis admiratif des parcours, de la culture française, de sa diversité, de son développement culturel et multiculturel. La France, c’est un état d’esprit. » sourit-il.

L’autre secret de Gaetano nous l’évoquions, au-delà de son savoir-faire indéniable, même s’il se dit « plus persévérant que doué », il le puise sûrement dans ses origines savoyardes qu’il revendique sans fard « Il y a une vraie importance à savoir d’où l’on vient, je suis extrêmement fier d’être là, et j’ai envie de continuer à contribuer au rayonnement de la Savoie. » Humble, mais toutefois bien déterminé à repousser toujours plus loin ses limites, quelque chose nous dit que le nom de Gaetano Naccarato n’est pas prêt d’arrêter de faire voyager la Savoie à travers le monde…

Dès lundi 27 juin, le film « Farmer, a way of life » sera disponible gratuitement et publiquement sur Youtube.

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